Il y
a quelques jours, une info presque banale, défilant au bas de l’écran d’une
chaîne de télévision privée, avait fortement attiré mon attention. En effet, comme
le rapporte cette étrange nouvelle, des habitants d’une ville interpellaient le
nouveau wali qui venait d’être installé fraîchement dans ses fonctions.
La
logique signifie qu’on le sollicite pour intervenir urgemment dans les affaires
publiques de leur cité afin d’améliorer l'amer quotidien, à commencer tout
d’abord par l’environnement de la ville, enfin de toutes les daïrates de la
wilaya qui croulent inlassablement sous les ordures. Partout où vous allez, un
spectacle de consternation vous agresse et vous laisse complètement dégoûté de
ce qu’on fait tous les jours de nos villes et de notre pays, le rendant ainsi similaire
d'un dépotoir à ciel ouvert.
Au
marché des fruits et légumes et aux alentours, les commerçants vendent leur
marchandises, comme si de rien n’était, insensibles aux senteurs nauséabondes
des immondices qui regorgent tant qu’à l’intérieur qu’à l’extérieur et sous le
regard permanent et incroyable des autorités dont les bureaux ne sont pourtant qu’à
quelques pas de ces lieux répugnants comme s’ils ne sont pas du tout concernés,
je rajouterais comme s’ils étaient aveugles ou occupés par d'autres affaires plus
porteuses ou impuissants face à la catastrophe ambiante. Il est vrai qu'en face
d'eux, rien ne bouge. Presque tout le monde ferme les yeux mis à part quelques
voies qui restent encore sensibles et qui luttent à contre-courant. La
mobilisation à travers la société civile étale encore tous ses défauts et peine
à démarrer. De temps à autre, on constate ici et là des campagnes sporadiques
mais c'est très insuffisant pour espérer à nettoyer le pays. Ce ne sont pour la
plupart que des coups de gueule qui nécessitent énormément d'éducation de
l'école jusqu'aux adultes.
Il
fallait les voir, ces postulants à la mairie lors des campagnes électorales, qui
ne daignaient pas de courir dans tous les sens en cajolant des citoyens par là,
en distribuant à tout-va des bises de l’autre joue et en miroitant le paradis à
leurs partisans. Tout cela dans l'intention d'acquérir leurs faveurs lors du
scrutin. Peu importe la manière, l’essentiel est de caresser la carrière
imaginée dans leurs songes. Une fois l’objectif atteint et après les premiers
jours de faste, ils changent complètement de face et de veste mettant aux calendes
grecs toutes leurs antécédentes promesses.
Ils
se sont maintenant métamorphosés en hautains et arrogants individus à la
mémoire courte qui sont mis sous l'aile
de hauts responsables protecteurs. Ils se voient plus grands dans leurs
nouveaux costumes, en mijotant un autre parcours à la hauteur de leurs récentes
ambitions. Pourquoi pas député ou sénateur tant qu'on y est en pleine
déconfiture ? Puisque tous les mirages sont permis. Qui sait ? En gravitant les
échelons, une retraite et des vacances dorés leur semblent en permanence
assurés.
Leurs anciens sympathisants paressent maintenant très petits, trop
minuscules, trop infimes pour s'occuper de leurs problèmes. Ils ne regardent
plus vers le bas, ils ne scrutent que le haut de l'échelle avant que la
dernière marche ne risque de s'obstruer. Peut-être aussi que ces
"élus" ont été mal élus et qui ont eu besoin d'un coup de pousse de
là-haut pour rafler la mise. Sinon, comment expliquer qu'ils obéissent au doigt
et à l'œil des autorités désignés plutôt que d'être à l'écoute des citoyens qui
les ont en principe portés à la magistrature de la ville. On ne peut que
comprendre qu'il ne s'agit là juste de l'obtention d'un alibi, d'un chèque à
blanc pour changer rapidement de camp et suivre la stratégie sournoise des
vrais décideurs de la ville. Lorsque cela va mal, on porte alors allègrement le
chapeau aux électeurs d'avoir mal choisi. Le faux coupable moral est vite
indiqué tandis l'invisible manipule tranquillement derrière les rideaux comme
bon lui semble au profit de ses stricts intérêts.
La
place, juste en face de la mairie et sous les fenêtres du premier magistrat de
la ville, offre une image indigne d’une ville jusqu’à ce que des autochtones soient
nostalgiques du passé colonial de la ville. C’est malheureux d’arriver à ce
constat mais c’est ainsi le résultat à l'emporte-pièce de plusieurs décennies
de gestion. La mairie, c'est la première institution auquel est confronté le
citoyen. C'est ici que l'on construit une opinion sur le pays. C'est la cellule
mère, si elle ne marche pas bien, et c'est le cas en général, c'est tout le
pays qui paie la lourde facture bureaucratique et corruptible.
Je
ne suis pas ici pour fustiger du doigt la ville incriminée dans ce papier car
l’ineptie est la même partout. Il ne s’agit pas d’un fait particulier mais la
tendance est chronique.
Est-ce
que ce groupe a interpellé le wali sur le chômage dont souffre une grande
partie de la population ? Non !
Est-ce
que ces gens ont demandé à ce que les routes de leurs villes soient bitumées
pour en finir avec la poussière dont la population endure depuis des années ?
Que non !
Est-ce
ces personnes ont sollicité le Wali d'inciter la mairie à embellir leur ville
dont le centre-ville ne vous incite guère à une simple ballade à pieds ?
Aucunement !
Est-ce
que cet échantillon, dont rien ne manque apparemment, ont réclamé des quotas de
logements en plus selon des normes citadines puisque la ville ne s'arrête pas
d'enfler ? Jamais !
Je
pourrais ainsi poser de tas de questions sur l'école et ses insuffisances
flagrantes, sur les défaillances de la
santé, sur la bureaucratie qui continue à gangrener les services publics, sur
l'eau imbuvable des robinets, sur les problèmes des agriculteurs et de
l'industrie de ce qu'il en reste actuellement, …
Parmi
toutes ces questions, aucune n'a effleuré l'esprit de ces messieurs sauf celui d'appeler le wali à
venir en aide à leur club de foot qui souffre d'une crise financière pour avoir
dépassé les limites de leurs moyens. Ils ne disent pas comment alléger les
charges du club en comptant inévitablement sur le budget de la wilaya afin
d'honorer mensuellement des salaires à 100 briques par joueur sans négliger les
primes de matchs du week-end. Sans se contenter de ces détournements à la
limite de la légalité et au lieu de s'occuper d'autres priorités, certaines
autorités, pour dissimiler leur mauvaise gestion, sollicitent des entrepreneurs
véreux à soutenir financièrement le club, soit disant le porte-drapeau et en
même temps le cache-misère de la ville, en contrepartie de l'octroi en gré à
gré de juteux marchés publics en gonflant comme il se doit les factures au
détriment de la loi, de la transparence et de l'Algérie. C'est toujours
l'argent public et les citoyens qui trinquent à la fin.
Un
club, doit être géré d'abord comme une entreprise avec des bénéfices et des
charges et avec un actif positif à présenter en fin de saison et des résultats
probants selon des bilans moral et financier solides et dûment certifiés. C'est
à ses dirigeants et à ses supporteurs de trouver les bonnes solutions et non
aux autorités locales de payer les pots cassés en jouant le pompier à chaque
pénurie. Et c'est toujours le côté financier qui doit primer sur celui du
sportif. A-t-on vu un jour le Barça, le Réal de Madrid ou le PSG appeler les préfets
respectifs de leurs régions ou leurs maires pour subvenir aux besoins de leurs
clubs ? Dans une démocratie, chaque sou doit être dépensé selon une utilité
exprimée et parfaitement prouvée. Et c'est ce qui nous manque le plus aujourd'hui
chez nous.
Si
les autorités doivent intervenir, elles doivent le faire en amont dans le cadre
de la politique globale du sport en général, de tous les sports sans aucune faveur ni exception, ni dérogation. Le
sport, c'est d'abord une affaire de santé publique saine et non l'utiliser en
particulier le foot comme opium du
peuple pour dissimuler toutes nos tares en poursuivant notre chemin contre le
mur, vers l'inconnu.
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