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1ère Partie:
http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5202026&archive_date=2014-08-23
2ème partie:
http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5202394&archive_date=2014-08-31
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Achâacha,
l’Algérie profonde (I).
D’année en année, l’engouement
des algériens pour la mer ne cesse de grandir. On peut dire qu’il est devenu le
premier loisir. Il est tout à fait exceptionnel en ce mois d’août de cette
saison estivale version 2014, du moins dans la wilaya de Mostaganem, dont la
fréquence des plages du littoral du département bat, à vue d’œil, tous les
records. Les juilletistes des années précédentes se sont mués aux aoûtiens de
cette année, amplifiant ainsi la concentration. Les vacanciers algériens se
sont donc rués vers la méditerranée sitôt le carême du mois du Ramadhan accompli.
Il y a ceux qui se sont
organisés en réservant leurs places dès le début de l’année en cours. Et ils sont
très rares. Les retardataires comme à leurs habitudes, et c’est la très grande
majorité, commencent à bouger dans tous les sens sitôt le thermomètre s’affole
vers le haut. Ces retards dans la préparation des congés sont aussi dus au
manque flagrant de circuits de réservation pour la grande bleue qui est un
filon extraordinaire mais malheureusement inexploitable. On peut dire que c’est
par le bouche-à-oreille que les vacanciers d’été dénichent leur havre de paix
s’ils arrivent à le trouver avec cette croissance démesurée et des services de
plus en plus défaillants.
LE
CALVAIRE DES SQUATS DES PLAGES
Cet été est marqué par
une certaine anarchie qui existait durant les années précédentes mais qui s’est de
plus en plus accrue au cours de cette année. Elle peut causer d’énormes dégâts
si les autorités ne maîtrisent pas à l’avenir la situation. On a lu dans la
presse que des plages entières ont été squattées par des groupes qui ont
installé parasols, chaises et tables en toute impunité au vu et au su des
autorités occupant tout l’espace public. On t’interdit de poser ton parasol
même loin des leurs. Tu es obligé de le ranger avec amertume et d’en louer un
contre une somme dépassant l’imaginaire pour pourvoir bénéficier de son ombre.
Attention, si tu
rouspètes, tu es vite cerné par une bande ni foi ni loi qui ne recule devant
rien pour appliquer sa loi d’hors-la-loi. Finalement, tu abdiques en se
résignant à débourser encore de l’oseille afin que ta journée ne soit pas
gâchée par des altercations dont toi seul serait le grand perdant. Désormais,
c’est la loi du bras musclé et du bras long qui fait office sur la plage. Tu es
agressé de partout par des hommes armés de gourdins qui s’associent en nombre pour
exécuter leurs codes. Par un manque incontestable de l’autorité publique, ce
sont ces nouveaux maîtres qui se sont érigés en nos nouveaux chefs de l’ombre.
Ils n’ont peur de rien et ne reculent point. Ils gagnent de jour en jour du
terrain, en ville comme en campagne.
Sur le littoral mostaganémois,
il y avait des plages qui étaient vierges jusqu’à quelques années auparavant.
J’étais surpris que jusqu’à la limite de la wilaya, à Ouled Boughalem, Kherbat
et Bahara, aucun vide ne résiste à l’avancée terrible des estivants, polluants
de plus en plus ces beaux coins. On en voit de tous les matricules du pays surtout
à Petit-Port et Aïn Brahim. C’est la foule des grands jours surtout pendant les
week-ends. A proximité du nouveau port, il y a une plaque qui indique que la
baignade est interdite mais des parasols de même couleur sont étalés de partout
sur le sable. Le parking est évidemment payant mais inévitablement
illicite. Un manque à gagner incontestable pour la commune.
LE
CALVAIRE DE LA CIRCULATION
C’est un vrai calvaire
le vendredi en partant comme en revenant de Petit-Port. Un embouteillage
monstre peut vous retenir durant au moins une bonne demi-heure sur une huitaine
de kilomètres seulement qui vous sépare de la ville de Sidi Lakhdar
(Ex-Lapasset). A cela s’ajoute, l’indiscipline d’une catégorie d’automobilistes
dont certains forcent le passage en se permettant toutes les dérives. Ils
empruntent sans aucune conscience la voie de gauche, gênant ainsi les voitures
venant en sens inverse comme ceux roulant dans le même sens qu’ils sont censés
rouler derrière eux lorsque l’ordre est établi. Dès la vue d’un gendarme
motard, ils forcent subitement le passage à droite. Ils n’ont nullement la
crainte de se faire rattraper par les agents de l’ordre qui règlent comme ils
peuvent la circulation. On constate que leur nombre est disproportionné par
rapport à celui de la fréquentation routière en cette période des grandes
chaleurs.
Il faudrait que leur
nombre soit plus conséquent pour pouvoir verbaliser ces chauffards qui
empestent la vie aux paisibles et prudents conducteurs et dont la patience n’est
que trop grande face à de telles situations désagréables. Au vu du nombre
insuffisant des gendarmes pour une population qui peut quadrupler en un mois, les
délinquants pilotes pensent certainement qu’ils ne seraient pas arrêtés par la crainte de créer une véritable pagaille. C’est pour cette raison qu’ils profitent sans doute de cette situation de pointe. C’est
en amont que le contrôle de la circulation, devrait se faire comme à des points
équidistants pour éviter ces débordements et sanctionner les réfractaires. Tout
cela devrait se concilier à une certaine pédagogie pour éduquer ces boucaniers
de la route qui causent chaque année des milliers d’accidents avec autant de
tués et d’invalides à perpétuité.
ACHÂACHA,
LA PAISIBLE
Les amoureux de la
nature cherchent les coins les plus reculés et les plus vierges pour échapper
au brouhaha de ces plages où vos oreilles sont contraintes à écouter à fond la
musique, que vous l’appréciez ou non, du matin jusqu’à tard la nuit. Le respect
du repos d’autrui est banni à jamais. En sortant vers l’est de Sidi Lakhdar et
à quelques kilomètres de là, vous abordez la belle vue de Oued Zerifa, vous
aurez l’impression de quitter un monde pour être transposé dans un autre. Oued
Romane vous éjecte définitivement dans ce nouveau monde, donnant la sensation
que vous pénétrez dans une nouvelle dimension. L’isolement débute à partir
d’ici en laissant derrière soi le tapage de l'autre monde.
En montant l’ultime côte,
vous vous approchez d’un croisement qui vous donne le choix de poursuivre tout
droit vers Achâacha, soit de tourner à droite vers Nekmaria qui en passant vous
pouvez visiter le mémorial des enfumés de la Dahra sur lequel un papier doit y être consacré pour narrer cette histoire du sacrifice des algériens. A
droite, vous pouvez virer vers la plage de Sidi Lâadjel (Ex-Port Mesnard). Une curiosité dont la
visite plonge soudain votre âme dans la méditation avec un endroit sain de tout
béton. Comme si vous êtes le premier à découvrir ce lieu mythique surtout à
droite avec ces pêcheurs agglutinés pour leur plaisir sur des rochers à
perte de vue. Quelques belles criques peuvent recevoir le temps d’une belle
journée quelques restreintes familles ferventes de découvertes de puissantes
sensations.
CHERAIFIA
EN LEADER
En continuant directement
votre chemin et avant d’arriver à Khadra (Ex-Picard), une forêt d’Eucalyptus
vous ouvre la voie vers ce beau village qui a gardé quelque peu intact son charme
avec ces arbres de ficus qui bordent superbement la grande rue. La ville est
rapidement traversée. Dès sa sortie, vous avez l’envie de ne pas rassasier la
jouissance de votre vue. Tous les chemins mènent maintenant à Achâacha. Vous
avez l’embarras du choix. Vous foncez directement vers Cheraifia (Ex-Scambra)
qui vous souhaite à bras ouverts la bienvenue. Des haltes permanentes
s’imposent sur son marché journalier pour vous approvisionner en fruits et
légumes et en alimentation générale. Ses commerçants sont d’une disponibilité
exemplaire. Ils se plient en quatre pour vous permettre de choisir les
meilleurs produits en leur possession. Vous achetez votre poulet vif, on vous
l’égorge sur place. Il est déplumé, vidé en deux tours et empaqueté. Le goût est
évidemment différent avec cette viande livrée toute fraîche.
Quant aux gens, ils
sont prompts à vous saluer avant que vous tentez de sortir un seul mot de votre
bouche. Vous avez l’impression que vous agressez le paysage environnant avec
des comportements vous paraissant anodins importés de la ville mais peuvent
choquer l’ambiance dominante. Nous sommes en plein profond pays de l’Algérie
profonde. Le respect des us et des coutumes de la région s’imposent. Il faut
noter avec fierté que le lycée de Cheraifia qui a été bâti il y a à peine 6
années dispose du taux le plus élevé de réussite à l’examen du Baccalauréat
dans la wilaya. Les cours privés qui sont généralisés dans les villes mais
quasi-inexistantes ici n’ont sans aucun doute rien à avoir avec ces excellents
résultats. Cet établissement ne dispose certainement pas des meilleurs moyens
de ceux des villes mais leurs armes sont la motivation et la volonté qui les
animent. C’est une très belle revanche de la campagne sur la ville. Pourtant, Achâacha, ce n’est qu’un transit pour les enseignants qui y
sont affectés principalement pour ceux qui sont originaires des contrées
proches du chef lieu de la Wilaya.
MARDI,
LE SOUK HEBDOMADAIRE DE ACHÂACHA
La région de Achâacha
est une région essentiellement rurale qui vit au rythme des produits agricoles.
Le souk hebdomadaire du Mardi vaut le détour. A lui seul, il vous donne le
pouls du terroir. On en trouve de tout. Du blé, de l’orge, du foin sont à
proposer. On en trouve aussi des poulets vifs, fermiers et industriels ainsi
que des canards et lapins. Les prix sont
à débattre. C’est l’offre et la demande qui les fixent. Lorsque le vendeur et
l’acheteur n’en conviennent pas à s’entendre, ce sont d’autres personnes qui
interviennent en arrangeant le tarif qui satisfassent les deux parties. Des ovins
et surtout des caprins sont égorgés sur
place et dont la viande est accrochée sur trois troncs d’arbres reliés en haut
par une ficelle et librement espacés en bas. C’est la vitrine de la boucherie des lieux. Fièvre
aphteuse oblige, il n’y avait pas de viande rouge cette semaine sur le marché. Ah !
J’allais oublier, il y a aussi des bonbons que l’on appelait bonnement dans le passé
par les bonbons du souk, cuits à la semoule et au sucre. Ils sont vendus à
toutes les couleurs. Le visiteur peut acheter également de la menuiserie, des
ustensiles agricoles, des meubles, etc. La curiosité du souk, ce sont ces
multiples guitounes-cafés disposés à différents points. Les consommateurs sont
assis en groupe sur de longs bancs. Le thé et le café sont préparés à l'ancienne. En hiver, ils sont agrémentés en plus de beignets chauds, faits
aussi sur place.
Les enterrements des morts,
s’ils coïncident avec le mardi, sont annoncés au sein du marché même. Tout le
monde se tait subitement pour écouter les dépêches diffusées à l’aide de haut-parleurs
dispersés au coin du marché et qui sont accueillis dans un silence
religieux. L’information sera répandue telle une traînée de poudre à travers
toutes les zones du territoire. A l’heure de la levée du corps, c’est une marée
humaine qui vient présenter ses condoléances à la famille du défunt et assister
aux obsèques. On y revient en force le soir pour la veillée religieuse. Dans
ces situations de douleur, la solidarité et l’entre-aide des 35 douars qui
peuplent la région sont de mises.
L'ambiance ne diffère guère de celles des mariages avec ces processions de voitures du cortège dans
tous les sens. Des magasins sont là pour vous louer des trônes pour le marié
sur lequel il s’assoit pour accueillir convenablement ses amis. Le "Barok" (aides
financières offertes par les invités) est à l’honneur pour aider la famille à
amortir le choc budgétaire des multiples dépenses. C’est une marque assez forte de la
bonté et de la sincérité pour apporter leur soutien et leur bénédiction au
mariage. Il n’y a pas d’invités au sens propre du terme, on s’invite comme un
frère au mariage de son voisin.
Au point de vue
développement, Achâacha attend avec impatience l’ouverture de son tout nouveau
hôpital. Espérons que les médecins spécialistes ne rechignent pas à rejoindre
cet établissement sanitaire pour le plus grand bien des malades de la cité. Le
secteur employeur étatique n’est en général visible que dans l’administration
et l’éducation. Comme nous l’avons cité plus haut, l’agriculture est la
première activité. Néanmoins, les habitants de la région ne possèdent de
vastes terres pour cultiver de grandes surfaces mais ils ne détiennent que de
petites parcelles qui s’amenuisent de génération en génération du fait du
partage de l’héritage familier. S’il l’on rajoute le besoin d’habitations
individuelles, il ne reste pas grand-chose pour faire subvenir aux besoins de
la population de la daïra. L’aide de l’état est plus que nécessaire afin de
fixer toute la masse dont la jeunesse souffre plus qu’aucune autre du chômage
dévastateur. Au point de vue de certains appuis, on remarque que l’Ansej a
creusé une petite brèche à la vue discernable de ces nombreuses camionnettes,
surtout de marque Toyota Hilux, qui sont très prisées par les utilisateurs
locaux.
A suivre…
Achâacha,
l’Algérie profonde (suite et fin).
Les douars environnants,
par leur dense population, gravitent autour du chef-lieu de la daïra qu’est
Achâacha. On y vient de partout pour leurs affaires administratives. La mairie est le
centre de gravité de la daïra avec son nouveau et imposant siège comparativement
au reste des édifices. Il y a aussi la poste mais pas la trace d’une moindre
banque ni d’ailleurs à Khadra pourtant il en existe depuis assez longtemps dans
d’autres daïrates du pays. On se pose sur l’absence d’une banque à vocation
agricole dans une région qui en dépend presque exclusivement. Il faut se
déplacer jusqu’à 50 kilomètres pour en dénicher une.
LE
COÛT DU JOURNAL MAJORÉ DE 5 DINARS !
Depuis que je connais
la région, il n’y a pratiquement pas assez de marchands de journaux.
Aujourd’hui, je n’ai repéré qu’un seul. Il est à peu près en face du siège de
l’APC. Les titres qui sont proposés n’arrivent de Mostaganem qu’à partir de 9
heures. Il n’y pas de distributeurs de journaux comme presque partout dans le
pays. Il est acheminé ici par des moyens personnels du buraliste. C’est pour
cette raison qu’il est cédé de 5 dinars supplémentaires dans le but de
supporter le fardeau de l'expédition. Les gens se sont accoutumés depuis
fort longtemps. Et pourtant, nous sommes dans le nord en plein littoral dans un
lieu situé presque à mi-distance entre les deux plus grandes villes du pays. A
notre connaissance, Achâacha n’est pas une enclave mais elle y est presque.
EN
TERRE IBERIQUE !
Lorsque vous ouvrez le
poste radio de votre voiture et en défilant ses fréquences FM et en ondes
moyennes, vous vous croyez beaucoup plus en terre ibérique que dans le pays. En
effet, les fréquences des puissantes stations espagnoles chevauchent sur celles
des radios algériennes en arrivant à les étouffer totalement. Il faut désormais
se mettre à la langue de Cervantès pour comprendre le sens. Cette proximité
nous apprend que les côtes espagnoles ne sont pas assez éloignées. On a souvent
lu quelque part par le passé que des haragas avaient fait de la région, à une
certaine époque, une parmi les zones les plus privilégiées de l’émigration
clandestine.
Au point de vue de
développement, pour le visiteur neutre que je suis, je sens que Achâacha a
besoin de beaucoup d’efforts des responsables pour se mettre au diapason des
autres daïrates de la wilaya. La ville, en elle-même, nécessite un lifting fondamental
tant sur le plan de l’embellissement qu’au niveau des espaces verts pour se
sentir dans une ville quoiqu’un jardin aménagé sauve un peu la face. Heureusement
que Achâacha bénéficie de l’air frais de la côte autrement ce serait un
calvaire de supporter la chaleur de l’été. Les trottoirs sont d'ailleurs à
uniformiser. Ce n’est pas obligatoirement avec du carrelage mais le ciment ou
le bitume peuvent suffire largement. L’essentiel est que cela puisse conduire à
améliorer un certain bien-être en éliminant un peu de poussière qui s’élève dès
que le vent commence à souffler. Ce n’est pas une particularité de Achâacha
mais d’innombrables villes du pays souffrent énormément de ces épreuves. Un
tant soit peu aménagement urbain apporterait certainement un plus à la ville
qui désire à l’y être.
Une chose qui a ses clones
partout dans le bled, ce sont ces marchés couverts édifiés dernièrement à coûts
de millions mais finalement inutilisables par les vendeurs de fruits et légumes
qui préfèrent exercer leurs activités en plein air. Il aurait fallu, à mon
humble à avis, avant que les autorités envisagent un tel projet, se concertent
d’abord avec les usagers avant d’entreprendre quoi que ce soit. C’est ce qu’on
peut appeler de l’argent jeté par les fenêtres pour une ville qui en a tant
besoin de les dépenser à bon escient.
Au point de vue des
loisirs, je n’ai vu, en tous les cas de visu, de terrains de sports de
proximité ou un petit complexe sportif comme il en existe partout ailleurs. Je
ne sais pas ce qu’il en est toute l’année de la culture lorsque Achâacha se
vide de ses estivants et retrouve son hibernation durant les autres 10 mois de
l’année.
Achâacha vit à
proximité de la mer mais paradoxalement ne vit pas de celle-ci. Aucune
poissonnerie n’est visible dans les parages. Il faut y aller jusqu’à Bahara,
dans la commune d’Ouled Boughalem pour en déceler quelques unes. La raison
essentielle est sans aucun doute le manque d’incitation et d’information des
autorités sur les possibilités de la filière et aussi l’absence de motivation
des jeunes de la région à s’investir dans le créneau de la pêche. La
réalisation d’un port de pêche est plus que souhaitable surtout qu’il existe
des sites où l’on peut réaliser un tel projet. L’ancien Port-Mesnard s’y prête assurément.
BELMEHEL,
LE MONSIEUR PLAGE
Prenons maintenant le
chemin vers le large, tout droit vers la plage de Sidi Abdelkader qui
s’impatiente de nous accueillir avec tous les égards. Avant d’y aller et
s’installer, on passe d’abord par la mairie de Achâacha pour payer la location
de notre réservation. Là, le responsable, Mohamed Belmehel, le monsieur plage de
la commune comme on le nomme officiellement, nous accueille avec ferveur. Après nous avoir
souhaité la bienvenue et en ayant soldé notre dû au niveau de la recette
principale, il nous oriente directement vers le lieu de notre séjour en nous
communiquant les coordonnées de la personne sur place, responsable du camp.
Nous montons en voiture et descendons vers la sortie nord-est de Achâacha pour
se trouver au carrefour du lieu-dit "Essabala". Nous prenons ensuite la direction
à droite en abordant sur 3 ou 4 kilomètres une succession de virages. A un
moment donné, on passe devant une ferme dont l’inscription sur son front date
de l’époque coloniale nous fait remonter le temps. «1949, Clos Kramis, Ferme Segalas» nous avise
que la bifurcation vers la mer n’est pas lointaine.
LA
SOURCE BÉNIGNE
Effectivement, en
dévalant le dernier tournant, la nouvelle plaque aux couleurs touristiques nous
enseigne que la plage Sidi Abdelkader est à la prochaine sortie à gauche. Lors
de ma dernière visite, l’ancienne plaque indiquant la direction y était mais
plus maintenant, peut-être usée par la rouille. Juste au moment de prendre la
toute dernière route avant l’arrivée, on remarque tout à fait à la gauche, une
multitude de véhicules garées autour d’un point d’eau avec son eau fraîche qui jaillit
somptueusement d’une dizaine de fontaines. Cette source existe depuis je
connais la région dont se désaltère toute Achâacha et ses environs. Ce sont des
milliers de personnes qui viennent tous les jours s’approvisionner en cette eau
potable. On y vient le plus souvent en camionnettes pour faire le plein de la
semaine. Ce qui crée parfois de fortes tensions entre les usagers surtout durant
la période du mois du Ramadhan comme on me l’a expliqué sur place. Par contre,
on laisse gentiment la place aux passants et aux vacanciers de s’abreuver
paisiblement. Au cours de la journée, on
peut également constater sur place des dizaines de tracteurs tirant des
citernes et faisant la navette entre le lieu de cette eau rafraîchissante, à
partir de puits creusés un peu plus en contrebas, en direction vers les
hauteurs pour honorer les demandes en cette eau devenue presque sacrée. Il faudrait
améliorer ou totalement revoir le système de distribution afin de satisfaire la
forte sollicitation qui s’amplifie d’année en année de cette mine d’eau.
On reprend la dernière
ligne de droite. Au fait, nous nous trouvons maintenant dans les limites de l’oued
Kramis. Son lit se trouve à quelques dizaines de mètres de là. En été, il est le
plus couramment à sec. On distingue sa trace par les galets déposés sur les
bords de la plage par les crues des pluies d’hiver de l’oued. Depuis 2004, un
barrage du même nom a été édifié en amont à une dizaine de kilomètres de son
embouchure. Pour visiter le barrage de Kramis, d’une capacité maximale de 80
millions de mètres cubes, on peut remonter l’oued à travers une vallée
majestueuse qui n’a rien à envier aux sites des beaux paysages des films du Far-West
américain pour se retrouver dans une montagne, à admirer le barrage. Une vue
superbe nous est offerte en cet endroit dessiné à la perfection par le bon
Dieu. Le calme, le repos, la paix et la sérénité vous envahissent soudainement.
Revenons à notre source
où nous poursuivrons notre chemin sur un peu plus de 2 kilomètres sur une route
nouvellement bitumée en tapis. L’entrée de la plage est ornée par des petits
drapeaux. Vous sillonnez 3 magasins saisonniers avant de tourner à gauche vers
le camp de notre séjour. Vous vous croyez dans une émission de télévision française
qui se nomme « Terre inconnue » pour ceux qui n’ont jamais eu
l’occasion d’y séjourner. Nous allons humer durant une quinzaine de jours l’air
pur et frais de la montagne, de la mer et de la forêt qui cernent de toutes
parts ces lieux magiques conservées presque à l’état brut. Et de l’iode à gogo. Le soleil, le
sable et les baignades journalières sont les autres bénédictions. Que dire de
plus !
BIENVENUE
À SIDI ABDELKADER BEACH
Le lieu est peint en
bleu et blanc. Il a l’air de dater de l’époque de la fin du règne de Chadli. Il
est composé de 3 types de cabanons qui vous semblent avoir été construits à la
va-vite selon les moyens de l’époque et aussi grâce sans doute aux prix des
matériaux de construction qui étaient plus abordables en ces temps. C’est la
seule vitrine du tourisme estival de la commune. Il est dommage qu’elle ne soit
pas assez exploitée par la commune afin de tirer des rentrées substantielles et
de la plus rendre attractive. Attention, il ne faut pas user du copier-coller
d’ailleurs sinon vivement qu’elle subsiste en cet état en attendant que les
mentalités évoluent dans le bon sens.
Ce n’est pas le faste dans
lequel baigne l’endroit mais il ressemble à ces maisonnettes que l’on construit
en un temps record quand on ne possède pas un toit où loger pour mettre sa
petite famille à l’abri avec de l’eau et de l’électricité et dont le toit est soit
en zinc ou en tôle ondulée et où certaines fenêtres ont été récupérées des
anciennes défuntes écoles du plan colonial de Constantine. C’est très rare que
les portes et les fenêtres se ferment convenablement. On peut les défoncer en
une toute petite minute. Faute de moyens, les vitres, qui ont été abimées durant
l’hiver précédent ou les années d’auparavant, n’ont pas été remplacées. Les
eaux usées sont déversées dans des fosses sceptiques qui sont vidées
régulièrement par le service hygiène de la commune.
HADJI
A LA BAGUETTE
Il faut noter que Hadji
Laid, le responsable du camp sur le terrain et premier adjoint de monsieur
plage, ne lésine sur aucun moyen en sa
possession pour vous apporter toute l’aide nécessaire pour rendre quelque peu acceptable
votre séjour. Je n’ai rarement vu un algérien aller ainsi en besogne. Il arrive
au camp à 7h ou 8h du matin pour ne repartir chez lui que vers 20h, parfois tardivement
aux alentours de 23h lorsque la situation l’exige. A midi, il prend juste un maigre
casse-croûte acheté chez le gargotier «Cassane» du coin pour calmer son estomac.
Le lendemain, il est debout à la première heure au travail, comme à son
habitude toujours au four et au moulin. C’est vraiment l’homme à tout faire.
C’est vrai que le
premier jour, on n’arrive pas à s’habituer. On quitte sa maison avec toutes les
commodités pour se retrouver dans une nouvelle vie presque précaire mais vite
oubliée par l’ambiance qui règne. L’important est d’avoir la mer à deux pas,
peu importe l’inconfort. La première nuit est cauchemardesque pour ceux qui ne
sont pas coutumiers à dormir avec des lézards et des araignées qui hantent les
murs et les coins de votre demeure de circonstances. On arrive même à voir des
grenouilles sautiller à l’intérieur du provisoire domicile de fortune.
LA
VIE AU CAMP
En arrivant ici, il ne
faut surtout pas oublier des ustensiles très indispensables. Un marteau avec un
demi-kilogramme de clous sont d’une nécessité absolue, un tournevis et des vis
le sont également. Un demi-kilogramme de fil d’attache vous soulage d’énormes
désagréments. Des cordes sont plus qu’obligatoires pour faire sécher votre
linge et nouer vos draps ou des bâches pour protéger la cour contre le soleil.
Un tuyau de 4 ou 5 mètres vous est salutaire pour remplir vos bassines se
trouvant dans la courette. Vous ne pouvez pas s’en passer d’un réfrigérateur et
bien sûr d’un réchaud à butane pour la cuisson. On a prévu les pastilles à
moustiques mais ouf ! Heureusement qu’il n’y a pas une dans les parages.
On dort vraiment à l’aise dans la tranquillité et le silence absolu jusqu’au
petit matin.
Le matin, on se lave la
figure juste à l’aide d’une tasse d’eau. Il n’y a point de lavabo. Après
avoir pris le petit-déjeuner que nous voilà dehors pour une superbe journée
ensoleillée. Le côté nature arrive à vous faire oublier l’aisance matérielle de
la ville. La parabole, l’internet, Facebook, la radio, les journaux sont bannis
à jamais dans cet univers vide de toute modernité. Même les bons
« flexy » sont livrés avec le pain. Ils sont néanmoins remplacés par
d’autres activités qui effaceront les stigmates des mauvaises habitudes de
sédentarité. Depuis votre réveil jusqu’à tard la nuit, pas un instant de répit,
c’est plein d’activités. Le soir, vous vous effondrez comme une planche sur
votre matelas.
La première chose à
découvrir est votre nouvel environnement. Vous cherchez évidemment à faire
connaissance avec vos voisins de la quinzaine. Pour mon bonheur, je tombe sur
deux sympathiques familles. Les chefs de ces familles, Noureddine et Hocine, amis
d’enfance, ont choisi de passer ensemble leurs vacances. Je ne vous dis pas
qu’à chaque occasion, ils nous offrent des crêpes algériennes (beghrir) ou d’autres
offrandes, par exemple comme de la confiture aux figues faits maison et dont
vous en raffolez à volonté. A la fin de votre séjour, vous pouvez repartir,
mine de rien, avec votre carnet d’adresses enrichis de nombreuses nouvelles rencontres.
En face de votre deux pièces-cuisine, vous pouvez planter votre tonnelle pour pouvoir recevoir vos
invités surprises. Il faut être prêt à tout moment. Il peut vous arriver de
passer la nuit à la belle étoile tout en appréciant un ciel comme jamais vous
ne l’avez vu en ville, pollué par la lumière des lampadaires. L’ami Mustapha
était vraiment aux anges surtout lorsqu’on se promenait le soir après le dîner
au bord de la mer, contemplant par la
même occasion ce beau ciel étoilé et son éclatante voie lactée.
Les soirées sont
quelquefois animées par les sections scouts de Ouarizane, Ghardaïa, Djelfa,
Oued R’Hiou et de Achaâacha qui campent dans des tentes installées sur des
plateformes en béton dans un cadre à part du camp. Ils chantent et
applaudissent toute la journée dans une ambiance bon-enfant. Le matin, nous
sommes réveillés au son des chants des petits mômes qui font plaisir à voir,
parfois au rythme des tambours. La chose qui m’a fait vraiment plaisir est cette
prière du vendredi qui a été accomplie chez les scouts de Ghardaïa et qui a
regroupé des algériens de toutes les régions du pays sans aucune distinction. Une
belle image de l’Algérie, une et indivisible.
Dès la fin de l’installation
dans le camp et l’établissement de nos nouveaux repères. Nous cherchons d’abord
le sentier menant à la plage. Une fois décelé, c’est la course vers le rivage.
Une fois le parasol installé, les chaises dépliées que nous nous hâtons à
prendre notre première baignade. Au bout de deux heures et sans se rendre
compte que la peau enflammée par le soleil devient toute rouge. Le coup de
soleil vous atteint de plein fouet. Le soir, les premières douleurs commencent
à se faire sentir. Que c’est dur quand on ne prend pas toutes ses précautions.
On pense le second jour
à escalader la montagne qui mène au mausolée de Sidi Abdelkader situé sur la
montagne surplombant la plage. C’est une ascension rendue presque obligatoire
surtout pour les jeunes vacanciers. Sur l’autre mont à l’ouest, c’est un autre
mausolée qui est visité par les initiés, c’est celui de Sidi Bouabdellah. C’est
aussi un autre défi que tout le monde doit remplir. En bas, sur l’extrémité Est,
il existe une argile dont on dit le plus grand bien et qui possède nous a-t-on
dit différents remèdes pour la peau. A leur retour, les jeunes dames n’oublieront
pas de faire le plein de la cargaison annuelle.
Enfin, il faut
constater que la commune a entrepris de construire un front de mer sur la
plage. Pour cela, il faudrait surtout ne pas dénaturer le site par des ouvrages
qui n’ont ni goût ni aucun sens tant qu’au point de vue culturel qu’estétique.
La consultation des spécialistes est des plus primordiales.
AU
REVOIR ACHÂACHA !
Une autre virée, celle
de la visite de la tombe du saint Sidi Lakhdar Benkhlouf s’impose dont les
festivités annuelles, coïncident comme chaque année avec la journée du
Moudjahid mais l’intense circulation qui règne ces jours-ci nous dissuade de
l’accomplir pour cette année par la crainte de tomber sur un embouteillage
infernal.
Nous arrivons presque
au terme de notre séjour. Le compte à rebours du retour est déclenché. Les
adieux commencent à fuser. Certains se donnent peut-être rendez-vous pour
l’année prochaine si nous serions encore de ce monde. On souhaite que les conditions soient de plus
en plus meilleures pour ne pas subir les mauvaises surprises. Nous quittons Achâacha presque les larmes aux
yeux. Il nous sera difficile de se réveiller brusquement de ces merveilleux
moments passés qui nous ont fait oublier le cauchemar de la ville en vivant
très simplement dans une atmosphère des plus ravissantes. Où nous avons perdu
la notion du temps et de l’espace. Nos gestes ne ressemblent plus à ceux d’il y
a une quinzaine de jours. Nous avons un petit aperçu de ce qui nous
attend chez soi tel que le cauchemar de ces 100 personnes tuées par la
route en seulement une semaine ou la violence des stades avec la mort terrible
du joueur camerounais Albert Ebossé. Allah yestor !
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