jeudi 31 décembre 2009

Sauve qui peut mon fils, barre-toi vite de ce pays !


Aligné à gauche

========================

Article paru le Jeudi 31 Décembre 2009 sur le Quotidien d'Oran:

OU en PDF:

=========================



Sauve qui peut mon fils, barre-toi vite de ce pays !

Par MOHAMMED BEGHDAD (*)

=================

« Mon cher fils, tu es sur le point de terminer l'université (...). C'est pour cela que je te parle avec amertume, pensant à l'avenir qui t'attend. Ce pays, ton pays, n'est plus un endroit où il est possible de vivre avec fierté (...). Dans ce pays, si tout va bien, tu commenceras par gagner un dixième du salaire de n'importe quel porte-serviettes, le centième de ce que gagne une starlette de la télévision. Pars. Prends le chemin de l'étranger, choisis d'aller là où la loyauté, le respect et la reconnaissance du mérite et des résultats ont encore de la valeur. ».

AU SECOURS PAPA !

Ces mots, troublants, désespérants et pleins d'angoisses, émanent-ils d'un père à son fils, ressortissants d'un pays du tiers-monde, lui prônant de fuir le pays en proie à de continuelles difficultés d'un pays sous-développé ? Non.

Ce message est-il adressé par un ascendant à son rejeton, habitants une de nos localités Algériennes ? Exceptionnellement cette fois-ci: que Non !

Eh bien ce sont là, quelques passages de la lettre qu'a écrite Pier Luigi Celli, directeur général de la LUISS (une grande université privée de Rome spécialisée des études sociales) et néanmoins ex-directeur de la RAI (télévision publique italienne) à son fils qui vient juste de terminer ses études supérieures dans le pays. Cette lettre ouverte, dont le titre est «Mon fils, quittes ce pays ! », a suscité un véritable cri de détresse au sein de la communauté scientifique. Elle a été publiée le 30 Novembre dernier dans les colonnes du célèbre quotidien romain « la Repubblica » très connu des initiés du pays transalpin. Une sensation de taille venant de la cité romaine, nous surprend à plus d'un titre surtout émanant de l'un des principaux leaders de la zone Euro en compagnie de l'Allemagne et la France.

UN PAYS QUI NE S'OCCUPE PAS DE SES JEUNES EST UN PAYS EN DÉCLIN

Contacté par le correspond à Rome du journal parisien « Le Monde», M. Celli explique qu' «Aujourd'hui, en Italie, en raison de la crise, une génération entière de jeunes diplômés va être sacrifiée. Un pays qui ne s'occupe pas de ses jeunes est un pays en déclin. Les recommandations, les combines, les pistons sont un folklore dont nous devons nous débarrasser.». Et vlan ! Des mots crus, qui nous sont familiers, sont lancés en pleine figure dans la cité romaine. Cet ancien dirigeant de grandes entreprises fait son mea culpa, signe d'une profonde déception, en reconnaissant lui-même sa part de responsabilité en tant que directeur de son université grandie sous l'aile de la « Confindustria », l'équivalent italien du Medef (Mouvement des entreprises de France). «Une personne seule ne peut pas tout changer.», ajoute-t-il l'air impuissant.

Par ailleurs, cette missive a suscité une quantité non négligeable de commentaires en ligne sur le site du journal de la capitale italienne provenant d'intervenants dont la plupart approuvaient la démarche de M. Celli en arguant, au passage, la faute au « système ». Encore, un langage qui nous est particulier.

C'est donc un appel à une « Harga » typique à l'italienne mais sans visa. Pas un aller sans détour en larguant les papiers à la mer mais un aller avec un possible retour au bercail. Une nouvelle fois, on se croirait dans les pays sudistes. Il n'y a que la façon qui diffère.

QUAND LA DEMANDE DÉPASSE L'OFFRE ET VICE-VERSA

C'est incroyable mais vrai. Le pays de Galilée, Fermi et Léonard de Vinci, l'un des plus grands industrialisés du monde, qui contribue avec un taux à hauteur de 4% du PIB mondial et membre du Groupe des 8 (G-8), est esquivé par ses diplômés comme dans une région tiers-mondiste !

Comparativement à notre pays, l'Italie est saturée de chercheurs mais dont la moyenne d'âge dépasse le seuil requis. La sénilité ronge le pays. C'est donc un problème de renouvellement de générations qui se pose de manière accrue. La production élevée de chercheurs de haut niveau y est aussi pour quelque chose.

Si l'Italie avait besoin de chercheurs autant que l'Algérie, il y a longtemps qu'elle aurait changé de cap et de politique. Dans la péninsule italienne, il semble que c'est la demande qui dépasse l'offre. Cette situation peut expliquer les bas salaires proposés en début de carrière pour les jeunes chercheurs. Tandis qu'en Algérie, non seulement, l'offre existe mais avec des salaires et des conditions dérisoires très en deçà de ceux offerts en Europe ou en Amérique du nord. Les deux cas mènent au même effet mais les causes sont complètement distinctes. L'Italie se retrouve avec un plein de vieux chercheurs chevronnés, le notre est à sec avec un manque flagrant de chercheurs de qualité.

DÉPENSER SANS COMPTER ET CUEILLIR SANS LIMITE

Le peu d'enseignants chercheurs algériens qui sont restés au pays font de la recherche sans aucune âme à cause des innombrables problèmes socioprofessionnels. L'état va doubler le budget de la recherche pour le prochain plan quinquennal (2010-2014) par rapport à l'enveloppe financière allouée au programme 2005-2009 comme le souligne le chef de l'état lors de l'ouverture de la présente année universitaire. Il est à craindre que cet argent frais va être encore une fois jeté par les fenêtres, car les acteurs que sont les enseignants chercheurs sont sous évalués, non seulement par rapport à leurs collègues du nord mais relativement à leurs voisins immédiats marocains et tunisiens.

Si les joueurs, l'encadrement technique et administratif de l'équipe nationale de football n'avaient pas été récompensés à leur juste valeur à coup de milliards en plus des moyens de Pros mis à leur disposition, jamais nous aurions rêvé atteindre les résultats escomptés. Il faut se poser des questions sur les différences astronomiques entre les indemnités d'un médecin de l'équipe nationale et celles de son pauvre confrère de la santé publique exerçant dans un coin reculé du pays sans aucun avantage particulier et dans les conditions les plus pénibles. L'état a dépensé sans compter pour l'équipe nationale et il a récolté de beaux fruits mûrs en abondance et sans les peser. Un gracieux investissement mène toujours à de grosses perspectives.

LE COPIER-COLLER TECHNOLOGIQUE

Chaque année, comme le rapporte le journal le monde dans la même édition, selon l'italien Sergio Nava auteur d'un livre sur la question et intitulé: « La fuite des talents », ce sont 110 000 (Cent dix milles !) diplômés d'université qui quittent chaque année l'Italie. Un milliard d'euros est ainsi dépensé par an pour la formation des exilés scientifiques.

Chez nous, aucun chiffre officiel n'est avancé sur la question de ce qu'on appelle impudiquement la fuite des cerveaux. En Italie, le diagnostic est sanglant pour ce phénomène qui est qualifié de véritable exode dont les causes nous rappellent celles de notre pays: bas salaires, gérontocratie, hiérarchies immobiles, faible mobilité sociale, système universitaire souvent gangrené par les passe-droits, etc...

Plus grave et inquiétant, c'est lorsque le piston bat son plein chez nos voisins nord- méditerranéens. En effet, une enquête italienne de cette année révèle que la moitié des professeurs de la faculté de médecine de l'université sicilienne de Messine ont un lien de parenté avec le restant de leurs collègues. Une parfaite histoire de familles qui possèdent désormais beaucoup de cousins par alliance en Algérie. Du copié-collé technologique translaté avec une réussite admirable du Sud vers le Nord.

UNE SEMENCE RÉCOLTÉE AILLEURS

Toujours selon le quotidien «Le Monde», le professeur Marc Lazar de Sciences Po de Paris et spécialiste de l'Italie mentionne que» l'Italie est au bord d'un clash de générations». «La frustration de la jeunesse est immense, explique-t-il, et ne trouve aucun débouché. L'Italie a manqué son rendez-vous avec la société de la connaissance alors que la France, l'Allemagne ou l'Angleterre en ont fait une question centrale. Toutefois, des îlots d'excellence demeurent et malgré ces défauts, ce système archaïque produit des talents extraordinaires qui, malheureusement, vont s'exprimer ailleurs.».

A titre d'exemple, le CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique) Français a recruté, en 2007, 30 % de candidats italiens. Une vraie aubaine pour la recherche de l'hexagone comme elle l'est pour de nombreux compatriotes scientifiques. Ces enrôlements me rappellent le discours du président de la République lors de cette fameuse cérémonie d'ouverture du 12 Novembre dernier à Sétif. Il a annoncé, ce jour, devant un parterre d'enseignants chercheurs médusés : «tout ce que nous semons, est récolté par les autres.». Une phrase lourde de sens dont les conséquences ont été et le sont toujours graves et menaçants pour l'avenir du pays. Une véritable révolution s'impose pour mettre à l'abri d'abord le pays en conservant ses meilleurs atouts scientifiques.

Pour garder sa place au sein de l'Europe et de l'industrie mondiale, le gouvernement italien va présenter une réforme de l'université, qui sera discutée en février 2010 au Sénat. Cette réforme tiendra compte des critiques sur la fuite des compétences et sur le choix de recrutement des jeunes chercheurs. Le projet de loi prévoit que les futurs chercheurs» seront choisis selon des procédures publiques».

Juste après la lettre ouverte citée plus haut, une quinzaine de jeunes diplômés transalpins, travaillant sous d'autres cieux avec un attrayant salaire au départ, saisissaient, le 3 décembre dernier, le vieux président de la république italienne, Giorgio Napolitano pour accuser l'Italie d'être »le pays le plus immobile d'Europe». La réponse du président est venue rapidement le 22 Décembre passé en écrivant aux révoltés : « Je comprends vos raisons, Mais j'espère que dans un futur assez proche les conditions seront réunies pour votre retour.».

C'EST POUR QUAND LA FIN DE LA FUITE DES CERVEAUX ?

Quant à la réalité de notre pays, je vous cite un passage du discours présidentiel dans la capitale des hauts plateaux où le Président Abdelaziz Bouteflika annonçait solennellement que: « L'Etat poursuivra son effort en matière de promotion de l'enseignement supérieur et de développement des ressources humaines dans les domaines de la recherche scientifique sans occulter la nécessité de réunir tous les moyens indispensables à l'amélioration de la qualité et de l'encadrement, et de créer un climat socioprofessionnel aux enseignants-chercheurs qui leur permet d'accomplir leur mission dans de bonnes conditions. Il convient aussi d'adopter des systèmes compensatoires plus attractifs et plus incitatifs dans le but de renforcer les capacités scientifiques et techniques nationales et d'éviter le phénomène de la fuite des cerveaux et des compétences.».

Les enseignants-chercheurs attendent avec une grande impatience la traduction de ce discours politique et sa concrétisation sur le terrain de la réalité. Est-ce que ce discours sera un prélude annonciateur d'un régime indemnitaire conséquent et des conditions de travail socioprofessionnelles attractives faisant bouger les « Einstein » Algériens de l'ère 2010 ? Surtout après cette fameuse grille nationale des salaires, décevante sur tous les plans et où l'échelle des valeurs n'a plus aucune valeur.

Après que la grille nationale des salaires ait été très décevante sur tous les plans et où l'échelle des valeurs n'a aucune valeur. Il n'y a que le miracle de la matière grise qui ne tarira jamais contrairement à la matière noire, symbole des hydrocarbures, qui s'amenuise par malheur d'année en année. A quand le réveil salutaire tant proclamé ? La balle est toujours dans le camp des pouvoirs publics.

(*) Universitaire

et syndicaliste du CNES.

Références :

-http://www.repubblica.it/2009/11/sezioni/scuola_e_universita/servizi/celli-lettera/celli-lettera/celli-lettera.html

-http://www.lemonde.fr/europe/article/2009/12/24/l-italie-voit-un-signe-de-declin-dans-l-expatriation-de-ses-jeunes-diplomes_1284583_3214.html#xtor= RSS-3208


===============

vendredi 25 décembre 2009

Les fonctionnaires et la Zakat.

==============================================

Article paru dans le quotidien d'Oran du 24 Décembre 2009 sous le lien suivant:

==============================================


En cette nouvelle année Hégirienne 1431 et le 10 de ce premier mois de Moharam, jour de l’Achoura, tous les regards sont braqués vers deux mondes extrêmes. Celui des nantis et celui des démunis.

Pour cette année, les plus fortunés concernés par l’obligation de céder la Zakat doivent détenir l’équivalent d’au moins la somme de 229500 DA (appelée nissab), soit la modique somme d’environ 23 millions de centimes qui doit être capitalisée au terme d’au moins une année le jour de cette pieuse journée. Rien que ça !

LE FONCTIONNAIRE, UN PRÉTENDANT A LA ZAKAT ?

Pour le fonctionnaire que je suis, je considère cette somme comme un réel magot qu’il est très difficile voire impossible de l’économiser durant des lustres par les temps qui courent avec la cherté de la vie aidant, surtout pour ceux qui ont à la charge de nombreuses bouches à nourrir.

Par expérience, chacun n’ignore pas que la paye du fonctionnaire s’évapore en buée durant les 10 premiers jours. Quant au restant des jours, la ceinture est là pour faire son préjudiciable effet. Et c’est la bouffe qui crève salement le budget de la famille du fonctionnaire. Il perpétue à rêver toute l’année, dans son assiette, de la viande rouge, du poisson, etc.. Avec la mandarine à 150 DA le kilogramme, c’est rare qu’il se permette le luxe d’acheter des fruits qui sont nécessaires à une nutrition équilibrée. Par ricochet, La santé publique en prend un sérieux coup.

Le reste de la rémunération est englouti dans le loyer, les charges énergétiques comme l’électricité et le gaz, l’habillement ou encore les imprévus de la rentrée scolaire et les fêtes des deux Aïds.

Subvenir aux besoins des membres de sa famille est un vrai calvaire lorsqu’on sait que les allocations familiales sont dérisoires. Actuellement elles sont de 800 DA pour la femme au foyer et 300 DA par enfant, qui dit mieux ! Pour ceux qui ont des enfants étudiants à l’université, les dépenses dépendent de l’éloignement de l’établissement. Cela peut vous coûter la tête aux yeux. N’osez pas me dire que la bourse va alléger les dépenses des malheureux parents.

Comme vous l’avez constaté, il s’agit là d’une famille modèle d’un fonctionnaire qui est très chanceux par rapport à la plupart de ses collègues qui vivent dans des conditions beaucoup plus défavorables avec des adultes chômeurs à prendre en charge ou encore des ascendants sans ressources. D’autres fonctionnaires se sont regroupés en couple mais la candidature à l’octroi de la Zakat reste encore une fiction.

AUMÔNE OU ZAKAT ?

A l’appel de l’imam de la mosquée, j’ai pu assister le dernier Week-End à la collecte de la Zakat dans une mosquée. J’ai remarqué les fidèles ne léguer pour leur majorité que des pièces de monnaie. Ce n’est plus de la Zakat mais juste une quête de l’aumône. Être postulant à la donation de la Zakat suppose céder au minimum 5537,50 DA mais sans doute pas les petites pièces ramassées dans les chéchias des petits adeptes.

NIÇAB: NON, IRG: SI

Paradoxalement, par la somme fixée du nissab de la Zakat, les autorités du pays reconnaissent implicitement l’utopie des fonctionnaires et des travailleurs à pouvoir contribuer au compte de la Zakat mais le même gouvernement continue d’imposer toujours les mêmes allant jusqu’à diminuer 25% de leurs salaires. Une contradiction flagrante dans un état dont les textes sont inspirés de la loi musulmane ! Ce sont les seuls que l’état leur soutire l’IRG (Impôt sur le Revenu Global) à la source alors que ceux qui vivent dans l’informel échappent impunément à tout contrôle fiscal.

L’INFLATION DU « LOUBIA BLECH »

Demandez autour de vous parmi les travailleurs qui ont eu le culot de contracter le crédit voiture qui a laminé leurs dépenses. En conséquences, ils ont subi une véritable diète pendant toute la durée du crédit qui peut aller jusqu’à 5 ans au maximum. Une vraie traversée du désert. Heureusement que pour les autres, le gouvernement a annulé cette disposition. Comme argument fiable, les sources proches du gouvernement ont invoqué la ruine des familles prises dans l’engrenage du crédit au détriment du bien-être de leur famille. Par cette mesure, le gouvernement reconnaît, encore une fois, implicitement l’incapacité des fonctionnaires à épargner ne serait-ce qu’une infime partie de leurs salaires. Les traitements leur permettent juste de survivre.

C’est pour cette raison que les fonctionnaires sont accrochés inlassablement à la promulgation du régime indemnitaire qui va être à coup sûr abîmé par le taux de l’inflation qui ne cesse de grimper. Il a été évalué ces jours-ci à 5.7% par l’Office National des Statistiques, taux qui était estimé à 4.3% l’année dernière à la même date. On peut imaginer ce taux dans une année puisque la tendance est à la hausse. Même le plat populaire de « Loubia blech » a son prix, quant à honorer la Zakat, il n’y a plus rien à espérer.

LE PAUVRE FONCTIONNAIRE HORS CATÉGORIE

Sincèrement depuis que j’ai acquis la fonction de fonctionnaire avec un grade se situant sur l’une des 7 subdivisions de la hors catégorie comme tous mes collègues enseignants chercheurs, je n’ai jamais pu honorer ce pilier fondamental de l’Islam. Tout simplement parce que je ne réunis par les conditions requises. Si, j’ai pu quand même accomplir cette tâche religieuse mais en tant qu’étudiant dans le début des années 80 en France ! Mais jamais depuis que j’exerce la fonction d’enseignant, en tous les cas depuis que j’ai eu accès à la vie professionnelle en tant que Docteur en physique. Je suis sûr et certain que de nombreux collègues sont en train de hocher leur tête par l’affirmative à la lecture de cet article.

Si les fonctionnaires classés dans la plus haute hiérarchie de la fonction publique sont exclus de cette tâche, que dire alors du 1 million six cents milles fonctionnaires qui grossissent chaque année le lot des nécessiteux et sont donc aptes à la perception de l’aumône pour arrondir leurs fins des mois. N’omettons pas les retraités de la fonction publique qui se comptent par centaines de milliers et qui ornent le lot des impécunieux.

SÉSAME SÉNAT: OUVRES-TOI !

Si l’on ôte les chômeurs, les travailleurs du secteur industriel public ou privé à part peut-être ceux des cadres de Sonatrach ou des grandes sociétés ou des institutions bancaires, les donateurs de la Zakat se comptent parmi les doigts de la main de cette frange.

Par ailleurs, nos chers actuels députés et nos futurs sénateurs qui attendent impatiemment la date du 29 Décembre comme une délivrance qui va la faire envoler vers l’ascension des cieux de l’opulence. En dépit des menaces de sanctions de leurs impuissants partis, ils ne voudront pas lâcher le gros morceau à quelques centimètres de l’arrivée. C’est tout leur avenir financier qui est en jeu. Dans les contrées, ils se battent à coup de millions pour accéder à ce sésame non pas pour espérer un jour honorer la dette divine mais pour accéder tout simplement au paradis du cercle restreint des privilégiés. J’ai bien peur que l’argent sera encore une fois le nerf de la guerre pour arracher son siège au palais Zighout Youcef ! Un investissement pour les plus lotis qui va sans aucun doute rapporter gros, autant sur le plan financier comme au plan des affaires et des influences. Et c’est malheureusement toujours l’Algérie qui trinque malgré l’engouement de la jeunesse de ce pays symbolisé par l’historique 18 Novembre.

L’ÉPINE DJAMILA

Je pensais que parmi les catégories aptes à octroyer la Zakat figuraient en bonne place les Moudjahidines que je pensais être à l’abri du besoin mais cette inattendue sortie médiatique de notre héroïne Djamila Bouhired m’a laissé perplexe ! Jamais, je ne la croyais éroder par la pauvreté. Les carnets du crédit de la superette du quartier de notre icône révolutionnaire et de son boucher font foi de son infortune. Sa misérable situation, inacceptable pour son rang, m’a permis de réviser complètement mon point de vue sur la question. Impensable sous d’autres cieux ! Si ce n’est pas la maladie qui la ronge, je présume qu’elle n’aurait jamais sollicité qu’on lui en vienne à l’aide. Je conclus que soit tous nos anciens combattants sont tous dans le même cas que notre Djamila Nationale, soit l’on est en face d’une injustice caractérisée comme elle le murmure dans ces lettres qui feront mal à la conscience de tout le peuple. Rien qu’en évoquant le nom de Djamila Bouhired, la chair de poules vous envahit tout le corps. En apprenant qu’elle vit dans des conditions pénibles par rapport à sa stature, j’éprouve une certaine culpabilité et une honte intérieure comme étant je suis l’un des 33 millions de responsables de son sort. Comme elle le dit si bien, n’oublions pas moudjahidines qui ont fait le choix de vivre dans le total anonymat. Je suis heureux qu’il existe encore cette rare qualité, allons donc les chercher même comme une aiguille dans une botte de foin.

ALORS LESQUELS ?

J’allais oublier dans ce papier les agriculteurs, nos fellahs dans le langage du terroir, qui sont dénigrés à longueur d’année comme étant l’une des causes de la spéculation de la hausse vertigineuse de la mercuriale selon les saisons et les périodes Ramadhanesques. Mais par l’effacement de leur dette de l’ordre de 4400 milliards de centimes (soit un peu moins d’un demi milliard de Dollars) me fait changer d’avis. Il reste peut-être à savoir ceux qui n’ont pas été arrosés par ces somptueux crédits qui coûtent trop chers au trésor public et au contribuable. Il fallait oser pour en bénéficier. Les éternels endettés des finances publics savent sentir le bon coup, patienter et profiter de l’opportunité de l’ardoise épongée ! Donc, les fellahs sont éliminés de facto de la Zakat si l’on suit le raisonnement des gestionnaires des finances.

La question n’arrête pas infatigablement de me tarauder l’encéphale. Les responsables concernés sont appelés à établir des statistiques puisque la zakat a l’intention de se transformer en institution gouvernementale. Alors, quelles sont les catégories de personnes qui s’acquittent de la Zakat ? Il ne reste pas grand-chose à cocher dans le calepin à part les marchands de l’informel qui préfèrent se laver les os avec juste 2.5% des sommes engrangées et de persistent à fuir les impôts contrairement aux otages fonctionnaires. Une autre contradiction en sus.


BEGHDAD Mohammed, Universitaire et syndicaliste du CNES.


===========================================