mercredi 29 novembre 2017

Maires, à vos promesses, maintenant !

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Cet article est paru dans les colonnes du Quotidien d'Oran du jeudi 30 Novembre 2017 sous les liens suivants:
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Les vainqueurs viennent d’être déclarés malgré quelques contestations et des protestations sporadiques, ici et là. L’administration, la maîtresse d’œuvre du scrutin, va sans aucun doute intervenir pour calmer la gronde et satisfaire les appétits des uns et des autres en réarrangeant la distribution des quotas ou à promettre plus de points aux vaincus pour les échéances à venir surtout pour ceux qui coopèrent à légitimer le plébiscite. Il y aura pour tout le monde tant que la rente est là pour soulager les plus sceptiques. Si j’ai bien compris, il ne suffit pas d’être porté par un parti au programme ambitieux pour gagner une élection mais il faut sniffer le bon cheval en haut de l’affiche de l’administration. Et c’est ce que les candidats l’ont fait avec plus ou moins de réussite, si ce n’est la déroute programmée.

Les lampions se sont tus. La messe est donc dite et les choses vont entrer dans l’ordre, comme d’habitude. Il ne subsistera dans l’oued que ses cailloux. Seules les affiches électorales sur les panneaux officiels et anarchiquement sur les murs du centre ville et des quartiers environnant en témoignent de la campagne qui n’a pas été, faut-il le souligner, à la hauteur des espérances et des défis du pays surtout avec cette crise qui est en train de laminer le trésor public quoique les autorités se soient réjouies, comme il est toujours d’usage, du bon déroulement de ce dénouement aux portes de la ligne de mire de 2019. On ne va pas quand-même aller jusqu’à se tirer une balle sur le pied. C’est trop tard, le train a pris de la vitesse pour le stopper. Quant aux chiffres, ils seront toujours mis en doute tant qu’ils ne sont pas totalement reconnus par tous les acteurs politiques que ce soit parmi les participants, les boycotteurs ou ceux qui n’ont donné aucun signe de vie. Seuls les pouvoirs publics détiennent pour encore longtemps toutes les clés de l’énigme.

Malgré les images folkloriques diffusées par les chaînes de télévisions officielles et officieuses, en dépit des permanences furtives des candidats fortunés et de leurs affiches dont les dimensions ont dépassé toutes les normes inimaginables, rien dans notre quotidien n’avait indiqué qu’une campagne électorale locale se déroulait sous nos cieux. Les uns ont même comparé cette campagne à l’américaine en relation avec les oligarques qui ont agi dans l’ombre ou qui se sont mouillés jusqu’au cou et dépensés sans compter. Leur avenir en dépend largement. Il est temps de guider le taureau par les cornes et contrôler en amont toutes les affaires juteuses qui peuvent tomber directement dans leurs escarcelles. Ce n’est que bénéfice pour les sponsors. On sent que la pieuvre a pris les commandes des leviers, non pas par de corrects investisseurs mais par des prédateurs ayant amassé de fortunes crasseuses mal acquises tout en graissant les pattes à tout-va.

On ne peut effectivement parler de programmes cohérents et réalisables de partis si ce ne sont des promesses lancées lyriquement et hasardement au cours des meetings et où les bouffonneries ont marqué les esprits. On ne peut pas citer toutes les perles ayant pollué la campagne. Il en faudra tout un recueil pour les narrer et un jury pour les classer et décerner les médailles aux plus méritants. La palme d’or reviendra logiquement à qui vous pensez. Faute de choix judicieux, le peuple, qui s’est déplacé aux bureaux de vote, l’a fait surtout à la tête de leurs clients comme si le programme se lisait sur le visage. Les facteurs de la tribu et de la dechra, ont encore de nombreuses années à vivre. On est encore loin, très loin des institutions républicaines que le peuple algérien dans son ensemble aspire dans sa majorité à les bâtir. Dommage que ce qui intéresse les autorités, demeure toujours le taux de participation. Et ce qui explique pourquoi à chaque élection, ce taux hante les esprits des responsables.

On n’a pas entendu un seul parti nous dire avec quelles finances va-t-il concrétiser ses promesses s’il sortirait vainqueur de l’urne ? C’est trop facile de balancer en l’air aujourd’hui des engagements qu’on ne peut les honorer le lendemain. Avec quel argent va-t-on construire des logements, des écoles, nettoyer les villes, embellir les rues, se consacrer à la culture et aux sports, etc… ? Même les moyens, seuls, ne peuvent suffire lorsque les idées font défaut. Il ne faut pas être aveugle pour ne pas voir ce qu’on a fait des 1000 milliards de dollars. Si des pierres du sommet de la pyramide jusqu’à sa base, manquent en son intérieur, fatalement c’est tout l’édifice qui peut à tout moment s’écrouler.

Les partis vainqueurs croient dur comme fer qu’ils sont les représentants légitimes des citoyens. Qu’ils sont les seuls à pouvoir réaliser leurs rêves. Qu’ils sont les rares capables d’accomplir la mission qui leur a été accordée par les urnes. Qu’ils seront tout au long de leurs mandats plus près des citoyens, à leur écoute tout en n’oubliant pas d’être loyaux avec leurs serments. On verra ce qu’il adviendra de ces paroles mielleuses distillées dans leurs tournées dans les quartiers, surtout auprès des couches défavorisées à qui on a distribué quelques maigres sandwichs en guise d’offrande de bonnes intentions pour se souvenir de leur bienfaiteur le jour du scrutin. Le rapace appâte sa proie avant de la broyer.

C’est au peuple de choisir ses vrais représentants à l’instar d’une équipe de foot qui joue pour les couleurs de sa ville. On peut soit monter une faible équipe qui végète dans un championnat de niveau zéro, soit une équipe moyenne qui joue dans un médiocre championnat ou tout juste moyen, soit une équipe forte qui ambitionne de jouer les premiers rôles dans un championnat relevé. On peut ainsi avoir toutes les combinaisons possibles, cela dépend de ce que l’on veut comme débouchés. On peut devenir largement champion, se classer au milieu du tableau ou se battre pour ne pas être reléguée en division inférieure. Cela dépend des équipiers choisis et de l’état de motivation pour défendre le maillot du club jusqu’à la dernier goutte de sueur. C’est comme cela que les élus se doivent de l’être. On attend qu’ils se défoncent pour nous sur le terrain et non vendre le match à qui leur offrira le plus et trahir la confiance des fans.

Cela dépend également des forces et des moyens mis à la disposition de l’équipe par ses dirigeants et aussi et surtout en fonction de la qualité de la division dans laquelle ils aspirent à évoluer. On n’attend pas que les autorités nous combinent un club préfabriqué qui n’est là que pour nous miroiter le mirage et qui peut s’éclater en milles morceaux une fois que les dés soient jetés et les desseins de ses concepteurs accomplis. Le retour au point zéro est plus que garanti.

Lorsqu’on concourt dans un championnat rehaussé, on ne peut que progresser en gagnant quelques points et en faisant valoir ses atouts. Le classement final ne peut découler que du travail fourni, de la politique suivie et d’une vision basée sur le long terme. En revanche, quand on se hasarde dans un championnat déficient où l’arrangement et le trucage des résultats des matchs battent leur plein, où les arbitres sont achetés et où la ligue est une partie prenante des conflits entres les équipes adverses, le  premier arrivé en haut du classement ne peut être sacré comme l’authentique champion. Il sera de fait éliminé des jougs internationaux dès les matchs préliminaires.

Les résultats sont proclamés dans une élection où la carte électorale n’est pas encore totalement définie tant que toutes les forces politiques du pays ne peuvent librement s’exprimer et puissent participer sans aucun obstacle, ni par des textes minés en amont et en aval, les élections propres et transparentes ne sont pas décidément pour les proches lendemains. Et c’est la marche du pays qui est forcément entravée. Au même moment où des partis célèbrent leur victoire acquise dans l’ère de la démocratie, paradoxalement, des syndicats libres sont empêchés de se rassembler pacifiquement aux portes d’Algérie et de constater des députés des partis victorieux voter à mains levées une loi contre l’impôt sur la fortune. On se pose la question s’ils se rangent derrière les électeurs qui les ont en principe élus ou comme un rempart autour des oligarques qui les ont adoubés.

Une réelle redistribution des cartes engendrera à coup sûr des élections en totale contradiction avec les présentes et les précédentes. On ne fait que reculer les échéances. Avec cette jeunesse facebookienne connectée presque en permanence aux réseaux sociaux, une telle politique de fuite en avant ne peut entrevoir un avenir des plus sereins et engager le pays vers le mieux.

Maintenant que les résultats sont entérinés, que les sièges sont squattés par des candidats qui se sont appropriés par toutes les recettes invraisemblables les premières places et surtout par une politique bouchée qui leur a permis d’usurper des rôles qui ne leur sont point destinés si des balises adéquates avaient été mises en place pour éviter tout détournement de la volonté populaire.

Devant ce fait accompli, qu’ils assument alors leurs gages qui promettaient monts et merveilles aux plus déshérités. Que les nouveaux élus osent afficher leurs biographies et déclarer leurs patrimoines afin de donner un sens à leurs élections et montrer leur bonne foi du moment où les citoyens en soupçonnent généralement. S’ils veulent avoir la mémoire courte, l’Algérie les marquera indélébilement à jamais dans le cas. L’histoire du pays sera impitoyable. J’ai bien la crainte que sitôt les élections ficelées, les locaux de leurs permanences vont être certainement bouclées à double tour…jusqu’aux prochaines échéances. Et rebelote sauf un salutaire sursaut.

L’anecdote que l’ont peut retenir de ces élections est de voir des partis que l’on croyait marcher main dans la main, se dénoncer mutuellement dans le cambriolage de voix et crier au scandale et au voleur ! Le plus marrant dans cette fiction est de voir le parti né prématurément avec des moustaches, victime de l’alchimie dont il est l’un des inventeurs de sa marque déposée, comme il le dénonce à travers des vidéos postées sur Facebook et traite les bourreurs d’urnes de tous les noms. À force de joueur avec le feu, on finira probablement par se brûler les doigts et c’est valable pour les alliés de circonstance. Attention, l’histoire réservera toujours de mauvaises surprises pour ceux qui croient toujours que le monde leur est indéfiniment acquis.

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jeudi 9 novembre 2017

De ces irresponsables de dernier cri

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Cet article est paru dans les colonnes du Quotidien d'Oran du jeudi 09 Novembre 2017 sous les liens suivants:
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L’Algérie souffre d’un mal qui est devenu un véritable désastre. C’est celui de ces responsables qui n’assument pleinement leurs devoirs. La majorité d’entre-eux adopte la situation du statu-quo devant les moult difficultés se dressant sur leurs passages. Moins ils bougent, et moins ils ont des soucis et plus ils ont de la chance de pérenniser. Et tant mieux pour eux. C’est ce qu’ils pensent, malheureusement. En dépit de leurs tares, ils s’accrochent à leurs statuts de chefs dont ils ne veulent plus s’en défaire. C’est leur gagne-pain au détriment des valeurs. Ils deviennent malades s’ils sont dépossédés de leurs privilèges et leurs auras. C’est aussi leurs façons d’exister mais dommage, nuisiblement pour la chère Algérie.
Lorsque les problèmes surgissent dans leurs secteurs, ils restent complètement figés. Ils se font même tous petits en tentant de se faire oublier en attendant de laisser passer l’orage. Plus de peur que de mal pour eux, néanmoins, inversement pour l’établissement. Ils rentrent presque en hibernation tellement ils ne cherchent nullement à démanteler les obstacles et casser la chaîne des pistonnés. C’est la stratégie qu’ils adoptent et dont souffre inlassablement la mère-patrie.
On aurait bien souhaité qu’ils réagissent même en petitesse mais hélas ils s’écrasent complètement devant le moindre petit bobo. Avant de penser à régler les délicates situations, ils cogitent d’abord à sauver leurs strictes rentes avant de daigner songer à ceux de l’institution. Leurs gains priment avant tout. Pourtant, ils disposent de leurs prérogatives qui délimitent leurs champs d’action. Mais ils ne pourront jamais avoir les mains libres et agir en souverains tant qu’ils sont désignés par défaut à leurs postes par leurs occultes parrains.
Ils n’osent nullement agir en toute clarté et en toute transparence mais ils préfèrent s’agiter derrière les rideaux et téléguider leurs sbires et leurs marionnettes pour le malheur de l’Algérie. Ils ne pourront jamais affronter les vrais problèmes tant qu’ils n’assument pas les pouvoirs dont ils ne disposent point sur le terrain de la réalité. Ils ne pourront jamais remuer le simple petit doigt tant qu’ils n’ont pas reçu l’ordre de leurs tuteurs inavoués.
Ils savent qu’à la moindre initiative de leur part, ils sont grondés, avertis et punis au coin et mis en quarantaine. Ils sont immédiatement placés sur la liste des révoqués s’ils persistent à tenter d’échapper des rangs. Ils ne lèveront pas l’index tant qu’ils n’ont pas été autorisés. Ils baisseront les yeux à la vue de leurs bienfaiteurs et de leurs appuis qui les ont mis en haut de l’échelle sans qu’aucun mérite, ni qu’une infime intégrité ne les dictent réellement.
Dès qu’ils sont démasqués, ils fomenteront mille et une fumisteries pour se dérober. En votre présence, ils distillent des paroles mielleuses qui vous envoûtent et vous faire plier en quatre dans leurs poches. Ils vous endorment en vous promettant monts et merveilles. Au tournant, vous ne verrez même pas la queue d’une souris. En votre absence, leurs légendaires retours de veste seront assurés. Ils deviennent d’autres individus qui vous éradiquent de leurs cervelles. Vous n’existez plus, vous devenez une puce à humilier et à écraser.
Le mensonge devient un de leurs exercices favoris et une addiction dont il va falloir consulter le plus rapidement possible un spécialiste pour se soigner de cette néfaste dépendance ou si grave encore, un séjour en clinique est indéniable pour définitivement se sevrer. Ils mentent comme ils respirent tellement ils sont à l’aise dans cette basse épreuve. Les mirages sortent de leurs bouches sans que leurs consciences puissent les remettre en question. Plus ils perdurent dans la responsabilité et plus leurs impostures deviennent trop flagrantes.
Lorsque vous les saisissez par écrit sur une quelconque interpellation, ils n’utilisent jamais la même procédure. Pourtant c’est la force d’une administration qui s’assume et qui prône le respect des textes. Ils ne veulent jamais laisser des traces écrites et ineffaçables qui peuvent, comme ils l’admettent, se retourner contre eux et les compromettre dans leur plan de carrière. Ils se détournent notoirement de leurs missions. Ils préfèrent opérer verbalement à l’image des sans-papiers en situation irrégulière.
Pourtant ils font des pieds et des mains pour aboutir lorsqu’ils postulent pour arracher la fonction convoitée et faire valoir leurs carnets d’adresse. Ils exhibent toute leurs prétendues capacités de gestion et affichent publiquement leurs douteuses aptitudes à diriger en toute transparence et objectivité mais une fois installés, ils ne se souviendront de rien, ils deviennent entièrement amnésiques. Ils ont déjà furtivement viré à 180 degrés. Ils deviennent de véritables caméléons à se muer en toutes les nuances selon le client d’en face et suivant le climat régnant. Tous les acteurs influents sont consultés pour leurs nominations contrairement aux concernés qui encaissent et attendent le probable renouveau mais en vain.
Ils ne répandent partout que des promesses mais jamais ils ne les réaliseront sauf bien sûr à leurs garants à qui ils jurent allégeance et fidélité tant qu’ils sont au sommet et sans omettre de courber comme il se doit l’échine à tout instant. Pire encore, ils proposent leurs services sans qu’ils soient sollicités avec l’abus, en cerise sur la gâteau. Pour le reste, ce sont d’autres créatures qui ne se rappellent de rien, feintant de vous reconnaître. Ils perdront subitement toute mémoire en vous disant de leur rappeler les faits. Ils veulent à chaque occasion ouvrir de nouvelles pages blanches après avoir terni volontairement les précédentes. Vous vous lassez devant de telles déchéances de l’être humain et vous abandonnez finalement la partie mais sans l’abandonner. Ce n’est que chose remise.
Ils traînent presque tous, des boulettes qu’ils sont méfiants d’être découvertes une fois éjectés de leurs cossus fauteuils. Le premier article de leurs desseins est de se servir royalement tout en n’oubliant pas les proches adeptes de la politique suivie. Les miettes, c’est pour la troupe après avoir réussi à passer toutes les embûches bureaucratiques dressées. Ils veulent assurer leurs bases arrières qu’inchallah leurs vœux seront balayés. Ils ont tout le temps la peur au ventre et se tiennent sur leurs gardes si jamais le sifflet de la fin se déclencherait, fatalement. Ils ne font jamais de beaux rêves les nuits à cause des cauchemars qui les hantent dans l’obscurité. Ils sont très nerveux et inquiets, collés en permanence à leurs téléphones à la veille d’éventuels renversements. Ce qu’ils essaient d’éviter, c’est la chute libre, eux qui se voyaient toujours en perpétuelle ascension.
Ceci est la nouvelle race de ce genre de responsables qui ne reculent jamais devant l’impensable en emportant tels des bulldozers tout sur leur passage et principalement ceux qui les gênent sur leurs tortueux chemins. Ils sont scotchés aux sièges à l’instar de sangsues pour ne plus penser à ne les lâcher. Ils ne font que les chauffer pour rien. Ils freinent toute émancipation naissante et toute voie dérangeante pour le bien du pays. Ils étouffent dans l’œuf  toute volonté qui va à l’encontre de leurs occultes besoins et appétits incessants. C’est très inquiétant que le pays traîne encore ces casseroles qui ne font que le régresser et l’ajourner sans cesse de rejoindre le concert des nations.
Désormais, ils n’ont plus la pudeur de se dévoiler. Ils se bombent le torse en se vantant d’abuser de la grande supercherie. Toute duperie durera le temps qu’elle durera mais disparaîtra un jour à jamais lorsque le vent tournera et ne subsisteront que leurs dégâts et sinistres héritages. L’histoire aura du pain sur la planche à noircir ses pages de ces témoignages indélébiles. Au moment de l’éradication, c’est la panique qui les envahira lorsque sonneront les glas du salutaire dénouement. Rira bien qui rira le dernier, la dernière nouvelle sera rapportée par les ultimes arrivants comme le dit si bien l’adage populaire.

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jeudi 2 novembre 2017

Les images chocs !

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Cet article est paru dans les colonnes du Quotidien d'Oran du jeudi 02 Novembre 2017 sous les liens suivants: 
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Les images qu’on a tous vues en ce 29 Octobre à travers Facebook m’ont refroidi avec le buzz qu’elles ont produites en Algérie et hors de ses frontières . Elles  m’ont laissé sans voix. Elles m’ont presque figé. Elles ne pouvaient laisser personne indifférent surtout à deux journées de la date d’anniversaire du 1er Novembre 1954. Essayons d’imaginer ce que faisaient en ces jours-ci Ben’Mhidi, Didouche et Benboulaid, pour ne citer que ces héros, en cette veille du déclenchement de la révolution. Ils rêvaient sans doute beaucoup pour nous et pour la destinée notre pays.

Nos martyrs aspiraient à nous tracer un autre avenir que celui de la servitude et l’avilissement. Ils ne pensaient point que leurs descendants souhaiteraient vivre sous d’autres cieux. Nos héros voulaient juste l’indépendance du pays du joug colonialiste et bâtir un pays qui survivra aux hommes dans lequel la justice, l’ordre et l’état de droit régneront. Ils ne pensaient pas qu’une fois les yeux fermés, les gouvernants post-indépendance allaient dévier de ces valeurs de la liberté. Ils ne pensaient pas qu’un jour leurs arrières-petits enfants allaient prendre la fuite pour espérer atterrir au nord puisque la terre qui devrait leur revenir de droit leur semble inaccessible sauf aux promis, aux pistonnés et aux enfants du premier collège.

Au fur et à mesure que ces photos de la catastrophe défilaient sur mon fil d’actualités qu’elles me donnaient envie de vomir tellement la nausée me prenait à travers la gorge. Je ne voulais pas regarder le résultat des politiques suivies aveuglément par nos gouvernants et leur fuite en avant sans l’écoute d’aucune autre voie raisonnable mais seulement suivre leurs néfastes instincts comme s’ils étaient des messagers envoyés sur cette terre généreuse et que seules leurs décisions prophétiques prônaient au détriment des intérêts suprêmes du pays.

Ils se voient narcissiquement, à travers les échos de chaînes de télévision à leurs bottes et des médias caressant dans le sens du poil, que tout le pays les acclamait. Ils oublient que les jeunes d’aujourd’hui ont décidé de leurs sorts. C’est de serrer la ceinture en faisant des économies pour juste déguerpir et ne plus retourner derrière soi. Ils sentent que le déluge est plus proche avec ces derniers temps de discours pas du tout apaisant surtout qu’ils ont perdu confiance en ces dirigeants. Ils ont abandonné l’idée que la solution des problèmes pourrait y jaillir. Ils ne croient plus du tout qu’ils vont faire sortir le pays de la crise avec des caisses presque vides alors qu’ils ont englouti 1000 milliards de dollars en presque deux décennies pour ne pas dire la plupart volatilisés à travers des comptes off-shore et des résidences acquises dans les quartiers chics de Neuilly-sur Seine et les plages dorées de la côte sud ibérique.

Comment ceux qui souffrent dans le pays allaient-ils les croire en leurs étoiles ? Alors qu’ils seront les premiers à prendre la valise si jamais le pays tomberait en cessation de paiement. Leurs enfants sont déjà planqués à l’abri là-bas. Les parents viennent souvent les voir et se détendre en leur compagnie durant les week-ends ou pendant les hospitalisations et contrôles médicaux dans les cliniques parisiennes. En attendant, ils restent dans le pays où il y a toujours quelque chose à gratter. Ils ne lâcheront pas ce pays tant que l’odeur de la tune se sent à un mètre à la ronde.

Lorsque j’entends quelques responsables dire que ces étudiants sont avides du savoir et ne veulent n’acquérir que plus de connaissances, soit je me dis qu’ils sont aveuglés par les postes qu’ils occupent et sont très loin des préoccupations du peuple, soit ils ne veulent pas regarder leurs visages dans un miroir. A ma connaissance, on peut trouver toutes les spécialités dans les universités et les grandes écoles algériennes surtout avec le système LMD sauf si on veut reconnaître que la formation universitaire est des plus épouvantables. La preuve, on veut maintenant instituer un décret pour permettre aux doctorants de soutenir leurs thèses sans passer par l’exigence d’une publication scientifique dans un journal côté.

Si ces étudiants n’ont pas trouvé chaussures à leurs pieds en Algérie où l’acquisition des diplômes est garantie par la médiocre criarde, comment vont-ils faire pour les obtenir en France ? Surtout que l’enseignement est dispensé en langue française dont ils éprouvent d’énormes difficultés à l’apprendre sauf s’ils veulent revenir au point zéro avec un formatage intégral à la source. Peut-être aussi, l’essentiel est de passer de l’autre côté de la barrière par ces temps où l’avenir est ici des plus incertains. Ce qui me semble le cas pour la majorité d’entre-eux.

Je serais bien curieux de connaître les statistiques officiels du retour de ces étudiants une fois leurs études supérieures accomplies. Les autorités chargées de la gouvernance de notre pays ne vont quand-même pas naviguer à contre-courant de leurs allégations. Selon une étude faite par une équipe de recherche algérienne en 2015, elle nous apprend avec stupéfaction que 268000 migrants algériens qualifiés ont préféré faire un aller sans retour à l’étranger, dont 75% en France, le reste au Canada (11%) et au Royaume-Uni (4%) (*). L’abattement est encore plus grand lorsqu’on découvre que 10000 médecins exercent en France ! Un vrai massacre pour l’Algérie.

Enfin, je termine ce mince papier par un humoriste algérien installé en France et qui a assurément vécu cette amère expérience de campus-France, en l’occurrence Réda Seddiki, et qui nous donne un petit aperçu sur le parcours du combattant de ces étudiants algériens à partir de leur point de départ. Je vous donne juste quelques bribes de son sketch (**):

«  A partir de la phrase « baghi na3tiha (je veux me sauver) », commence le parcours de l’étudiant algérien en France ! ça fait rêver, ça fait rêver, et là tout s’enchaîne, on a une motivation jamais vue chez l’Algérien. On est capable de passer une nuit blanche pour constituer son dossier campus-France, une  nuit blanche pour rédiger une lettre de motivation. Mais, pour ses cours « Walou (rien) »! C’est fou ! Quand même pour la motivation qu’on a et cet enthousiasme pour la France, nous algériens, enfin pour une inconnue, pour un pays qu’on ne connaît pas, juste, on le voit de loin… ».

Que l’on aime ou que l’on aime pas, ce n’est pas cela le problème. L’essentiel est de savoir écouter les vérités brutales qui nous arrivent d’en face car cela donne beaucoup à réfléchir et à méditer sur notre pays qui se vide lentement de sa sève.




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