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« L’utilité commune est le fondement de la société civile.»,
Jean-Jacques Rousseau [1712-1778]
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Depuis le mardi 14 juin et jusqu’au jeudi 16 juin 2011, le CNES (pas le syndicat, il s’agit du Conseil National Economique et Social), a convié pour la première fois depuis son existence en presque 20 ans, les acteurs de la soit disant société civile pour débattre sur plusieurs thèmes, élaborés par ce conseil sans avoir apparemment procédé à des consultations préliminaires avec les concernés. Il aurait peut-être laissé le soin aux participants à cette conférence d’élaborer les axes et élire le bureau de ces travaux. Mais là, c’est une autre histoire.
ÉTATS GÉNÉRAUX
C’est tout un programme que d’avoir choisi le titre d’ « états généraux de la société civile ». Cela veut tout simplement signifier que la société civile est en crise. Il ne s’agit pas ici non seulement d’établir un constat de cette société civile qui n’est que l’ombre d’elle-même mais elle a besoin d’un audit expert pour déceler tous ses maux et établir un diagnostic serein.
Et c’est pour ça, sans doute, que les pouvoirs publics, à travers le CNES, ont convoqué urgemment ce qui en reste de cette société civile, pour voir ce qu’il y a lieu de préconiser pour l’activer comme il se doit en ces moments où nos voisins immédiats bougent brusquement dans toutes les directions. Comment mettre en marche une machine qui est pratiquement toute rouillée ? En quelque sorte, il faut faire le bilan de plus de deux décennies depuis au moins l’ouverture du champ social. Ce n’est pas un mea culpa mais il est absolument nécessaire de faire son autocritique en évitant de traîner les boulets du passé.
Une société civile demande des efforts de tous, surtout y compris des pouvoirs publics qui devraient voir d’un bon œil l’arrivée d’une société civile représentative et non celle qui applaudit à tout rompre ceux qui sont à l’affiche aujourd’hui. De plus, elle a glorifié, à travers un nombre appréciable d’associations, sans retenue aucune tous les carnavals de toutes les « dechrates » et en fermant les yeux sur tous les abus ayant fait mal au pays. L’Algérie dispose quand même de gens intègres, compétents et animés de bonnes volontés qui puissent relever les défis en souffrance dans le pays. L’Algérie, à l’instar des grandes nations, doit miser sur l’émergence d’une authentique société civile pour repartir sur une bonne monture en attendant que les politiques refassent surface sur la scène plus sainement.
LA DÉFINITION
La question qui taraude l’esprit de la majorité des citoyens est également celle qui est posée en titre de ce papier. D’après Wikipédia (*), pour ne pas creuser loin dans les explications, la société civile est le domaine de la vie organisée qui est volontaire, largement autosuffisant et autonome de l'État. Par exemple, une élection est un des événements principaux où la société civile se trouve mobilisée, notamment à travers l'éducation de l'électorat. C'est le corps social, par opposition à la classe politique.
L'UNESCO, comme le précise Wikipédia, entend par société civile, l'auto-organisation de la société en dehors du cadre étatique ou du cadre commercial, c'est-à-dire un ensemble d'organisations ou de groupes constitués de façon plus ou moins formelle et qui n'appartiennent ni à la sphère gouvernementale ni à la sphère commerciale.
Toutefois, note Wikipédia, dans la pratique, ceux-ci n'agissent pas individuellement mais dans le cadre associatif. Une telle association peut être considérée représentative à condition qu'elle ait été constituée sur la base de la volonté et des propres intérêts des citoyens se déclarant formellement et juridiquement membres de l'association.
Wikipédia rajoute encore plus loin que : la société civile regroupe notamment les organisations syndicales et patronales (les "partenaires sociaux"), les organisations non gouvernementales (ONG), les associations professionnelles, les organisations caritatives, les organisations de base, les organisations qui impliquent les citoyens dans la vie locale et municipale, avec une contribution spécifique des églises (chez nous ce sont donc les mosquées) et des communautés religieuses.
Wikipédia conclut que : pour qu'une telle association ou organisation soit en effet une partie active et l'expression de la volonté de citoyens, il s'avère nécessaire que les associations formant la société civile disposent d'une structure et d'une forme d'action intérieure tout à fait démocratiques. Ces nécessités excluent par conséquent des organisations qui ont été constituées par l'État, l'économie ou des églises (il faut donc l’adapter aux mosquées).
Par ailleurs et selon le site d’Agora (**), la société civile, c'est ce qui reste d'une société quand l'État se désengage complètement. En prônant le désengagement de l'État, on prônerait un renouveau ou une réactivation de la société civile. D’autre part, un fonctionnaire entre dans la société civile sitôt qu'il quitte ses bureaux. D’autre part, la solidarité est l’une des caractéristiques d'une société civile vivante, complète le site.
LAQUELLE ?
Où sommes-nous dans toutes ces belles notions ? Faut-il conclure que la définition de tous ces concepts de la société civile soit similaire par rapport à la nôtre ? On peut écrire des dizaines rames de papiers sans trouver effectivement les réponses adéquates.
Y-a-t-il d’abord une société civile ou bien c’est un conglomérat d’agréments qui n’est actionné que lorsque le besoin se fait exprimer par des parties cachées derrière le rideau ? N’est-il pas vrai que chaque fraction dispose de sa propre société civile à travers les organisations qu’elle chapeaute sous le manteau ? N’est-il pas réel qu’à chaque fois qu’une partie occulte a mal à la tête ou veut jouer les trouble-fêtes à la recherche de plus de postes rentiers dans le quota, fait actionner ses partisans se trouvant au sein de cette supposée société civile pour obtenir gain de cause. C’est presque là une forme de chantage qui apparait lorsqu’on s’ingère de façon notoire dans le monde associatif et social. Nous connaissons fort bien ce phénomène à l’université qui pullule à l’intérieur dans les campus en faisant cause et roulant pour leurs parrains et en court-circuitant les problèmes palpables des étudiants, laissés pour compte se débattre dans leur amer quotidien.
Si au niveau national, la société civile fait défaut, au niveau local, c’est le désert. La plupart des autorités locales, pour ne pas dire tous, ne font appel qu’à une certaine catégorie qui s’est fait propulsée « notables de la ville » comme à une certaine époque datant d’avant l’indépendance. Elles ignorent carrément les outils de gouvernance du monde moderne à travers des associations crédibles défendant les généreuses valeurs et les bonnes mœurs. S’ils accordent les autorisations, c’est pour des associations dont les présidents sont malléables à souhait. Rares sont ceux qui passent à travers les mailles du filet. Toute voix discordante qui dérange, est fauchée à la source.
Des pègres locales, sans foi ni loi, entretenues abondamment par la rente, se sont installées dans la durée en devenant les interlocuteurs et représentants privilégiés d’une certaine société civile devant des citoyens désarmés et sans force. Ce n’est pas par hasard que des foyers de tensions n’en finissent pas de se déclarer un peu partout dans le pays sans que l’on puisse trouver les bons remèdes. Ceci démontre bien que les citoyens ne sont pas représentés à travers ces intermédiaires qui ont squatté tous les espaces aidés en cela dans leur besogne par des mains non moins innocentes. Ces endroits ont été usurpés de fait par une sorte de mafia dont la légitimité repose essentiellement sur le pouvoir de l’argent sale et la corruption en général. Lorsqu’on additionne toutes ces aberrations locales, on mesure assez bien l’étendue des dégâts sur le plan national.
LA CRÉDIBILITÉ
Autre question qui s’est forcément posée de manière cruciale pour la commission politique et sans doute pour la commission sociale: est-ce que les différentes associations invitées vont délivrer leur point de vue dans les ateliers de la dite conférence ou bien celui de leurs membres qui vont y participer, voire faire de la figuration ? On ne va rien avancer avant de voir les conclusions de ces trois jours qui décideront de la suite à donner à cette démarche qui est, faut-il quand même le souligner est une première dans le pays. Mais de nombreux légitimes acteurs font défaut. En principe, une telle rencontre ne devrait en premier lieu que déblayer le terrain obstrué par tant d’années d’inactivisme social, d’oublis et d’une hibernation profonde. On doit réfléchir à panser ses blessures afin qu’elle rebondisse en jetant les jalons de nouvelles bases.
En outre, il existe certainement beaucoup d’associations qui n’ont jamais vu le jour par la faute des mécanismes bureaucratiques inimaginables imposés leur mettant les bâtons dans les roues, héritages du passé. Il est facile de vérifier si c’est créer une association est une chose aisée pour s’en apercevoir. Il faut s’attendre à un parcours du combattant mais s’il se trouve que le projet de l’association pourrait embarrasser, ses jours sont comptés. Elle doit être brisée dans son œuf, elle ne resterait qu’une imaginaire idée. C’est pour cela que l’actuelle société civile, qui n’existe que de nom, n’est pas aussi légitime et crédible pour mener un tel débat de son avenir que de nombreux participants à cette conférence l’avaient déjà hypothéqué par leurs antécédentes positions.
Peut-on changer du jour au lendemain les vieilles mentalités par une quelconque baguette magique ? On ne peut retrouver sensationnellement une parole colorée auparavant de la langue de bois pour devenir soudainement audible. Il se peut que beaucoup de membres de la société civile se trouve en dehors des conviés, écartés de facto car ne rentrant pas dans la feuille de route. Il est fort probable que la réelle société civile se trouve déjetée des rouages de l’actuelle société qui discute en ce moment de sa disparition au profit de la première si les choses vont dans la normalité Il se pourrait enfin que le débat soit faussé dès le départ. Attendons la suite des intentions pour mieux apprécier.
LA FORCE TRANQUILLE
La société civile n’est pas une voie de garage, elle n’est pas non plus une maison de retraite. Elle doit être vitale et a besoin d’une nouvelle sève nourricière pour se déployer dans la société.
L’absence d’une société civile énergique manque terriblement au pays surtout lors des crises aigües qu’a connues et qui ne cessent de miner la société. Les faux représentants ont ruiné les espérances d’une jeunesse qui ne croie plus en cette société civile dont la carte est complètement déformée. Une recomposition suivant les règles prescrites des normes des pays émancipés, est plus que souhaitable.
La société civile n’est pas une opposition ni un contre-pouvoir, elle est la conscience qui existe à l’intérieur de la société. Elle est sa force tranquille. Organisée, elle peut faire des merveilles en jouant superbement son rôle. Elle est le guide moral. Elle n’est ni le porte-voix d’un parti ni une charrue ni le bras armé de qui que ce soit. Elle ne doit pas avoir une couleur partisane, ce n’est pas son rôle. Elle doit éclairer le politique pour aller vers le meilleur et le plus utile au peuple et au pays. Elle est présente pour barrer la route à tout aventuriste qui ose lui ôter un seul attribut de ses prérogatives. Une société civile puissante et omniprésente est nécessaire pour un état qui ne serait que renforcé et respecté. Lorsque sa présence est aléatoire, occasionnelle, c’est la déliquescence des institutions et le pays avec qui suivraient la descente infernale vers le bas.
Le problème que l’on doit se poser de manière inquiétante : Possède-t-on réellement une société civile ? Dans l’affirmatif, quel rôle a-t-elle joué jusqu’à aujourd’hui ? C’est vrai que suite à l’ouverture de 1989, l’Algérie avait connu une nuée d’associations dans presque tous les domaines de la vie. Tout le monde avait cru que la santé sociale du pays allait connaître ses jours meilleurs avec cette formidable éclosion. Mais au fil des années et de la crise politique aidant qu’a connue le pays, ces milliers d’associations se sont désagrégés pour ne se montrer que très rarement.
Malheureusement, de nombreuses associations sont devenues des satellites visibles de certains partis ou peut-être avaient-elles été créées dans un objectif succinct. On ne les voyait que lors des campagnes électorales des échéances politiques. La confiance en cette société civile avait alors perdu tout son sens. Ce n’est pas la société civile dont le pays attendait avec ferveur mais c’est juste une multitude de permanences politiques.
Ces jours-ci, les pouvoirs publics ont fait appel, à travers le CNES II pour ouvrir un débat sur cette société civile dont l’implication s’est avérée primordiale dans un pays qui aspire à progresser vers une démocratisation réelle. Mais faut-il aussi procéder au tri dans cette société. Il y a celles qui avaient reçu et bouffé sans limites toutes les aides financières pour devenir une véritable caisse noire à la disposition de parties sans aucun ancrage dans la société. La société civile a besoin d’une épuration sociale et juridique. Le débat auquel participent des milliers d’associations ne peut mener nulle part s’il est dès le début dirigé par des forces nuisibles. Si on ne met en place des outils qui nous permettent de connaître qui fait quoi à l’intérieur de la société, on ne verra jamais l’ascension de la société civile dont l’Algérie a toujours rêvée pour son développement tous domaines confondus.
INTERFÉRENCES DES OPPORTUNISTES DE TOUS GENRES !
Un syndicat qui n’a d’autonomie que de façade ne doit faire partie de cette société civile s’il est sous la coupe d’un parti avec ou sans racines. Il ne doit pas être un relai de cette partie occulte qui est incapable de s’implanter politiquement dans le pays. Il doit être la face réelle de ses adhérents et non celui de gens qui ne peuvent trouver ailleurs souliers à leurs pieds. Le champ politique doit être différent du champ social. Le premier ne doit pas se cacher dans le monde social pour devenir un frein à son émancipation en société civile incontestable.
Les opportunistes, dans ce pays et ils sont tout aussi nombreux, ont aussi coulé cette société civile en s’agrippant de toutes leurs griffes. Ils ont vu là, comme pour les membres ayant des objectifs politiques, une véritable échelle à grimper dans la hiérarchie locale et nationale. N’est-il pas exact que des associations ont été enfantées que dans un but de se rapprocher des autorités et de se mettre à son service au détriment de ses statuts ? On ne peut faire bouger un mouvement selon d’inavoués enjeux mesquins.
C’est vrai que tout le monde peut faire partie d’une association mais on ne doit pas porter deux casquettes lorsqu’on y pénètre dans ce monde. Où tu te tournes, tu les trouves entrain de guetter la moindre occasion, tels des prédateurs guettant la proie promise en haut lieu. Certes, tout militant doit avoir des ambitions, mais elles doivent être claires comme l’eau de source. Les montrer au service de la société n’est point une ambigüité. Escalader la hiérarchie de la manière honnête, c’est sincère comme apparence. Brûler coûte que coûte les étapes par tous les moyens qu’ils soient catholiques ou non, c’est promettre son mouvement à une destruction planifiée.
LES CONSÉQUENCES
Un maire ou un wali peut programmer la dévastation d’arbres en construisant des immeubles s’il ne trouve pas en face de lui des associations de l’environnement organisées et vigilantes. On voit bien dans quel état se portent écologiquement nos cités et nos campagnes. Malgré l’alerte donnée à moult fois, on continue de salir nos cités, devenant une grande poubelle à ciel ouvert. Les associations exerçant dans ce domaine, comme toutes les autres, doivent recevoir toutes les aides pour mettre fin à ce calvaire en sensibilisant les citoyens sur cette dérive écologique.
L’Algérie est aussi devenue un champ d’expérimentation des produits alimentaires importés par des cercles sans vergogne. Les associations de consommateurs sont pratiquement absentes sur le terrain car ne disposant pas de moyens nécessaires pour lutter contre cette mafia de l’informel qui empoisonne le peuple et lamine économiquement le pays. On peut aussi citer les institutions de l’état qui ne sont que l’ombre d’elles-mêmes, désarmées devant ces vampires du gain facile.
Un responsable ne peut pas effacer des milliers d’emplois d’un revers de la main s’il n’a pas en face de lui un syndicat fort de ses adhérents et non celui accouché dans un cadre préfabriqué.
Une société civile, c’est ça. Elle doit être partout assidue. Elle est l’œil attentif du pays pour alerter tout disfonctionnement de
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