vendredi 3 juillet 2009

Le régime indemnitaire : une équation à plusieurs variables pour les enseignants chercheurs.

Préambule :

Plus d'une année après la promulgation du décret fixant la grille indiciaire des traitements et le régime de rémunération des fonctionnaires, que les minces hausses des salaires ont été déjà dévorées par la cherté de la vie.

Cette grille âgée d’une pige avait suscité de très nombreux commentaires par tous les fonctionnaires. Elle a laissé couler beaucoup d’encre par de nombreux écrits et interprétations dans la presse.

Elle a aussi permis aux syndicats autonomes de la fonction publique de se coaliser par l’organisation de multiples actions sur le terrain en rejetant ces augmentations minimes.

Pire encore, les deux importantes indemnités l’ISS (Indemnité spécifique de sujétion) et l’ICR (Indemnité Complémentaire du Revenu) pour les enseignants chercheurs ont sauté du régime indemnitaire, pourtant cette seconde indemnité a été revalorisée qu’en juillet 2006 passant de 500 DA à 9000 DA.

Une fois que la nouvelle grille des salaires a été confrontée aux dégâts qu’elle allait engendrées, sitôt sortie sitôt corrigée par l’introduction in-extremis d’une Indemnité Forfaitaire Compensatrice (IFC) au profit des catégories situées entre la 1 et la 17 sauf pour les 7 subdivisions de la catégorie hors échelle dans lesquelles se trouvent ceux des enseignants chercheurs mis à part celui de l’assistant.

Selon les maints discours des officiels proclamant tambours battants que cette grille des salaires allait révolutionner la fonction publique. A sa place, nous avons eu droit à un replâtrage plus que jamais présent et qui n’en finit pas de sévir. Les pouvoirs publics n’ont-ils pas annoncé que le régime indemnitaire ne seraient envisageable tant que les 44 ou 45 statuts particuliers n’aient pas vu le jour ? Cela prouve bien que si cette grille a été réfléchie et conçue en collaboration directe avec les réels partenaires sociaux, elle n’aurait certainement pas connu un premier accroc dès son entrée sur scène. Voilà comment la réalité du terrain a rattrapé tout ce beau monde.

La grille des salaires et l’exclusion des syndicats autonomes :

En effet, les initiateurs de ce texte primordial pour l’avenir des 1 million 600 mille fonctionnaires n’a donné lieu à aucune discussion ni consultation des syndicats autonomes malgré leur représentativité flagrante dans tous les secteurs de la fonction publique. Il n’y a que le syndicat officiel des pouvoirs publics qui a été mis au parfum.

Pourtant le commun des mortels sait que les syndicats autonomes de l’éducation nationale, de la santé, des administrations, de l’enseignant supérieur, pour ne citer que ceux-là, etc…composent la plus grande représentativité des fonctionnaires du pays. Est-ce que les pouvoirs publics considèrent ces syndicats immatures ? Qui ne savent mesurer les conséquences économiques sur le plan national et international.

Les responsables politiques du pays ont le devoir de mettre à l’épreuve ces syndicats en les responsabilisant par leur association à la vie sociale et économique du pays.

Les syndicats autonomes dans leur grande majorité ont toujours revendiqué aux pouvoirs publics que soit ouvert un véritable débat sur la politique des salaires en Algérie mais en vain.

Les plus hauts diplômés du pays qui sont affiliés à ces syndicats et ont connu les universités Algériennes et de prestigieuses universités et écoles à l’échelle mondiale, ne sont-ils pas capables de générer des compétences au niveau de leurs syndicats respectifs ? Quand même ! Il n’y a qu’à voir ces différents cadres dont l’Algérie n’en désiraient pas et qui font les beaux jours de nombreuses universités, écoles d’ingénieurs, hôpitaux, et j’en passe à travers le monde.

Les pouvoirs publics doivent savoir que ceux restés en sont aussi capables de faire mieux car ils sont acharnés à rester sur la terre des aïeux pourvu que la reconnaissance socio-professionnelle soit de mise.

Les enseignants chercheurs et les hauts fonctionnaires :

Plus particulièrement, Je vais m’intéresser dans cet article sur le sort qui a été réservé aux enseignants universitaires dans cette grille dont beaucoup d’espoirs ont été placés mais la déception a été énorme en croyant que cette grille allait être basée sur les niveaux de qualification (diplômes).

Certes, les grades des enseignants chercheurs comme d’autres statuts particuliers ont été placés dans la catégorie hors échelle. Mais ce n’était qu’un mirage de plus.

On discerne deux types fonctionnaires, les hauts et les « bas » fonctionnaires. Les premiers et les seconds ont des grilles de salaires totalement différentes et n’ont aucun lien sauf que si le haut fonctionnaire antérieurement fonctionnaire préfère être rémunéré en combinant les avantages des deux grilles.

Encore que la valeur du point indiciaire n’est pas la même, celle des fonctionnaires tout court est de 45 DA et restée à 19 DA pour les hauts fonctionnaires contrairement au nombre de points indiciaires du salaire de base qui a gonflé. La valeur du point indiciaire des hauts fonctionnaires n’a pas subi de changement sans doute pour esquiver les comparaisons entre les 2 distinctes grilles en question.

Quant au régime indemnitaire des hauts fonctionnaires, il a été immédiatement et systématiquement revalorisé. En effet, dans l’ancienne grille des hauts fonctionnaires, les indemnités s’exprimaient en pourcentage par rapport au traitement variant de 40 à 50%, lorsqu’on les translate par rapport au salaire de base, le taux se métamorphose par miracle entre 40 à 83% ! Une vraie astuce de bureaucratie !

Aussi, l’Indemnité d’Expérience Professionnelle (IEP) diverge entre les 2 grilles, un échelon supplémentaire tous les 2 ans pour les « hauts », pour le reste ce sont 3 durées réparties entre 2ans et demi et 3 ans et demi. Soit les 12 échelons en 24 ans pour les uns et jusqu’à 42 ans au maximum pour les autres, presque deux carrières en une.

L’université avec tous ces hauts diplômés est dépourvue de hauts fonctionnaires et n’en possède qu’un seul, le recteur alors le centre universitaire et l’école hors université n’ont pas ce privilège.

Les enseignants chercheurs et la grille des salaires :

La grille des salaires a donc constitué le feuilleton de l'été 2007 et a tenu en haleine tous les fonctionnaires qui ont suivi pas à pas jour pour jour toute déclaration émanant de la bouche des hauts responsables en particulier, le premier ministre, le ministre du travail, etc…. Même le SG de l’UGTA s'était mis en vogue de la belle partie qui se préparait en lançant triomphalement qu’il s’agissait d’une victoire salvatrice en déclarant fièrement que les fonctionnaires auront une belle surprise à la rentrée sociale 2007/2008. Je suis totalement d’accord avec lui, pour une surprise c’en était vraiment une ! Une montagne qui a accouché d’une souris pour les syndicats de la fonction publique et les fonctionnaires.

Les fonctionnaires en général et les enseignants chercheurs en particulier qui attendaient une vraie révolution dans leur fiche de paie, moisiront peut-être après leur retraite pour une quelconque amélioration de leur quotidien.

Le pays aux 150 milliards de dollars de réserve, l’un des pays arabes les plus riches, sans doute parmi les tous premiers pays africains, ne satisfera pas aux revendications de ses fonctionnaires malgré que les pouvoirs publics les reconnaissent comme justes et légitimes pour les enseignants chercheurs.

Justement les enseignants chercheurs qui luttent depuis les années 90 attendaient beaucoup de leur statut particulier qui semble-t-il allaient régler définitivement le problème de leurs salaires. Cette frange représente en principe l’élite nationale mais non reconnue en tant que telle par les pouvoirs publics et les instances politiques contrairement à leurs homologues Magrébins en particuliers Marocains.

En conséquence, les salaires de ces derniers fluctuent entre 7100 Dirhams pour le 1er grade de l’assistant (7 millions de nos Centimes) à plus 40000 Dirhams (40 millions de nos Centimes !!) pour le dernier grade du Professeur. C’est ce qu’on appelle une juste reconnaissance de leur nation. Le salaire d’un président d’université Marocaine dépasse même celui de son ministre et avoisine celui de son premier ministre. Le Maroc n’a cependant ni pétrole ni les potentialités de l’Algérie mais l’échelle des valeurs paraît être appliquée.

Notre pays est toujours figé sur son passé socialiste où l’on ne veut aucunement casser ce tabou. L'URSS et la chine sont passées à un autre stade, il n'y a qu'à constater les salaires des travailleurs chinois opérant dans notre pays comparativement à ceux des nôtres faisant le même boulot.

Conséquences des bas salaires :

Il n’y a qu’à scruter comment nos administrations, écoles, lycées, universités, etc… fonctionnent-elles pour s’apercevoir du délabrement et du désastre de notre fonction publique qui doit être la cheville ouvrière du pays. Le «je m’en-foutisme» fait un malheur.

La première cause de la déficience des fonctionnaires, ce sont d’abord leurs salaires dérisoires.

On ne peut supporter qu’un fonctionnaire devienne petit et faible devant un quelconque personnage véreux corrupteur. Il ne faut surtout pas qu’il soit amadoué et soudoyé par ces «shab echkara » jargon utilisé par les petites gens. Le fonctionnaire, avec une intégrité irréprochable, doit être l’œil vigilant de l’état et son représentant légitime.

La corruption galopante est inversement proportionnelle aux salaires et en est une conséquence directe de ces basses rémunérations. Heureusement qu’elle n’est pas généralisée mais elle serait en constante progression si la réaction des pouvoirs publics tarde à venir.

L’absentéisme constitue aussi un autre fléau pour la fonction publique. Il n’y a qu’à faire un tour dans nos administrations entre 8 h et 9h et à partir de 14h. Le mois de ramadhan constitue une autre catastrophe économique pour le pays.

Lors de l'année 2007/2008, aucune de nos universités n’a commencé à enseigner à temps à tel point que le chargé de l’information du MESRS l’a reconnu implicitement en annonçant que les cours allaient débuter juste après le mois du ramadhan.

L’état ne fait aucun effort pour sanctionner cet absentéisme reconnaissant tacitement que les salaires actuels ne valent pas une présence permanente. C’est toujours le pays qui trinque.

Lorsque des fonctionnaires proches de la retraite désirent émigrer sous d’autres cieux plus cléments avec femme et enfants quelque soient les conditions d’accueil, c’est que notre pays ne fonctionne pas normalement. Rien n’y manque, les finances existent à tel point que les trottoirs des villes sont refaits dès qu’une quelconque occasion soit visible, les potentialités sont présentes mais notre système est rouillé depuis longtemps. Même voyant venir à grands pas le naufrage, il ne veut pas changer. C’est presque un suicide collectif. Il attend sa mort lente et le pays avec. La question que se pose tout le monde : Pourquoi veut-il rester ainsi, mourir que se muter ? Comme pour la plupart : il n’a pas plus la force d’agir.

Bon sang, réveillons-nous ! Nous ne voulons pas d’une issue douloureuse.

Les enseignants chercheurs et les indemnités des parlementaires :

La goutte qui a débordé le vase et défrayé la chronique pendant lors de la nuit du destin du mois du ramadhan écoulé est cette hausse disproportionnée de l’indemnité de base des parlementaires qui explosent de 13 à 30 millions de centimes sans oublier les autres indemnités et primes. Quoique ce salaire soit même insuffisant pour les réels parlementaires qui disposent de permanences dans leur circonscription en jouant leur rôle d’élus à fond, ce qui est blessant est ce qui est permis aux parlementaires l’est proscrit pour d’autres.

Les nombreux universitaires de ce pays en ont pris un sale vertige en comparaison avec leurs misérables salaires. Leurs diplômes leur apparaissent comme simples papiers qui ne servent à rien. Le moral en a pris un coup de massue. On n’est pas mieux servi que par soi-même diront les intéressés qui ont adopté promptement à mains levées transformant l’ordonnance en loi.

Les enseignants chercheurs et le régime indemnitaire :

Est-ce que le régime indemnitaire sera conséquent pour corriger une injustice qui n’a que trop duré : c’est la question fondamentale que se posent les enseignants chercheurs depuis la promulgation de leur statut particulier au début du mois de mai 2008.

Une commission mixte Ministère-syndicats du secteur a vu le jour au mois de juin 2008 dont la presse en a fait état et tous les enseignants chercheurs attendent avec impatience les résultats de ses travaux.

Par contre, le ministère n’est pas resté les bras croisés cet été et a bougé dans tous les sens. Le ministère a effectivement déposé un projet de décret sur l’indemnité du tutorat annoncé par le ministre lors de la dernière réunion des chefs d’établissements universitaires à Alger.

Le ministère a toujours affirmé que les augmentions salariales dépasseront les espérances des enseignants chercheurs. Tout le monde connaît la déception de ses derniers lors de la découverte du pot aux roses. Leurs attentes seront-elles récompensées par une valorisation conséquence ? That is the question.

Quelle date d’effet pour l’application du régime indemnitaire ?

Durant le dernier conseil des ministres du 31 août 2008, le projet de la loi des finances 2009 a été examiné et adopté où il est question des régimes indemnitaires devant découler des statuts particuliers des différents corps de la fonction publique. Aucun chiffre sur la somme allouée aux régimes indemnitaires n’a été spécifiquement révélé. Le texte est passé dans les 2 chambres parlementaires mais on ne connaît pas encore le chiffre. Certains écrits de presse ont spéculé sur le 1er janvier 2009 comme la date d’effet d’application du régime indemnitaire.

D’autre part, lorsqu’on consulte l’instruction du chef du gouvernement n°07 du 29 décembre 2007 relative à la mise en oeuvre du nouveau système de classification et de rémunération des fonctionnaires, il en est différemment. Voilà ce qu’on lit au point 5.3 sur les modalités de calcul des primes et indemnités : «Il y a lieu de préciser que les régimes indemnitaires afférents aux différents corps de fonctionnaires feront l'objet d'une harmonisation, après l'adoption de l'ensemble des statuts particuliers. Aussi, à titre transitoire, les différentes primes et indemnités continueront à être servies selon le mode de calcul et l'assiette prévus par la réglementation en vigueur au 31 décembre 2007, à l'exception de l'ICR de l'ISS ou de toute autre indemnité de même nature».

Ce point confirme de manière claire, nette et précise que les indemnités et les primes perçues par les fonctionnaires depuis le 1er janvier 2008 sont à ce titre que transitoires et la date d’effet du régime indemnitaire ne peut être que la date butoir des statuts particuliers.

La valeur du point indiciaire comme futur baromètre des salaires :

L’article 8 de la nouvelle grille des salaires des fonctionnaires s’annonce comme suit : « La valeur du point indiciaire prévue à l’article 5 ci-dessus est fixée à quarante-cinq (45) DA. Les critères qui déterminent son évolution sont fixés par décret ».

Ce second alinéa est on ne peut plus explicite.

Les pouvoirs publics, l’ensemble des acteurs économiques, politiques et sociaux doivent se concentrer davantage sur cet alinéa. Les parlementaires ont aussi un rôle important à jouer en tant que législateurs.

Avant que le décret ne voit le jour, il faut réfléchir dès à présent sur les paramètres modernes qui définiront les prochaines valeurs de ce point indiciaire. Justement le CNES (Conseil National des Enseignants du Supérieur) milite pour une indexation concrète de cette valeur du point indiciaire sur le taux d’inflation comme rapporté par la presse durant sa 3ème université d’été 2008.

NB: cet article est paru dans le quotidien d'Oran (Algérie) du 05 Novembre 2008

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