jeudi 31 octobre 2013

Enseignement: Entre la qualité d’hier et la quantité d’aujourd’hui

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Supposons que les coopérants enseignants étrangers, qui particulièrement européens exerçaient dans le pays au cours des années 70, revenaient subitement sur leurs traces d’hier pour reprendre leur métier après au moins 40 années d’absence.

Que penseraient-ils alors du niveau actuel de nos lycéens et de nos étudiants notamment par rapport à l’ancien temps ou comparativement aux étudiants des universités européennes d’aujourd’hui ? Quoique les moyens matériels d’hier étaient totalement dérisoires. En tous les cas, je ne souhaiterais pas être en leur compagnie lorsqu’ils découvriront le traumatisme éducatif que nous subissons. Je me sentirais certainement tout minuscule et humilié, non pas par complexe d’infériorité mais de ce qu’on a fait de notre enseignement.

Et pourtant, les étudiants du lendemain de l’indépendance des années 70, n’avaient absolument accès aux livres qu’en salle de bibliothèque universitaire avec seulement 2 ou 3 exemplaires par spécialité pour un nombre dépassant 4 sections d’au moins 200 étudiants chacune, à titre d’exemple à l’université d’Oran. Il fallait tout le temps pister son camarade qui rendait le bouquin recherché pour l’emprunter de nouveau le temps de quelques heures uniquement tel  un trésor précieux. Les documents étaient dans un état d’usage avancé par la force d’être abondamment feuilletés. C’étaient de vraies archives à classer. La plupart des étudiants se contentaient uniquement des cours et des travaux dirigés dispensés lors des séances hebdomadaires. Il n’y avait ni photocopieuse miraculeuse ni documents illimités qui sont diffusés sur le Net avec tous genres de livres, des cours des prestigieuses universités mondialement connus, ou des célèbres lycées, téléchargeables à souhait. De nos jours, je parie qu’il existe au fin fond des étalages de nos bibliothèques universitaires des bouquins empoussiérés qui n’ont jamais été consultés depuis la nuit des temps.

Hier, le stylo marchait à merveille, on écrivait à la main du matin au soir tout en assimilant les cours prodigués. Il ne fallait louper aucun détail car la répétition était bannie. Les questions ridicules étaient presque taboues. Il fallait tourner sept fois sa langue avant de poser une question. On recopiait tout à la main tous les documents fournis par les camarades de classe du simple ancien sujet au moindre exercice de travaux dirigés qui passaient sous les yeux. Il est vrai qu’on était tous entraînés en se servant des punitions d’antan avec l’écriture de 100 fois en autant de fois, par exemple du type : « je ne parle plus en classe ».

Les fameux bordas étaient une denrée très rare. La première chose à visiter lorsqu’on descendait le week-end en ville était de faire le tour des librairies étatiques et privées où on n’avait aucun choix sauf pour les ouvrages soviétiques de couleur rouge des éditions Mir qui garnissaient à satiété les vitrines.  Ils n’avaient rien de pédagogique, rien à voir avec les livres des éditions européennes ou nord-américaines avec ces dessins et représentations à vous couper le souffle mais chers et inabordables pour notre condition de parents à la limite de la pauvreté. C’était une différence entre le jour et la nuit.

Pour le lycéen que j’étais, il fallait user de son temps pour dénicher un ancien sujet du baccalauréat sans son corrigé bien sûr ni les annales qui se trouvent de nos jours à chaque librairie du coin ou ceux publiés dans les journaux. Pour la préparation des examens, on naviguait aveuglément. Il n’y avait ni cours privés, ni de soutien. On se contentait de ce qu’on faisait en classe du jour avec il est vrai des enseignants pleinement dévoués à la noble cause. Il n’y avait ni triche, ni complaisance. La volonté et la motivation y étaient présentes pour vous maintenir dans cet état de constante mobilisation.

L’Algérie venait de sortir du joug du colonialisme et ses enfants avaient soif de l’apprentissage et du savoir. N’est-ce pas qu’une grande majorité des enfants de l’indépendance ont été auréolés de grands diplômes d’enseignants, d’ingénieurs, de médecins et de docteurs universitaires issus de familles rurales et totalement analphabètes ? Toutes les compétences algériennes qui font le bonheur des hôpitaux et des universités à l’étranger ne datent-elles pas pour leur grande majorité de cette période bénie ? N’était-ce pas un miracle cette extraordinaire progression ?  Passer du néant à cette sensationnelle situation en un laps de temps.

Est-ce que les étudiants tardaient à l’époque de reprendre le chemin de l’université que vers la fin d’octobre après avoir avalé le mouton de l’aïd sans qu’ils soient traduits en conseil de discipline pour être expulsés après avoir au moins raté le quart du volume horaire des enseignements semestriels sans que l’on crie au scandale ? Sauf en médecine où l’on dispose des étudiants les plus brillants et disciplinés principalement par la branche qui donne de meilleurs atouts pour l’avenir. 

Est-ce qu’il serait possible pour un enseignant universitaire d’aujourd’hui de noter par un zéro absolu en devoir surveillé un tiers d’une section d’étudiants en physique de première ou de seconde année du cycle des sciences exactes à l’instar de chez Monsieur Bernard Held en physique atomique et nucléaire à l’université d’Oran sans qu’il soit menacé d’être renvoyé ou accusé de blocage des étudiants par l’administration d’aujourd’hui ? Pourtant Monsieur Held ne tolérait jamais qu’un étudiant entre en salle après avoir fermé derrière soi la porte d’entrée de l’amphithéâtre, c’était un silence de mosquée lorsque le cours débutait à midi. Le repas était automatiquement sacrifié sans que l’on rouspétait ou revendiquait le changement d’emploi du temps dont on n’avait d’ailleurs aucun droit de regard. Est-ce que les étudiants d’alors qui étaient parmi les plus lumineux de l’époque en mathématiques oseraient-ils de remettre en question leurs notes si ce n’est de se remettre à travailler davantage ? On ne demandait jamais à consulter nos copies sauf si l’enseignant décidait de nous les montrer dans l’objectif de nous dévoiler nos lacunes. Alors oser demander un point supplémentaire à son enseignant était senti comme une véritable hérésie ou un blasphème qui ne passait absolument par votre esprit. Par ailleurs, on ne signait aucune pétition pour la remettre au doyen et partir avant les fêtes de l’aïd sans que l’on nous donnait une autorisation officielle, prétextant un manque de moyens de transport à ne rien avoir avec ceux des années 70 à 80 où c’était un parcours du combattant.

Plus les examens se rapprochaient et plus on redoublait d’effort à réviser. On remplaçait le dîner en resto U par une simple omelette ingurgité à la va-vite pour ensuite veiller tard le soir grâce à une tasse de café noir et être debout tôt le matin identiquement à un soldat en mission recommandé. Si tu ne travailles pas bien à un devoir surveillé, tu n’as droit à aucun examen de rattrapage ni de système de compensation. C’était le quitte ou double à prendre ou à laisser. On n’arrêtait pas de trembler avant la distribution des sujets le considérant comme étant le plus décisif de son parcours d’études. L’ami Abdelkader Kenniche ne cessait de supplier son camarade Khaled, qui s’assoyait à l’examen sur une table plus basse que lui,  de cesser de vibrer sinon il allait lui-même, par son influence à distance, entrer en résonance par la transmission de l’inévitable crainte en tremblant de tout son corps ! Ce fût un temps où les études étaient la chose la plus importante, un visa nécessaire et indispensable pour réussir dans la vie.

Il n’y avait ni téléphone portable, ni kit-mains, ni Bluetooth, ni le copier-coller pour leurrer. A la moindre fraude, te voilà expulsé de la salle en sortant tête baissée avec un zéro à la clé et une traduction en conseil de discipline sans aucun moyen de recours de reconsidérer les mesures prises à votre encontre où vous pouvez risquer l’exclusion de l’année ou encore plus pire sans aucun recours ni circonstances atténuantes ni encore moins une minime intervention. Ni grèves des étudiants, ni influence du directeur et de ses adjoints, ni pression de là-haut ni message des autorités, ne venaient déstabiliser les décisions indélébiles prises en toute âme et conscience selon la réglementation en vigueur et en toute liberté.

Actuellement, vous risquez l’arrêt et la barricade des entrées avec des portes cadenassées de toute l’université sans que les autorités n’interviennent pour mettre de l’ordre et de la discipline en faisant respecter la loi. Touche pas au désordre ! Il ne faut pas être la cause de l’effet de la boule de neige qui peut prendre forme à n’importe quel instant surtout si nous sommes à portée de mains des élections. Il faut attendre que les instructions atterrissent d’en haut ! Quand on ouvre des petites brèches, elles s’ouvrent continuellement en devenant des boulevards où tout le monde s’y engouffre à satiété. Le calice jusqu’à la lie a été bu ces derniers temps où on permet aux fraudeurs à la dernière session du baccalauréat cuvée 2013 d’avoir gain de cause après avoir revendiqué sans aucune pudeur que leurs sanctions soient revues à la baisse, en les épongeant telles les dettes financières publiques et privées ! Dîtes-moi S’il Vous Plait, mes chers lecteurs, qu’est-ce qu’on encourage à travers ces nouvelles dérives ?

Les valeurs ne se sont-elles pas malheureusement inversées ? Après trente années d’une carrière où vous assistez chaque jour sans résistance à une tendance vers le bas. Vos étudiants de l’année 1983 ne ressemblent en aucune manière, ni de près ni de loin, à ceux de 30 années plus tard. Pourtant, vous n’avez pas changé d’un iota si ce n’est l’expérience en plus doublée de la dégringolade en sus. Malgré cela, vous vous sentez être le centre de l’embarras si vous ne changerez point dans vos jugements. Vous vous sentez être le dernier maillon de la chaîne qui résiste tant bien que mal à ce déluge qui est en train de tout détruire sur son passage. Tous les responsables vous regardent de travers identiquement au dernier gardien du temple. Tôt ou tard, vous subissez le même sort que vos prédécesseurs. Le bulldozer va indéniablement écraser tout sur son passage.

Lorsque des étudiants d’aujourd’hui veulent imposer le choix les enseignants qui leur dispenseraient les cours de leurs cursus en recherchant par là à obtenir par tous les moyens le diplôme que le savoir et la connaissance, vous vous soupirez en souhaitant votre retraite anticipée. Peu importe les méthodes, l’important c’est le papier qui ouvre grandement la voie aux carences relevées.  N’est-il pas réel que toutes les structures de l’état en souffrent péniblement de la formation bâclée. Si vous remettez un zéro sur une copie d’examen, vous êtes remis à l’ordre mais si c’était un 20/20, tous les responsables vous regardent du bon œil car vous leur évitez les réprimandes du supérieur hiérarchique et d’une pierre deux coups avec le poste in extremis sauvé. Tu te dis : où va le pays comme certains ne cessent de le hurler sans que les consciences soient en mesure d’être écoutées car leurs voix sont écrasées et rendues inaudibles par le brouhaha de la médiocrité. De nombreux enseignants ont abandonné la lutte et ont jeté depuis longtemps l’éponge pour ne se consacrer qu’à leur carrière et à leur butin. Ils ne soucient guère de ce qu’il adviendra. Par leur silence, ils sont devenus l’allié par excellence de ce système.

Faut-il condamner ces étudiants ? Non !  C’est tout ce système, en particulier, qui est à proscrire en voulant faire de l’école et de l’université qu’une grande garderie, assistée mais éloignée de tous les enjeux et en marge de tous les défis qui attendent le pays. Entre la qualité d’hier et la quantité d’aujourd’hui, il faut faire le choix en associant les deux. Le populisme et la démagogie ne riment à rien et n’ont aucun avenir sauf, tôt ou tard, que le mur infranchissable à rencontrer.

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mercredi 9 octobre 2013

Pauvres administrés que nous sommes.

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Article à paraître dans les colonnes du Quotidien d'Oran du Jeudi 10 Octobre 2013 que vous pouvez consulter également sur les liens suivants:
- en format html:http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5188920&archive_date=2013-10-10
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Quoique vous fassiez, quoique vous preniez comme précautions, quoique vous envisagiez, quoique vous tentiez de l’esquiver, quoique vous essayez de l’amadouer, quoique vous seriez en situation réglementaire, elle ne vous lâcherait pas si elle vous attraperait entre ses tenailles, elle vous mettrait ko avant d’essayer de lui échapper, elle vous épinglerait à son tableau de chasse tel un beau trophée, elle vous aurait au tournant si jamais vous risquerez de tomber entre ses mortelles griffes. Elle vous abattrait d’un coup de massue à vous envoyer voir les mauvaises étoiles dont vous vous souviendrez très longtemps avant de quitter ce monde. Attention donc à celui qui oserait la défier.

Elle, l’incontournable, l’indéniable, la puissante, qui sans elle vous êtes bloqués jusqu’à ce qu’elle daigne vous entrouvrir enfin ses portes blindées après d’incessants va-et-vient malgré que vous chercheriez à bénéficier d’un coup de pouce pour vous faire délivrer le papier nécessaire, l’emploi ou la fonction désirée, l’air complètement essoufflé mais enfin bienheureux, après un parcours digne d’un combattant dans une jungle infectée de carnassiers.

Attention, vous ne seriez pas au bout de vos peines ! Mais c’est qui elle ? Celle qui est décrite tel un ogre qui bouffe tout sur son infernal passage. Sans doute, à la lecture de cette description plus ou moins succincte, vous avez une idée sur elle, sur son immense poids et son pouvoir illimité. On n’arrête pas de parler d’elle qu’on évoque tous les jours en chaque coin de discussions en mimant au bout des lèvres ou en cachette. Elle n’arrête pas de faire presque tout le temps la une des journaux, pas en héroïne mais en un mur muet qui se dresse à votre figure lorsque vous l’abordez. Elle est aussi décriée autant par les administrés que par les formations politiques. Lors des échéances électorales. Elle s’est érigée en un véritable système qui permet à certains de l’utiliser à profusion pour accéder aux différents sésames et pouvoirs dans le pays.

Pendant le mois sacré du Ramadhan, elle deviendrait plus pire en tournant au ralenti et en somnolant toute la journée. Au lieu que les administrateurs rejoignent avant à 9h pile leurs bureaux, ce n’est que vers 9h30mn qu’ils commenceraient enfin à se réveiller lentement de leur long sommeil alors que l’administré qui se présenterait le jour de réception bien avant l’ouverture des grilles, resterait longtemps à moisir avant qu’on daignerait enfin lui ouvrir les portes et le recevoir. Et quel accueil désagréable à celui qui se présente le premier au matin ! Malheur à celui qui oublierait un papier, il tomberait immédiatement dans son piège en lui demandant de revenir la prochaine fois avec le document omis. Et rebelote à l’infini.

A la rentrée des portes, c’est le planton qui vous renvoie en vous posant de tas de questions jusqu’à terminer par vous décourager. C’est le premier difficile obstacle à affronter même si vous feinterez de ne pas l’apercevoir et l’ignorer. Il a de l’expérience l’œil très vigilant. Il ne vous raterait pas en visant bien la personne ciblée. Il hume sa victime à cent mètres à la ronde. Il ne lâcherait jamais sa proie surtout s’il sentirait qu’elle est désarmée devant son inlassable questionnaire. Vous vous dîtes : ouf ! Je l’ai échappé belle. Une fois à l’intérieur, vous êtres trimbalés de bureau en bureau sans savoir où se donner la tête avec un service d’information des plus déplorables dont on ne sait pas s’il est fait exprès. Après avoir été lessivés de tous les bords, vous vous résignez à abandonner la partie pour espérer avoir de la chance en revenant le lendemain car celui qui pourrait régler votre situation est en mission indéfinie. Son remplaçant n’est pas là pour signer, il sert juste de remplissage du siège avec la responsabilité et l’honneur en moins. Il faut attendre que le patron revienne pour opposer sa signature comme le messie.

Avant de voir le directeur, il faut subir l’incroyable enquête de la secrétaire qui fait la pluie et le temps. Elle est devenue par la force des choses et l’usurpation des prérogatives la directrice bis ou l’adjointe sans pour autant figurer dans un décret. Vous avez enfin et après de multiples tentatives le grand privilège d’accéder à l’immense bureau du patron tout en étant ébloui par l’immobilier et le faste dans lequel il baigne dans son royaume secret. Une fois à l’intérieur, vous pouvez s’attendre à toutes les surprises et tous les supplices. Cela dépendrait de plusieurs facteurs et de l’humeur du moment. C’est la roue de l’infortune ou la fortune à l’algérienne.


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mercredi 2 octobre 2013

Le compte à rebours se serait-il déjà déclenché ?

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Article à paraître dans les colonnes du Quotidien d'Oran du Jeudi 3 Octobre 2013 que vous pouvez consulter également sur les liens suivants:
- en format html:http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5188578
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« Nulle raison ne pourrait justifier le mensonge »
Anton Tchekhov, Ecrivain russe [1860-1904]

 Si à l’instant même où j’écris ce papier, on donnerait brusquement la possibilité à nos jeunes de pouvoir quitter le pays sans le moindre sésame du visa, combien le feraient-ils sans hésitation et sans aucun regret de retour ? Je serais offusqué et en même temps très triste de découvrir les résultats du choix de notre jeunesse. Quoiqu’elle soit actuellement assistée par tous les moyens à travers les facilités incroyables des prêts ANSEJ inimaginables sous d’autres cieux dont la majorité considère, à juste titre, qu’il ne s’agit que de leur petite part de la grande tarte de la rente. Autant en profiter au maximum de l’aubaine comme tous les autres citoyens. 

Si elle opterait d’aller voir ailleurs, c’est qu’elle ne croit pas à son avenir dans ce pays où tout est virtuel et où rien n’augure à la quiétude, à la confiance et à un futur des plus radieux. Donc elle serait tentée de s’aventurer vers le nord, cela démontre qu’elle ne croit plus à un redressement du pays car elle n’a jamais été directement associée au projet. Elle ne prête non plus d’attentions aux chants de sirènes qui défilent inlassablement tous les jours au JT de 20 heures de l’unique. Elle n’éprouve que de la méfiance envers nos gouvernants si leur politique reste en l’état des choses. Elle sait que tout ce que nous vivons actuellement pourrait s’écrouler d’un jour à l’autre sur nos têtes si ce n’est que le compte à rebours vers la descente aux enfers se serait-il déjà déclenché. 

LA DESCENTE AUX ENFERS !

Une baisse des exportations suite à un tarissement des hydrocarbures ou une dévaluation du prix du baril sur le marché international sur lequel tous les algériens ont les yeux rivés, et ce serait la déroute nationale. C’est pour cette raison économique, doublée d’une incertitude politique et d’un marasme culturel et multidimensionnel généralisé que nos jeunes veulent fuir le pays comme la peste. Ils voient tous construire leur nid ailleurs, du fils d’un membre de la nomenklatura jusqu’au fils du plus pauvre des algériens. Le premier par la voie royale des airs avec un compte en banque bien garni en fortes devises, le second par la barque de fortune avec quelques sous pour survivre le temps de la traversée au péril de sa vie.

Ce ne sont pas uniquement les jeunes mais les moins jeunes ont aussi cette envie par peur de l’avenir de leur progéniture. Même les anciens cadres préparent leur avenir à l’étranger à partir de ce qu’ils engloutissent au pays. On essaie de vider le plus ce pays de ces ressources pour un placement gagnant au-delà des mers comme l’ont montré ces derniers temps les scandales à répétition à nous couper le souffle sur la dilapidation des biens de ce pays. On tente de subtiliser le plus d’oseille à ce pauvre pays pour la mettre au chaud dans un banque en suisse particulièrement sous des prête-noms divers dont on pourrait jouir au moment venu durant les années maigres mais où tout serait volatilisé et qu’il ne resterait plus rien à soutirer de cette terre maltraitée.  

Lorsqu’on lit sur la une des journaux que la balance commerciale, qui exprime la valeur de ce que nous exportons retranchée de celle que nous importons, dont les chiffres étaient récemment publiés par le Centre National de l’Informatique et des Statistiques des douanes [1], affirme que pour les huit premiers mois de 2013, elle a chuté de 9 milliards de dollars, contre plus de 16 milliards l’année dernière. Si l’on continue à ce rythme, ce serait un manque à gagner de 10 milliards et demi de dollars sur toute l’année ! Personne ne pourrait prédire ce que serait 2014 sur sa boule. Même l’importation des médicaments qui menace la santé des algériens et dépendante à 70% de l’étranger, est en baisse flagrante comme le montre cruellement l’article paru récemment dans le Quotidien d’Oran [2].Vu la décroissance actuelle qui a déjà abordé la chute infernale vers le bas, aucune politique basée sur la démagogie ne pourrait nous sauver de l’abîme.  On ne peut que s’inquiéter lourdement face à cette nouvelle situation désastreuse qui pointe comme une fatalité à notre horizon. 

UNE POLITIQUE AU JOUR LE JOUR !

L’Algérie vient de rater encore une fois l’occasion de sortir du piège qui prône une politique productrice de richesses permanentes mais là, le pays importe tout, de l’aiguille jusqu’aux avions en passant par les allumettes pour s’auto-immoler. Les barons de l’import se sont sucrés à outrance aidés en cela par des textes incitateurs en introduisant de nouvelles mœurs de consommation dont il va falloir désormais s’en débarrasser au plus vite si l’on veut survivre dans un avenir sombre qui avance à grands pas. Même l’eau et le pain ne peuvent être assurés avec des caisses qui vont se vider à la célérité à laquelle elles s’étaient remplies. Ce n’est pas à un scénario catastrophe que je décris ici mais c’est ce qui pourrait arriver à un pays qui veut vivre au-dessus de ses moyens. C’est un choc de guerre qui nous attend et dont on n’a pas su se préparer à l’affronter avec les armes élaborés par notre labeur. 

Rappelons-nous ce qui arrive actuellement à la Grèce et à l’Espagne. Heureusement pour ces deux pays, il y a cette solidarité sans faille des autres pays de la zone Europe qui est là pour amortir le choc. Qui est-ce qui va nous aider alors si jamais nous serions dans cette situation analogue ? Pourrions-nous alors garder notre relative indépendance sans perdre une seul once de notre liberté limitée. Je sens que les prédateurs ne nous lâcheraient pas et vont nous dévorer comme des bêtes féroces sans aucune vergogne dès le moment que l’on perdrait toute notre autonomie pas seulement alimentaire. Le pays aurait 40 millions de bouches à nourrir avec toutes les conséquences chroniques qui nous guettent comme un cauchemar avéré.

Pendant ce temps-là comme disait l’autre, on continue à bricoler avec des programmes au jour le jour pour gérer les problèmes hasardement comme ils viennent sans une visibilité ni à moyen ni sur le long terme. On sent qu’on ne gère pas un pays mais une véritable poudrière. Le seul moyen de sauver ce pays, c’est de revenir à la base où les citoyens acquièrent cet affranchissement qui les libère en les impliquant davantage dans la vie politique et sociale pour qu’ils puissent sentir la lourdeur de la responsabilité individuelle et collective. Savez-vous ce qui se passe dans le pays ? Les gouvernants successifs depuis l’indépendance, grâce à la rente pétrolière, assurent le remplissage du tube digestif des algériens qui ne réfléchissent plus de ce qui se trame là-haut chez nos chefs, qui n’auraient aucun compte à rendre si jamais la situation économique s’empirerait. Sauf peut-être à l’histoire. Avons-nous un jour vu un ministre ou un wali présenter son bilan en quittant ses fonctions à la tête d’un ministère ou d’une wilaya ? On partirait allègrement les poches pleines et les mains lavées de tous soupçons. 

C’est pour cette raison qu’il y a cette frénésie chez une grande majorité des algériens à prendre le large pour ne pas assister au déluge lorsque le cyclone frapperait à bout portant le pays. Avec les politiques actuelles, on est entrain non seulement d’hypothéquer l’avenir des algériens mais celle d’un pays pour lequel les martyrs se sont sacrifiés par leur sang pur sans aucune arrière-pensée de ce qu’il adviendrait après 62. Être un responsable ou un élu, c’est une tâche considérable à assumer devant l’histoire de ce pays. Gouverner de la sorte, c’est gager son futur. 

DES SURPRISES ! OUI. MAIS DES MAUVAISES.

Arrêtez s’il vous plait de propager des mensonges. On ne construit que sur du faux à travers de tels canulars. Il y a quelques années, l’ancien ministre de l’éducation nationale qui a été heureusement déboulonné après nous avoir mené la vie dure et les problèmes qui les a laissés en sont une de ses marques indélébiles qui traînent encore aux portillons de nos écoles, alors cet ancien ministre avait lancé la campagne de planter 8 millions d’arbres par les écoliers. A part l’effet d’annonce, personne n’a jamais vérifié si cette farce ait été réalisée. Il n’y pas plus tard que septembre 2012, l’ancien ministre de l’environnement qui vient d’être affecté dans un autre ministère dans le dernier remaniement gouvernemental, avait quant à lui lancé une autre boutade [3] en annonçant que les algériens vont avoir des surprises dans quelques semaines en parlant de l’éradication du marché informel et du nettoyage des villes en commençant par la capitale, vitrine du pays. Il a même eu le culot de demander aux algériens de patienter seulement deux ou trois mois pour voir les choses changer. 

Une année après et en ce début du mois d’octobre 2013, le rapport du britannique l’Economist Intelligence Unit [4] vient de le contredire de façon impitoyable en classant Alger à la catastrophique 6ème place dans le top 10 des villes mondiales les plus invivables, derrière Damas (Syrie), Dhaka (Bengladesh), Port-Moresby (Papouasie-Nouvelle Guinée), Lagos (Nigéria) et Harare (Zimbabwe). Figurez-vous, à cause de quoi ? L’une des raisons principales étant la saleté qui sévit dans la capitale [5]. C’est à forte raison que les jeunes algériens continuent à fantasmer de prendre les airs pour aller vivre à Melbourne, Vienne ou Vancouver pour les plus nantis, de braver les mers pour les plus pauvres à espérer rejoindre Alicante, Marseille ou Naples.

RENTRÉE UNIVERSITAIRE : ASSEZ DE BOUTADES SVP !

Passons à une autre invention de nos laboratoires de la semaine et non des moindres. En effet, j’ai lu ces derniers jours dans les colonnes du quotidien national El-Khabar [6] que selon une source du ministère de l’enseignement supérieur, les étudiants ont rejoint à 90% les bancs de l’université ! Mais si vous voulez vérifier cette assertion sur le terrain, vous vous retrouvez devant un gros dilemme impossible de passer inaperçu. Lorsqu’un parent d’étudiant lit sur la convocation de son fils que la date de délivrance de la chambre en cité universitaire est pour le 16 octobre, il ne pourrait que douter de cette incroyable fantaisie. Le chiffre inverse de 10% n’aurait choqué personne d’autant plus que les 1,3 millions d’étudiants touchent l’entourage de presque toute la population algérienne. On se retrouve encore une fois devant une incrédulité signée et approuvée qui toucherait la crédibilité de tout un secteur. Peut-être que certains chefs d’établissements universitaires zélés voudraient faire plaire en gonflant les chiffres difficiles à vérifier au nouveau ministre qui vient d’être fraîchement installé.

Quant aux étudiants, ils ont déjà fixé leur rentrée qui serait selon des sources officieuses après l’Aïd El-Kebir après avoir bouffé le mouton et en gâteau sur la cerise une bonne partie des enseignements. Tout le monde est au courant mais personne n’ose en parler par la crainte de subir les conséquences en naviguant à contre-sens du discours officiel. Pourquoi continuer indéfiniment à délivrer  des messages inadmissibles pour faire avaler la pilule à l’opinion publique ? On ne pourrait bâtir une université et un pays sur la base de ces calomnies. Faisons quelque chose avant qu’il ne soit trop tard. 

Il aurait fallu dire peut-être simplement la vérité pour pouvoir sensibiliser les citoyens sur la perte de tous les privilèges s’il l’on continue dans cette voie dangereuse qui nous enverrait tôt ou tard directement comme le mur. Pourquoi nos responsables n’aiment pas entendre et analyser les chiffres réels ? Ça pourrait se comprendre qu’ils veulent garder leurs sièges mais pas au détriment de l’avenir du pays. Ils sont aux anges lorsque leurs subalternes leur concoctent des duperies mais gare à l’effet boomerang qui ne tarderait pas à se retourner contre toute la fragile pyramide. Les exemples en sont nombreux. Pourquoi veulent-ils continuer à vivre dans ces feuilletons de science fiction sans fin ? Un feuilleton perdrait de sa saveur si le nombre de ses épisodes s’éterniserait. La réalité finirait toujours par rattraper que ce soit pour les morts ou les vivants.

-Références: