mercredi 11 juillet 2012

Les enfants de la ville et le reste


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Article paru dans les colonnes du Quotidien d'Oran du Jeudi 12 Juillet 2012 que vous pouvez consulter également sur les liens suivants:
- en format pdf:
http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5170685
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« Donc si tu connais mon père, c'est que tu sais qui je suis. Donc, tu ne me reconnais pas comme un oueld elbled sciemment. Tu es donc le juge qui décide celui qui l'est de celui qui ne l'est pas. La prochaine fois, mets un tablier de procureur et porte un marteau en bois. En ce qui me concerne, c'est la valeur des hommes qui m'intéresse, oueld elbled ou pas. Allez, je te laisse à ta représentation archaïque du monde. »
 
Ces mots émanent d’un échange sur Facebook entre un ami et son interlocuteur qui lui dénigre le droit de parler parce qu’il n’est pas un oueld elbled !

Justement, cette notion a dépassé la citoyenneté dans son sens le plus profond. Pour aller dans la facilité, on colle tous les défauts à ceux venant de l’extérieur et qui ont envahit la ville selon certains, d’après leurs propos gratuits, comme si ces derniers ne sont que des citoyens de seconde zone. Heureusement que ces mots d’un autre âge ne sortent de la bouche que de certains qu’on pourrait qualifier d’extrémistes. Exactement comme en Europe où l’extrême droite appose tous leurs malheurs aux émigrés dont on n’a plus besoin aujourd’hui après avoir occupé tous les travaux durs et ingrats.

Une société moderne doit être régie par les mêmes droits et devoirs de ses membres. S’ils appliquent et respectent ces notions, ils acquièrent le statut de citoyens qu’ils viennent de l’extérieur, qu’ils soient nés dans la campagne ou natifs de la ville. La construction d’une ville moderne, d’un pays commence par ces fondements de base. Qu’ils soient mis en quarantaine ou traduits aux mains de la justice s’ils faillent à ces principes. Un oueld elbled n’est pas exempt de tous reproches, il peut tout aussi pêcher, frauder, dilapider des biens publics ou voler qu’une personne venir d'ailleurs.
Ce discours dans le pays, des ouled elbled à tous prix, ressemble étrangement à celui de l’extrême droite en France où tout est la faute des étrangers ou des émigrés malgré qu’ils travaillent en suant de leur front et en payant leurs impôts. C’est aussi celui des colons qui excluaient naguère les algériens dans leur quartier indigène appelé également souvent sous la dénomination péjorative de village nègre et leur école indigène, loin des centres-villes et des quartiers européens non sans les avoir exploités jusqu’à la moelle épinière.
C’est la même politique que certains algériens veulent appliquer sournoisement à leurs propres concitoyens. Ils veulent perpétuer la supériorité qui existait au temps de la domination coloniale. Pourtant, ici en Algérie, il s’agit des mêmes enfants du pays qui ont tous souffert du colonialisme et de ses méfaits, les ruraux beaucoup plus que les citadins. C’est une vérité que personne ne peut la nier.

Il ne faut pas oublier que le premier exode rural est dû à la sauvagerie de la colonisation qui a vu le déplacement de millions de personnes durant la dernière guerre de libération et bien avant lors des différentes insurrections qu'à connues le pays depuis l'invasion française. Ajoutant à cela, la période post-indépendance où un nombre impressionnant d’algériens voulaient goûter aux bienfaits de l’indépendance. La ville était d’ailleurs plus attractive sur tous les plans par rapport à la paysannerie, encouragés en cela par le départ massif des colons de la ville beaucoup plus nombreux que ceux de la campagne.

Leurs maisons sont allées tout droit aux algériens des quartiers arabes tandis que ceux de la campagne ne pouvaient pas demeurer en reste du pays, dans le dénuement. Ce qui est d’ailleurs tout à fait légitime où le développement rural mettait beaucoup plus de temps à se mettre en place. Il n’y a pas de sous-algériens et de super-algériens, il y a des algériens tout court animés par la même volonté d’aspirer à une meilleure qualité de la vie, à un meilleur avenir dans une Algérie libre et indépendante.

Rebattons une société où seules la compétence, l’honnêteté et l’intégrité doivent être les seules critères d’accès aux responsabilités. Si ces références se rassemblent sur des ouled elbled, tant mieux encore pour les plus déterminés. Mais ne mettons pas la charrue avant les bœufs en inversant la logique des choses.

Donc cette discrimination inquiétante entre le monde rural et le monde citadin n’est pas faite pour souder les liens des algériens, déjà secoués par d’autres problèmes plus complexes les uns que les autres, au contraire, elle les divise davantage en les poussant à plus d’enfermement sur soi, dû surtout à nos mentalités de sous-développés avec ces esprits rétrogrades qui règnent en maîtres absolus.

Heureusement que dans certaines régions montagneuses où personne ne dit être originaire d’une ville، qu’il sait pertinemment être celles des colons mais par contre, il parle fièrement de sa dechra, il y tient beaucoup à son attachement ancestral. Sincèrement, je les admire, ces gens de la montagne, pour leur conscience collective et leur dévouement à la tradition.

Pourquoi dans d'autres villes, on a presque honte de parler de ses origines peut-être qu’on se sent être « civilisé » beaucoup plus avant tout le monde par les colons. Ils ignorent qu’ils sont venus de tel ou tel douar aux alentours des villes coloniales qui n’existent que depuis les années 1840. Ils disent qu’ils sont nés au sein de la ville mais n’évoquent point leurs origines parentales comme s’ils portaient la gale.

On doit être toujours dignes de ses origines, fiers de ses parents, qu’on ne peut choisir, qu’ils nous ont mis dans ce monde, qu’on soit né en montagne, dans une plaine, dans un douar, dans une dechra ou dans la ville. L’important ce n'est pas le lieu de naissance mais de recevoir l’éducation nécessaire pour respecter son entourage et être utile par des actes concrets et être pleinement disponible à la société en général,  à sa ville ou à son douar en particulier et au lieu où il a choisi d’y vivre.

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2 commentaires:

  1. Une analyse proactive qui chaud au cœur et qui attire notre attention sur le danger de la division qui nous guette ( voir le drame de la Libye). Le néo concept "oueld elbled ou pas" n'est que le fruit d'un racisme tribal qui ne dit pas son nom.Voir il reflète la culpabilité triviale de certains qui jalouse le fruit du travail d'autrui. Heureusement que le sentiment de notre attachement à notre Algérianité dans toute sa diversité protégera notre pays des nostalgiques d'un ancien temps qu'on a chassé il y plus de 50 ans.

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  2. شعار فرق تسد رفعه المستدمر الفرنسي وغرسه في بعض أبناء هذا الوطن...لا فرق بين عربي وأعجمي إلا بالتقوى...أي أن المعيار الحقيقي بين الصالح والطالح هو الإيمان والعمل الصالح والعلم النافع...أما شعار عنصرية أولاد البلاد فقد ولى وأعرف بعض هؤلاء الذين دمروا بلدانهم ومناطقهم مقابل مصالحهم الخاصة المادية ...

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