mercredi 29 juin 2011

De l’écrit jaillirait la lumière !

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Article paru sur le Quotidien d'Oran du Jeudi 30 Juin 2011 que vous pouvez consulter également sur les liens suivants:
- en format pdf: http://fr.calameo.com/read/000370446f89b63bed695
- en format pdf zippé: http://www.lequotidien-oran.com/pdfs/30062011.zip
- en format html:http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5154945
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Depuis le 26 juin dernier, de nombreux lecteurs s’intéressent passionnément aux échanges sur le Quotidien d’Oran entre deux plumes. Un véritable face à face dans un pays désertique entre deux éminences grises de la plume, chacune dans son domaine, en l’occurrence messieurs Kamel Daoud et Yasmina Khadra. Il ne s’agit pas ici de prendre partie pour l’un ou pour l’autre, loin de là pour le moment. On en demande infiniment des échanges de ce type. On apprend plus que l’on donne. Les réactions, ce ne sont pas dans l’immédiat. Ils sont entrain d’éclairer nos lanternes et nourrir nos méninges sur des choses laissées en suspens et que les politiques n’ont pas réglées en leur temps et qui dorment aux fins fonds de l’inconscient de l’algérien.

Dans les pays développés, les télévisions et tous les autres médias auraient pris automatiquement le relais en invitant les intervenants à débattre de vive voix, non pas pour relancer les polémiques mais pour extirper le plus de jus à alimenter les cervelles. Chez nous, un tel débat ne dépasserait pas les frontières de l’adresse d’un journal. Le grand public ne saura jamais ce qui se passe dans les têtes de nos intellectuels. Cela resterait presque du domaine privé.

En tous les cas sur Facebook, les membres amis ne font abstraction d’aucune retenue et n’ont pas de crainte à affronter leurs idées. Ils y vont avec toutes leurs opinions, le débat fait sensation. Et c’est vraiment dommage pour le pays tout entier de ne pas en profiter de ces moments d’une rare saveur. C’est une des causes principales que l’écrit ne peut se populariser dans le pays tant qu’il n’y a pas de répondant dans la société et au sein des pouvoirs publics qui monopolisent les médias lourds. Mais il faut persévérer jusqu’à ce que tous les rêves soient un jour permis.

À QUOI SERVIRAIT-IL ALORS D’ÉCRIRE ?

Combien de fois avons-nous entendu dans notre entourage la phrase désespérante et assassine: mais à quoi servirait-il d’écrire ou de faire des analyses sur tel ou tel problème qui mine le pays si ça ne rimerait finalement à rien ? Une phrase interrogative décourageante à plus d’un titre. On peut renvoyer la question sous une autre forme : dans le cas où nous nous déroberions de notre devoir, existerait-il alors un autre moyen de s’exprimer pour quelqu’un qui ne peut survivre que par sa plume ? Là tout le monde se détourne. Si des millions d’Algériens ont été à l’école depuis l’indépendance, ils devraient être utiles au pays même en répandant une petite phrase autour de soi et non semer le doute, le désespoir et la démoralisation. L’espoir doit être l’horizon qui nous ouvrirait toutes les portes du bonheur.

Quel est le moyen dont dispose un érudit, un instruit pour s’attaquer aux maux et aux fléaux qui rongent le pays de bas en haut et dans le sens contraire ? Evidemment l’écriture est un moyen formidable pour faire parvenir le message. Elle constitue sa véritable seule force nécessaire s’il sait l’utiliser à bon escient. Elle est redoutable et redoutée par tout le monde. On doit la manier avec intelligence où chaque mot, chaque verbe, chaque ponctuation aurait son importance pour décrire les tares ou les qualités de notre société.

Une simple formule bien soignée et convenablement ficelée soulèverait des montagnes et ameuterait les responsables désignés ou imposés. Une lecture entre les lignes donnerait l’alerte aux concernés. C’est dans les discussions et les opinions contradictoires et constructives que le pays se forgerait, avancerait et non dans les propos outranciers des thuriféraires qui nous déchoient vers l’abîme et cultivent la fiction de l’illusoire du présent. La langue de bois ne nous dirigerait que rectilignement vers toutes les dérives et tous les dépassements incroyables. C’est ici que les intellectuels doivent jouer leur rôle principal de guide cérébral.

On doit aussi savoir écouter, lire le contraire de ce que l’on pense. C’est dans les arguments nécessaires que l’on progresserait. Lorsqu’on aborde un universitaire dégoûté, déprimé, qu’est-ce qu’on pourrait espérer de mieux de ses disciples. Ou un parent qui n’accomplirait pas son devoir envers ses enfants laissés à l’abandon, à quoi s’attendrions-nous de sa progéniture dans un proche avenir ?

UNE ARME À DOUBLE TRANCHANT

Néanmoins, c’est une arme à double tranchant. Elle peut se retourner allègrement contre son auteur si elle est manipulée avec traîtrises, tromperies ou flatteries débordantes. On peut la rendre rentable dans tous les sens. Elle peut vous enterrer vivant si elle est manœuvrée imprudemment et peut-vous exhumer facilement comme l’avait été ces derniers temps Albert Camus en Algérie. Ne dit-on pas que les écrits restent tandis que les paroles s’envolent ?

Imaginons un instant que le peu de gens qui écrivent, s’arrêtent subitement de le faire. On n’aurait ni connu Mohammed Dib, ni Mouloud Feraoun ou Malek Benabbi et encore aujourd’hui Mohamed Sansal, Yasmina Khadra, Kamel Daoud, Abed Charef ou Chemseddine Chitour. Le malheur et la décadence du pays seraient plus que garantis. Si le nombre de contributions s’accroitrait, ça ne pourrait que rapporter du bien à ce pays, le réconforter dans son esprit et dans sa marche vers le progrès. Une véritable bouffée d’oxygène dans un milieu gaz carboné.

L’ALGERIE FORTE EN ORAL, FAIBLE À L’ÉCRIT ?

Peut-être que l’Algérie est à vocation orale où l’écrit ne tient qu’un négligeable rôle. Mais cette supposition ne tient pas longuement la route. Si c’est réellement le cas, cela signifierait que notre pays est encore analphabète qu’on ne le pense en haut lieu alors que les chiffres officiels prônent l’inverse. Lorsque vous vous trouverez en Europe par exemple, les citoyens lisent où qu’ils se trouvent. Que ce soient dans le métro, dans le bus, dans le train ou partout ailleurs. A tel point que la distribution des journaux gratuits s’est généralisée dans toutes les villes. On le constate fortement dans la rue. La lecture est partout présente.

L’oral, sauf dans les débats télévisés ou des réunions, n’a aucune chance de sévir dans un milieu développé et averti. Il ne trouverait refuge que dans les pays qui ressemblent au nôtre. A défaut de débats organisés, c’est dans le brouhaha que l’on s’affronte à coups de gueule, de manches et de barres de fer. On en lit tous les jours dans les journaux que ce soit au sein des partis ou des associations qui ont pignon sur rue dans chaque campus universitaire. C’est un spectacle désolant offert aux médias de l’image du pays.

L’ALGERIEN ADORE LA TCHATCHE

Il est connu de tous que l’algérien aime beaucoup plus parler dans l’informel qu’écrire. Est-ce un défaut ? Le lecteur moyen d’un journal ne s’intéresse qu’à la page sportive, aux scandales et les polémiques dans la presse. Il ne veut pas aller à l’essentiel, au plus profond des choses. C’est ainsi qu’il a été formé et formaté. Il adore s’intéresser aux sorts des autres que de se préoccuper de son quotidien. Mais comme me l’avait dit un collègue, le nombre restreint d’écrivains peut aussi expliquer le faible pourcentage de lecteurs dans la société. Il est aussi vrai dans l’autre sens.

À VOS PLUMES !

Il y a d’après les chiffres officiels 38000 enseignants universitaires dans le pays sans compter ceux qui exercent hors université. Mais lorsqu’on veut chercher de la qualité, c’est rechercher une épingle dans une botte de foin. Bon bref, passons ! Ici un autre débat s’impose.

Supposons que le quart de ces universitaires participe annuellement avec un texte. C’est 9000 papiers de 3 ou 4 pages, c’est presque une production de 400 livres en format de poche par an! Si le côté scientifique suivrait allègrement dans le cas où les moyens seraient déployés sans aucune embûche bureaucratique, notre pays pourrait faire progresser sensationnellement son score plombé en bas de l’échelle. Ce serait certainement une véritable révolution culturelle au vrai sens du terme. Ils auraient la capacité d’investir dans tous les domaines à force de creuser dans les crânes. De la politique jusqu’aux sports. Le gouvernant aurait certainement l’embarras du choix et le rayonnement sur la société serait quasiment évident.

MOUILLER SON MAILLOT

C’est de l’écrit et de la réflexion que le pays peut en tirer profit et nous sortir du marasme actuel dans lequel plonge le pays. Un beau pays transformé en un territoire à fuir par toutes les recettes chimériques et à l’exécrer et le vomir tous les jours qu’on y demeure sur son sol.

Par ailleurs, la matière grise est en hibernation, elle dort dans son profond sommeil et ne fournit aucun semblant d’effort pour métamorphoser son sort ou encore celui de son environnement. Beaucoup d’expériences somnolent en chaque universitaire dans ce pays mais elles n’éclateraient jamais si elles ne seraient pas mises à l’évidence.

C’est dans la production que l’on tire de la qualité. Il y a beaucoup de compétences qui reposent en chacun. Elles ne seraient jamais explorées si elles ne soient pas expérimentées. Il y a des universitaires qui travaillent beaucoup plus que les autres. Pas comme ils le font la moyenne par la brosse. Il y a ceux qui réfléchissent 18 heures par jour et il y a ceux qui ne procurent pas une minute à leur milieu. Le chacun pour soi semble être l’adage préféré.

Les universitaires doivent laisser des traces. Ils doivent guider par la lumière cette société. Ils véhiculent de la science et peuvent créer du savoir faire. Ils doivent exprimer leurs opinions, pourquoi pas politiques, sur leur vécu au sein de la société dans laquelle ils vivent. J’ai la conviction qu’ils peuvent changer beaucoup de choses.

L’écrit responsabilise aussi son auteur. Il faut qu’il se mouille le maillot. Il ne doit absolument pas rester en marge de la société, il doit absolument s’impliquer, gagner sa place. Si le pays lui a permis de faire de grandes études, il doit lui rendre ses dettes et des comptes. Et ne pas rester à l’écart et attendre que les autres lui apportent les remèdes. Un médecin doit soigner ses malades. On voit la catastrophe lorsque les charlatans se sont occupés de ses patients. L’histoire est pleine d’exemples concrets de ce genre.

L’écrit émane d’une profonde analyse tandis que le discours instantané, non réfléchi, non étudié nous mènerait tout droit vers la déroute. Je pense qu’ils seraient écoutés s’ils pourraient faire leurs preuves en apportant de solides références et de l’argumentaire fort soutenu.

Comment peut-on produire une élite dans le pays si elle n’est pas organisée et qui est surtout trop muette et invisible. C’est une histoire de coups d’échec et mat. Si aujourd’hui, le coup n’a rien apporté, il peut demain atteindre l’objectif escompté. C’est une question de persévérance et de stratégie. Lorsqu’un qualifié n’apporte pas son regard particulier sur une épreuve qui touche la société, dites-moi : qui est-ce qui pourrait le faire à sa place ?

L’indépendance de l’Algérie n’a pu être réelle que grâce à quelques uns qui avaient à peine le niveau de certificat d’études primaires ou le niveau secondaire. On imagine un peu qu’est ce qu’ils auraient pu accomplir s’ils possédaient en leur temps un niveau supérieur. La France coloniale trouvait en eux un danger permanent car ils savaient lire, écrire et donc raisonner. L’école était pratiquement un interdit pour tous les autochtones. Les adversaires de notre indépendance craignaient plus que tout de l’instruction. Les chiffres de scolarisation de l’époque le prouvent de manière singulière.

Un parent d’un ami m’a affirmé récemment que l’école française ne leur permettait jamais de dépasser le cap de l’école primaire pour ceux qui habitaient les quartiers des indigènes aux périphéries des villes. Les ruraux étaient condamnés à l’analphabétisme. Le collège était un rêve inaccessible. Lorsqu’ils avaient de la chance, c’était la formation professionnelle pour les plus nantis. Quant au reste, c’était la rue qui les accueillait. Ils n’avaient de meilleur choix que d’aller faire leur classe chez Monsieur Guy le forgeron ou chez Monsieur Albert le menuisier du coin (c’est son expression) ! Pour les recalés, le désespoir les poursuivrait. Tandis que pour les illettrés, les colons fermiers les attendaient de pied ferme pour aller travailler la terre dans les champs et les exploiter pour un maigre pain noir et rassis.

En attendant que les consciences actuelles s’arrachent, rêvons un peu d’un sursaut salvateur. Un vœu pieu est toujours du domaine du possible.

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mardi 14 juin 2011

Mais c’est quoi une société civile ?

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« L’utilité commune est le fondement de la société civile.»,
Jean-Jacques Rousseau [1712-1778]
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Depuis le mardi 14 juin et jusqu’au jeudi 16 juin 2011, le CNES (pas le syndicat, il s’agit du Conseil National Economique et Social), a convié pour la première fois depuis son existence en presque 20 ans, les acteurs de la soit disant société civile pour débattre sur plusieurs thèmes, élaborés par ce conseil sans avoir apparemment procédé à des consultations préliminaires avec les concernés. Il aurait peut-être laissé le soin aux participants à cette conférence d’élaborer les axes et élire le bureau de ces travaux. Mais là, c’est une autre histoire.

ÉTATS GÉNÉRAUX

C’est tout un programme que d’avoir choisi le titre d’ « états généraux de la société civile ». Cela veut tout simplement signifier que la société civile est en crise. Il ne s’agit pas ici non seulement d’établir un constat de cette société civile qui n’est que l’ombre d’elle-même mais elle a besoin d’un audit expert pour déceler tous ses maux et établir un diagnostic serein.

Et c’est pour ça, sans doute, que les pouvoirs publics, à travers le CNES, ont convoqué urgemment ce qui en reste de cette société civile, pour voir ce qu’il y a lieu de préconiser pour l’activer comme il se doit en ces moments où nos voisins immédiats bougent brusquement dans toutes les directions. Comment mettre en marche une machine qui est pratiquement toute rouillée ? En quelque sorte, il faut faire le bilan de plus de deux décennies depuis au moins l’ouverture du champ social. Ce n’est pas un mea culpa mais il est absolument nécessaire de faire son autocritique en évitant de traîner les boulets du passé.

Une société civile demande des efforts de tous, surtout y compris des pouvoirs publics qui devraient voir d’un bon œil l’arrivée d’une société civile représentative et non celle qui applaudit à tout rompre ceux qui sont à l’affiche aujourd’hui. De plus, elle a glorifié, à travers un nombre appréciable d’associations, sans retenue aucune tous les carnavals de toutes les « dechrates » et en fermant les yeux sur tous les abus ayant fait mal au pays. L’Algérie dispose quand même de gens intègres, compétents et animés de bonnes volontés qui puissent relever les défis en souffrance dans le pays. L’Algérie, à l’instar des grandes nations, doit miser sur l’émergence d’une authentique société civile pour repartir sur une bonne monture en attendant que les politiques refassent surface sur la scène plus sainement.

LA DÉFINITION

La question qui taraude l’esprit de la majorité des citoyens est également celle qui est posée en titre de ce papier. D’après Wikipédia (*), pour ne pas creuser loin dans les explications, la société civile est le domaine de la vie organisée qui est volontaire, largement autosuffisant et autonome de l'État. Par exemple, une élection est un des événements principaux où la société civile se trouve mobilisée, notamment à travers l'éducation de l'électorat. C'est le corps social, par opposition à la classe politique.

L'UNESCO, comme le précise Wikipédia, entend par société civile, l'auto-organisation de la société en dehors du cadre étatique ou du cadre commercial, c'est-à-dire un ensemble d'organisations ou de groupes constitués de façon plus ou moins formelle et qui n'appartiennent ni à la sphère gouvernementale ni à la sphère commerciale.

Toutefois, note Wikipédia, dans la pratique, ceux-ci n'agissent pas individuellement mais dans le cadre associatif. Une telle association peut être considérée représentative à condition qu'elle ait été constituée sur la base de la volonté et des propres intérêts des citoyens se déclarant formellement et juridiquement membres de l'association.

Wikipédia rajoute encore plus loin que : la société civile regroupe notamment les organisations syndicales et patronales (les "partenaires sociaux"), les organisations non gouvernementales (ONG), les associations professionnelles, les organisations caritatives, les organisations de base, les organisations qui impliquent les citoyens dans la vie locale et municipale, avec une contribution spécifique des églises (chez nous ce sont donc les mosquées) et des communautés religieuses.

Wikipédia conclut que : pour qu'une telle association ou organisation soit en effet une partie active et l'expression de la volonté de citoyens, il s'avère nécessaire que les associations formant la société civile disposent d'une structure et d'une forme d'action intérieure tout à fait démocratiques. Ces nécessités excluent par conséquent des organisations qui ont été constituées par l'État, l'économie ou des églises (il faut donc l’adapter aux mosquées).

Par ailleurs et selon le site d’Agora (**), la société civile, c'est ce qui reste d'une société quand l'État se désengage complètement. En prônant le désengagement de l'État, on prônerait un renouveau ou une réactivation de la société civile. D’autre part, un fonctionnaire entre dans la société civile sitôt qu'il quitte ses bureaux. D’autre part, la solidarité est l’une des caractéristiques d'une société civile vivante, complète le site.

LAQUELLE ?

Où sommes-nous dans toutes ces belles notions ? Faut-il conclure que la définition de tous ces concepts de la société civile soit similaire par rapport à la nôtre ? On peut écrire des dizaines rames de papiers sans trouver effectivement les réponses adéquates.

Y-a-t-il d’abord une société civile ou bien c’est un conglomérat d’agréments qui n’est actionné que lorsque le besoin se fait exprimer par des parties cachées derrière le rideau ? N’est-il pas vrai que chaque fraction dispose de sa propre société civile à travers les organisations qu’elle chapeaute sous le manteau ? N’est-il pas réel qu’à chaque fois qu’une partie occulte a mal à la tête ou veut jouer les trouble-fêtes à la recherche de plus de postes rentiers dans le quota, fait actionner ses partisans se trouvant au sein de cette supposée société civile pour obtenir gain de cause. C’est presque là une forme de chantage qui apparait lorsqu’on s’ingère de façon notoire dans le monde associatif et social. Nous connaissons fort bien ce phénomène à l’université qui pullule à l’intérieur dans les campus en faisant cause et roulant pour leurs parrains et en court-circuitant les problèmes palpables des étudiants, laissés pour compte se débattre dans leur amer quotidien.

Si au niveau national, la société civile fait défaut, au niveau local, c’est le désert. La plupart des autorités locales, pour ne pas dire tous, ne font appel qu’à une certaine catégorie qui s’est fait propulsée « notables de la ville » comme à une certaine époque datant d’avant l’indépendance. Elles ignorent carrément les outils de gouvernance du monde moderne à travers des associations crédibles défendant les généreuses valeurs et les bonnes mœurs. S’ils accordent les autorisations, c’est pour des associations dont les présidents sont malléables à souhait. Rares sont ceux qui passent à travers les mailles du filet. Toute voix discordante qui dérange, est fauchée à la source.

Des pègres locales, sans foi ni loi, entretenues abondamment par la rente, se sont installées dans la durée en devenant les interlocuteurs et représentants privilégiés d’une certaine société civile devant des citoyens désarmés et sans force. Ce n’est pas par hasard que des foyers de tensions n’en finissent pas de se déclarer un peu partout dans le pays sans que l’on puisse trouver les bons remèdes. Ceci démontre bien que les citoyens ne sont pas représentés à travers ces intermédiaires qui ont squatté tous les espaces aidés en cela dans leur besogne par des mains non moins innocentes. Ces endroits ont été usurpés de fait par une sorte de mafia dont la légitimité repose essentiellement sur le pouvoir de l’argent sale et la corruption en général. Lorsqu’on additionne toutes ces aberrations locales, on mesure assez bien l’étendue des dégâts sur le plan national.

LA CRÉDIBILITÉ

Autre question qui s’est forcément posée de manière cruciale pour la commission politique et sans doute pour la commission sociale: est-ce que les différentes associations invitées vont délivrer leur point de vue dans les ateliers de la dite conférence ou bien celui de leurs membres qui vont y participer, voire faire de la figuration ? On ne va rien avancer avant de voir les conclusions de ces trois jours qui décideront de la suite à donner à cette démarche qui est, faut-il quand même le souligner est une première dans le pays. Mais de nombreux légitimes acteurs font défaut. En principe, une telle rencontre ne devrait en premier lieu que déblayer le terrain obstrué par tant d’années d’inactivisme social, d’oublis et d’une hibernation profonde. On doit réfléchir à panser ses blessures afin qu’elle rebondisse en jetant les jalons de nouvelles bases.

En outre, il existe certainement beaucoup d’associations qui n’ont jamais vu le jour par la faute des mécanismes bureaucratiques inimaginables imposés leur mettant les bâtons dans les roues, héritages du passé. Il est facile de vérifier si c’est créer une association est une chose aisée pour s’en apercevoir. Il faut s’attendre à un parcours du combattant mais s’il se trouve que le projet de l’association pourrait embarrasser, ses jours sont comptés. Elle doit être brisée dans son œuf, elle ne resterait qu’une imaginaire idée. C’est pour cela que l’actuelle société civile, qui n’existe que de nom, n’est pas aussi légitime et crédible pour mener un tel débat de son avenir que de nombreux participants à cette conférence l’avaient déjà hypothéqué par leurs antécédentes positions.

Peut-on changer du jour au lendemain les vieilles mentalités par une quelconque baguette magique ? On ne peut retrouver sensationnellement une parole colorée auparavant de la langue de bois pour devenir soudainement audible. Il se peut que beaucoup de membres de la société civile se trouve en dehors des conviés, écartés de facto car ne rentrant pas dans la feuille de route. Il est fort probable que la réelle société civile se trouve déjetée des rouages de l’actuelle société qui discute en ce moment de sa disparition au profit de la première si les choses vont dans la normalité Il se pourrait enfin que le débat soit faussé dès le départ. Attendons la suite des intentions pour mieux apprécier.

LA FORCE TRANQUILLE

La société civile n’est pas une voie de garage, elle n’est pas non plus une maison de retraite. Elle doit être vitale et a besoin d’une nouvelle sève nourricière pour se déployer dans la société.

L’absence d’une société civile énergique manque terriblement au pays surtout lors des crises aigües qu’a connues et qui ne cessent de miner la société. Les faux représentants ont ruiné les espérances d’une jeunesse qui ne croie plus en cette société civile dont la carte est complètement déformée. Une recomposition suivant les règles prescrites des normes des pays émancipés, est plus que souhaitable.

La société civile n’est pas une opposition ni un contre-pouvoir, elle est la conscience qui existe à l’intérieur de la société. Elle est sa force tranquille. Organisée, elle peut faire des merveilles en jouant superbement son rôle. Elle est le guide moral. Elle n’est ni le porte-voix d’un parti ni une charrue ni le bras armé de qui que ce soit. Elle ne doit pas avoir une couleur partisane, ce n’est pas son rôle. Elle doit éclairer le politique pour aller vers le meilleur et le plus utile au peuple et au pays. Elle est présente pour barrer la route à tout aventuriste qui ose lui ôter un seul attribut de ses prérogatives. Une société civile puissante et omniprésente est nécessaire pour un état qui ne serait que renforcé et respecté. Lorsque sa présence est aléatoire, occasionnelle, c’est la déliquescence des institutions et le pays avec qui suivraient la descente infernale vers le bas.

Le problème que l’on doit se poser de manière inquiétante : Possède-t-on réellement une société civile ? Dans l’affirmatif, quel rôle a-t-elle joué jusqu’à aujourd’hui ? C’est vrai que suite à l’ouverture de 1989, l’Algérie avait connu une nuée d’associations dans presque tous les domaines de la vie. Tout le monde avait cru que la santé sociale du pays allait connaître ses jours meilleurs avec cette formidable éclosion. Mais au fil des années et de la crise politique aidant qu’a connue le pays, ces milliers d’associations se sont désagrégés pour ne se montrer que très rarement.

Malheureusement, de nombreuses associations sont devenues des satellites visibles de certains partis ou peut-être avaient-elles été créées dans un objectif succinct. On ne les voyait que lors des campagnes électorales des échéances politiques. La confiance en cette société civile avait alors perdu tout son sens. Ce n’est pas la société civile dont le pays attendait avec ferveur mais c’est juste une multitude de permanences politiques.

Ces jours-ci, les pouvoirs publics ont fait appel, à travers le CNES II pour ouvrir un débat sur cette société civile dont l’implication s’est avérée primordiale dans un pays qui aspire à progresser vers une démocratisation réelle. Mais faut-il aussi procéder au tri dans cette société. Il y a celles qui avaient reçu et bouffé sans limites toutes les aides financières pour devenir une véritable caisse noire à la disposition de parties sans aucun ancrage dans la société. La société civile a besoin d’une épuration sociale et juridique. Le débat auquel participent des milliers d’associations ne peut mener nulle part s’il est dès le début dirigé par des forces nuisibles. Si on ne met en place des outils qui nous permettent de connaître qui fait quoi à l’intérieur de la société, on ne verra jamais l’ascension de la société civile dont l’Algérie a toujours rêvée pour son développement tous domaines confondus.

INTERFÉRENCES DES OPPORTUNISTES DE TOUS GENRES !

Un syndicat qui n’a d’autonomie que de façade ne doit faire partie de cette société civile s’il est sous la coupe d’un parti avec ou sans racines. Il ne doit pas être un relai de cette partie occulte qui est incapable de s’implanter politiquement dans le pays. Il doit être la face réelle de ses adhérents et non celui de gens qui ne peuvent trouver ailleurs souliers à leurs pieds. Le champ politique doit être différent du champ social. Le premier ne doit pas se cacher dans le monde social pour devenir un frein à son émancipation en société civile incontestable.

Les opportunistes, dans ce pays et ils sont tout aussi nombreux, ont aussi coulé cette société civile en s’agrippant de toutes leurs griffes. Ils ont vu là, comme pour les membres ayant des objectifs politiques, une véritable échelle à grimper dans la hiérarchie locale et nationale. N’est-il pas exact que des associations ont été enfantées que dans un but de se rapprocher des autorités et de se mettre à son service au détriment de ses statuts ? On ne peut faire bouger un mouvement selon d’inavoués enjeux mesquins.

C’est vrai que tout le monde peut faire partie d’une association mais on ne doit pas porter deux casquettes lorsqu’on y pénètre dans ce monde. Où tu te tournes, tu les trouves entrain de guetter la moindre occasion, tels des prédateurs guettant la proie promise en haut lieu. Certes, tout militant doit avoir des ambitions, mais elles doivent être claires comme l’eau de source. Les montrer au service de la société n’est point une ambigüité. Escalader la hiérarchie de la manière honnête, c’est sincère comme apparence. Brûler coûte que coûte les étapes par tous les moyens qu’ils soient catholiques ou non, c’est promettre son mouvement à une destruction planifiée.

LES CONSÉQUENCES

Un maire ou un wali peut programmer la dévastation d’arbres en construisant des immeubles s’il ne trouve pas en face de lui des associations de l’environnement organisées et vigilantes. On voit bien dans quel état se portent écologiquement nos cités et nos campagnes. Malgré l’alerte donnée à moult fois, on continue de salir nos cités, devenant une grande poubelle à ciel ouvert. Les associations exerçant dans ce domaine, comme toutes les autres, doivent recevoir toutes les aides pour mettre fin à ce calvaire en sensibilisant les citoyens sur cette dérive écologique.

L’Algérie est aussi devenue un champ d’expérimentation des produits alimentaires importés par des cercles sans vergogne. Les associations de consommateurs sont pratiquement absentes sur le terrain car ne disposant pas de moyens nécessaires pour lutter contre cette mafia de l’informel qui empoisonne le peuple et lamine économiquement le pays. On peut aussi citer les institutions de l’état qui ne sont que l’ombre d’elles-mêmes, désarmées devant ces vampires du gain facile.

Un responsable ne peut pas effacer des milliers d’emplois d’un revers de la main s’il n’a pas en face de lui un syndicat fort de ses adhérents et non celui accouché dans un cadre préfabriqué.

Une société civile, c’est ça. Elle doit être partout assidue. Elle est l’œil attentif du pays pour alerter tout disfonctionnement de

mercredi 8 juin 2011

Réformes : un prêche dans le vide ?

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Article paru sur le Quotidien d'Oran du Jeudi 09 Juin 2011 que vous pouvez consulter également sur les liens suivants:
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Depuis le dernier discours du président de la république du 15 avril 2011 par l’annonce de réformes profondes dans les structures de l’état algérien, bon nombre d’observateurs avertis ont acclamé à chaud l’initiative mais sont restés par la suite sceptiques quant à la manière de conduire le pays vers une seconde république comme l’avaient qualifiée certains.

Déjà au départ la suspicion des antagonistes est grande, autant abolir toutes les entraves qui puissent nuire à la démarche réformatrice. Le concours de tous garantirait le succès d’une aussi grandiose opération dans les textes mais dans les faits, c’est une autre paire de manches.

Il n’est point de l’avenir des individus mais c’est celui du pays et des futures générations qui se trouve en jeu. L’Algérie est en train de gémir, ne la décevons pas une fois de plus. Elle ne pourrait jamais nous pardonner au jugement dernier d’avoir souillé sa terre et hypothéqué son destin.

Le choix de la composante de la commission chargée de mener les discussions et de recueillir les propositions des différentes parties a quelque peu freiné l’ardeur de beaucoup d’acteurs sur la scène nationale en particulier ceux de l’opposition et de différentes personnalités politiques, pourtant ayant fait parties du sérail, qui doutent sur l’aboutissement jusqu’à son terme d’une Algérie nouvelle.

Il aurait été souhaitable de la confier à des personnalités indépendantes organiquement d’un parti politique ou d’une structure étatique, non pas que l’on soit réticent sur l’intégrité de ses actuels membres, mais pour donner un puissant signal à tous les algériens de tous bords. On ne peut pas être juge et partie pour mener à bon port l’Algérie de demain.

Et puis, l’Algérie n’est pas aussi stérile que ça, ni qualitativement ni quantitativement pour avoir produit et marginalisé des compétences dans tous les domaines. Ça y va de sa survie. L’histoire ne nous épargnerait jamais des occasions inouïes qu’on est entrain de gâcher pour le bien être, la prospérité et le développement du pays. Il est temps que l’Algérie soit mise sur de bons rails dans un monde qui est impitoyable pour les faibles et les fragiles.

Si on rajoute à cela les innombrables partis, syndicats, associations et personnalités politiques, conviés par la commission Bensalah, la méfiance vous envahit de nouveau et sème l’incertitude dans votre esprit. A leur vue, vous attrapez aussitôt un froid dans le dos.
En effet, il existe certains partis dont on n’a jamais entendu parler par une quelconque activité, pas une infime déclaration même au moment des derniers bombardements de Ghaza ou une réunion de ses instances depuis des lustres. Voilà qu’ils sont superbement ressuscités au grand dam du peuple ! Ce sont en principe des partis qui auraient été effacés de la scène depuis fort longtemps si les urnes avaient juridiquement joué leur rôle mais au pays des merveilles, ils reviennent costumés, cravatés, pouponnés et apparaissant sur les médias lourds étatiques, flashés tout sourire comme si de rien n’était, lavés de tous soupçons, narguant les téléspectateurs et retrouvant merveilleusement une fictive crédibilité. C’est une véritable violence en plus de celle d’abondantes associations disposant d’une imaginaire légitimité.

D’autre part, des syndicats dont les conseils ou bureaux nationaux n’ont même pas pris la peine de se réunir pour décider du sort à donner à l’invitation. Des congrès de ces mouvements qui ne s’effectuent que rarement dans les règles des statuts et où le bourrage des urnes, hérité des aînés fonctionne à plein temps et les coulisses achevant pompeusement la basse besogne.

Les pouvoirs publics ne reçoivent donc pas l’image concrète du peuple, mais c’est un objet virtuel tronqué qu’ils encaissent en pleine figure. Les relais des citoyens avec les gouvernants sont totalement absents. Si l’intention existe, on peut les chercher là où ils sont cantonnés. Si on est arrivé à cette situation aberrante de la représentativité, les gouvernants ont une grande part de responsabilité mais il n’est jamais trop tard pour bien faire. C’est ici qu’on peut jauger la volonté politique.

Dans le cas d’un fonctionnement statutaire, il fallait aussi préparer, rassembler, ajuster les propositions qui proviendrait de la base. On doute fortement que les adhérents aient été mis au parfum de l’invitation qui sont, à coup sûr, surpris de voir leurs pseudo-représentants pavoiser sur l’écran de la télévision publique le jour de leur réception par la dite commission. Peut-être que leur petit peuple ait été mis au courant par télépathie du gourou et les réunions soient faites par vidéoconférences en usant des nouvelles technologies de l’information ?

Le chef autoproclamé se croit disposer de toutes les prérogatives présumant incarner l’organisation. Ses paroles sont bues machinalement par un entourage restreint. Aucune opposition n’est tolérée. Au point où il confond son âme avec celle du mouvement. Il se croit indétrônable, invulnérable et intouchable à la fois. En quelque sorte, un dédoublement de personnalité. L’invité c’est lui, pas le parti.

Ce sont des petites dictatures qui se sont érigées un peu partout dans tous ces mouvements. Gare à celui qui ose donner un avis contraire qui n’est pas inspiré de la pensée du roitelet. C’est le conseil discipline qui est instrumentalisé pour pallier à toute éventualité. Si notre pays sombre, c’est aussi par la faute de ces petites états qui ont été battis par le mode de scrutin en vigueur. C’est pour cette raison que les dissidences ne sont pas rares dans ce milieu, elles sont légions et c’est l’éclatement garanti.

Quel que soit le nombre des invités aux consultations, on ne pourrait jamais toucher convenablement le peuple si les délégués ne sont point inspirés de sa seule détermination. C’est une situation opaque à laquelle seront confrontés les pouvoirs publics, ils ne verront que du feu, du vécu du peuple, le visible est ailleurs. C’est une autre usurpation de la volonté populaire qui ne dit pas son nom.

Ce n’est aucunement de cette manière que les réformes peuvent aller loin piocher dans la profondeur des choses. On a la crainte que la prescription du pouvoir si elle existe réellement ne soit qu’une illusion de plus. Il faut descendre sur le terrain pour voir ce que désire le peuple, le comprendre, l’écouter en le laissant s’exprimer librement et donner libre cours à toutes ses suggestions. Rappelons-nous, personne n’avait rien vu voir surgir les dernières émeutes de janvier dernier car on mésestime franchement tout de ce peuple, de sa jeunesse et de ses profondes aspirations. Le pays l’avait échappé belle. Cette fois-ci, c’est la rente pétrolière qui a sauvé les meubles mais jusqu’à quand ce dilemme ?

Ainsi, la plupart des invités par la commission Bensalah ne va participer que pour livrer son point de vue personnel qui diffère assurément de ceux qu’ils sont censés les représenter si le débat démocratique avait creusé son chemin au sein des structures partisanes. C’est l’avis du chef qui compte, celui de ses militants importe peu. Les pouvoirs publics sont ainsi aveuglés par ces associations qui au lieu de jouer leur rôle de relai et de courroie de transmission vis-à-vis du peuple, ils prônent plutôt un rôle inverse, néfaste, dévastateur qui se répercute de la manière la plus désastreuse sur le pays. La majorité de ces groupes est, au contraire, devenue un obstacle, un poids et un fardeau pour le pays et de ses habitants, que ce soit moralement ou financièrement.

Cela ne signifie en rien que les parties qui ont décliné l’invitation l’ont fait de manière démocratique, c’est toujours la tête qui décide du sort à donner à toutes propositions. C’est celui du porte-parole éternel qui divague en exhortant ses propres désirs. Il est le guide suprême jusqu’à sa disparition. Le malheur du pays continue. Nos institutions sont défaillantes à tout point de vue. Si on se trouve en ce moment au pied du mur, c’est aussi par des erreurs d’appréciation de ce type de représentativité qui noie le bon grain de l’ivraie.

On aurait souhaité un engouement fort parmi la population à travers les diverses associations et un débat national mais c’est le contraire auquel on assiste où les citoyens ne semblent captivés par des enjeux concernant l’avenir du pays. C’est comme si on prêche dans un terrible vide où les voix d’en bas sont inaudibles. Cela n’augure en rien de bon pour le futur proche.

Il faut susciter des indices très solides pour amener la population à y croire à un probable changement. Les nouvelles républiques ne peuvent naître du néant. L’avènement d’une seconde république doit s’annoncer avec solennité et non avortée comme les choses se présentent actuellement à moins d’un sursaut salutaire des autorités avant qu’il ne soit trop tard.

Si on regarde de plus près leurs statuts, ces associations n’existent plus au regard de la loi. Aucune énergie n’est déployée sur le terrain, ni réunions, ni conseils nationaux, ni bureaux exécutifs, ni bilans moraux et financiers. Ce ne sont que quelques personnes qui gèlent le cachet et les clés d’un siège national dont les portes sont closes à double tour depuis la nuit des temps. Des associations qui surgissent miraculeusement les jours des campagnes électorales et qui servent juste de paravent en pariant à toutes éventualités en garnissant les sièges lors des meetings de leurs parrains au moment où les caisses de la mamelle républicaine regorgent d’oseille à craquer.

Il vaut mieux sans aucun doute pour les gouvernants d’aller chercher au sein de la base un échantillon représentatif d’un millier d’algériens identiquement comme on procède dans les sondages dans les pays développés pour mieux savoir exactement de ce que veut ce peuple pour sauver le pays d’un naufrage à l’heure où nos frontières vibrent plus que jamais au son des insurgés et au rythme des bottes de l’OTAN.

Ce n’est pas une histoire de divertissement devant les caméras de la télévision, il s’agit de retrouver la légitimité dont doit découler naturellement la crédibilité. On ne mesure pas assez que notre pays peut être la convoitise de beaucoup d’affamés prédateurs venus de l’Europe et de l’Amérique du nord à la recherche de richesses pour leurs enfants. L’histoire libyenne est là présente devant nous pour nous faire sursauter, elle s’écrit tragiquement sous les bombardements et le sang de ses enfants. On ne peut pas se permettre de continuer à affirmer éternellement que l’Algérie ne ressemble pas à la Tunisie, l’Egypte ou la Libye mais si on réfléchit un tout petit peu, on peut distinguer que nous sommes un concentré de tous ces pays.

L’Algérie demeure le seul pays arabe pétrolier qui n’est pas sous la coupe de l’OTAN et qui dispose de la plus grande superficie de l’Afrique après la scission planifiée du Soudan. N’allons pas prouver que les puissances de ce monde aillent respecter nos frontières si nous jouons avec le feu en se jetant dans la gueule du loup ?

Il suffit que quelqu’un fasse un signe de détresse quelque part par désespérance pour que les donneurs de leçons d’outre-mer en droits de l’homme accourent de tous les côtés afin de s’installer dans la durée dans nos contrées. A nous d’êtres intelligents et moins orgueilleux entre-nous, en évitant ce scénario catastrophe, en optant pour de sérieuses réformes et surtout se réconcilier d’abord avec nous-mêmes, tout l’honneur reviendrait aux précurseurs de ce mythique projet. Nous avons chèrement payé notre indépendance pour l’égarer en l’offrant sur un plateau en or aux nouveaux colons par des stratégies erronées et des conseils aux antipodes de la réalité.

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mercredi 1 juin 2011

Soudain, elle surgirait de nulle part…

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Article paru sur le Quotidien d'Oran du Jeudi 21 Avril 2011 que vous pouvez consulter également sur les liens suivants:
- en format pdf: http://fr.calameo.com/read/00037044670ee5ee0adf2
- en format pdf zippé: http://www.lequotidien-oran.com/pdfs/02062011.zip
- en format html:http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5153848

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Lorsqu’on atteint un certain âge dans notre pays, le seul endroit où se rencontrent le plus souvent les quinquagénaires et plus, demeure sans contexte le cimetière. Il ne se passe pas un jour sans que l’on n’apprenne la disparition d’un compagnon, d’un proche ou d’un ami.

Pour certains, c’est lors de ces solennels cérémonials que l’on croise les gens perdus de vue depuis assez fort longtemps. C’est devenu presque un rituel qui se répète à l’infini. Ce sont des allers-retours avec d’incessantes processions. C’est ce qui se déroule en assistant aux obsèques d’un collègue rappelé à Dieu la veille d’une mort subite à l’âge d’à peine au dessus de la cinquantaine. Comptez autour de vous les êtres de votre connaissance qui ne sont plus de ce monde. Vous vous rendez compte qu’une ancienne génération est train de faire ses adieux, qu’une autre est sur le point de la remplacer et qu’une troisième naît telle une fleur qui hume les premières lueurs du jour.

De nombreux amis sont emportés par la fossoyeuse à cet âge et parfois beaucoup plus jeunes. On est bouleversé et abasourdi par la mauvaise nouvelle mais la réalité est présente, pour nous rappeler que l’on est juste là pour assurer le lien de la continuité. Que l’on doit un jour ou l’autre, peu importe notre volonté, quitter ce monde fictif pour certains, pas assez durable pour d’autres. Le choc est là, on est ébranlé, on commence à marquer le pas. Notre tour surgirait tôt ou tard quelles que soient les circonstances et l’instant. Le moment ne serait jamais choisi, il peut être brutal ou en douceur.

En abordant des amis dont on n’a pas croisés les visages depuis plus d’une décennie, on se rend effectivement compte que l’érosion est passée pas là, en affaiblissant, par la maladie rampante, celui qui estime être le plus intouchable. Tu as l’impression de revivre le temps mais à l’envers. Tous les antécédents évènements vécus, défilent dans votre tête à une vitesse vertigineuse. Le coin consacré à cela dans votre cerveau est considérablement éprouvé. Il est difficile d’imaginer avant de s’en apercevoir clairement le coup de vieux qui a peint en blanc pratiquement tous les collègues et amis égarés de votre champ depuis des lustres.

Le mal se déclenche de partout en vous prenant le dessus et la souffrance commence à vous envahir de tous les côtés. Les médicaments vous calment pour quelques temps les douleurs mais servent juste à retarder l’avancée infernale et silencieuse du péril. Vos cheveux sont devenus teintés en gris souris ou bien c’est la calvitie qui vous dégarnit le crâne pour ne laisser parfois que quelques bribes isolées, éparpillées ici et là et laissées au bon souvenir de votre jeunesse détériorée.

Après les émotions des premiers instants, vous vous rendez compte que les collègues, eux aussi, vous découvrent étonnamment, d’un air ébahi par le poids de l’âge qui vous déforme de l’extérieur et vous ronge de l’intérieur. C’est ainsi qu’est faite la vie, vous diront les plus croyants. Les nostalgiques regretteront toujours le bon vieux temps comme si celui-ci pourrait s’arrêter et vous faire remonter illusoirement aux moments de votre enfance. Généralement, c’est à votre adolescence que l’on désire tous y revenir, mais le temps ne peut faire marche arrière. Il ne peut se compter négativement. Il est impitoyable avec tout le monde qui filtre entre ses mains. Il est redoutable, il ne fait aucune concession pour les bons comme pour les mauvais. Il n’attend que le moment écrit pour vous entraîner vers le sort qui vous est réservé.

Avoir vingt ans, c’est l’âge où tous les rêves sont permis, où tous les espoirs sont fondés mais le facteur temps a fait son extraordinaire effet. Il est impossible d’y rester. Les rides sont apparues et les jambes commencent à trahir votre démarche. C’est la course effrénée pour reconquérir votre forme d’antan. On recherche par tous les moyens à revenir à vos moments d’insouciance mais trop tard, vous avez déjà atteint le sommet et le compte à rebours est inéluctablement enclenché. La pesanteur due à la descente vous envoie terriblement dans le vide et plus rapidement vers le bas.

Au bout, c’est l’au-delà qui vous attend. Vous ne pouvez pas y échapper quels que soient votre statut et votre renommée. Que vous avez été roi, président, chômeur, pauvre, riche ou pdg, vous y trépasseriez. Chaque personne y passerait par là, des plus petits jusqu’aux plus grands, des nantis aux fortunés. C’est le chemin obligatoire pour tous les humains. Aucun être ne serait épargné. Le trépas ne lâcherait aucun individu qui espérait vivre au-delà des cents ans. Les plus faibles sont parfois les moins éloignés mais rien n’est prévisible avec la faucheuse. Elle peut ôter la vie à celui qui pense être le moins probable.

Le destin vous attendrait toujours au tournant. Il guette tranquillement l’heure de votre fin pour vous envoyer dans l’autre monde sans le moindre possible retour, le plus définitif où seul compteraient vos bienfaits dans ce bas-monde qui ne serait en dernier ressort qu’un furtif passage pour préparer l’irrévocable.

On a tendance à oublier vite ces instants imminents mais la lourdeur des années et la constatation de ses amis, hier vivants, aujourd’hui enterrés vous rappelleront toujours à l’ordre. Vous n’êtes pas loin de la fin. Soudain, elle surgirait de nulle part. Votre dernier souhait à exaucer est de vivre les derniers instants entourés des siens pour se parler mutuellement et s’excuser. Chaque mot et chaque phrase sont transcrits à jamais.

En moins de vingt quatre heures, vous seriez sous terre pour de bon. Vous serez seul à regretter le temps perdu parfois pour rien et ne pas marquer votre court passage dans cette vie qui ne dure qu’un temps très court par rapport à l’humanité, comparé aux habitants qui nous ont précédés depuis des millions d’années.

Après l’accomplissement de la prière sur votre corps et le départ de vos accompagnateurs à votre dernière demeure, c’est juste quelques mottes de terre jetées à la va-vite sur votre tombe en moins d’un quart d’heure pour faire pointer l’endroit par quelques pierres, arrosé d’un jerrican d’eau où vous seriez ensevelis pour l’éternité.

Le lendemain, la vie reprend le plus normalement son cours pour faire gratter les images du jour d’avant. On viendrait se recueillir sur vous fréquemment les premiers jours pour vous accompagner puis hebdomadairement les vendredis. Ensuite, les visites s’allongent, s’étirent pour ne devenir qu’occasionnellement les jours de l’aïd, puis plus rien.

En moins de quelques jours, le deuil est estompé de la mémoire des restants jusqu’au prochain. Ainsi va la vie, c’est un sempiternel recommencement. Demain et après demain, on évoquerait vos souvenirs et vos photos seront agrandis, mis dans des cadres et collés au mur pour ne plus bouger. Vous resteriez perpétuellement figés, vous n’êtes plus qu’une image sans âme devenue une icône pour les survivants et l’annonce de votre décès amplifiée en page de nécrologie d’un journal. Vous feriez désormais partie de la légende de la famille et des amis.

On parlerait de vous dorénavant au passé après avoir vécu au présent durant au moins deux générations si ce n’est beaucoup moins. Le futur ne vous concerne plus. Tout juste après, une première commémoration avec une pierre tombale plantée au dessus de vous et où seront inscrits vos noms et prénoms, vos dates de naissance et de décès, précédés d’un verset coranique, mais qui seront vite abimés par le climat qui va régner. Le vent, la pluie, le chaud, le froid et les saisons scelleront à jamais les séquelles qu’ils vont graver.

En moins de cinquante ans et voilà vos traces complètement gommées de cette vie qui a vu des milliards d’êtres humains dérouler. Dans peu de temps, vous ne serez qu’un lointain souvenir de cette terre qui a vu transiter des prophètes, des pharaons, des phéniciens, des babyloniens, des romains jusqu’à une période très lointaine, les hommes de l’âge de la pierre, d’Adam et Eve ou celle plus récente des colonisateurs de notre pays. Seuls subsisteraient encore leurs vestiges mais pour combien de temps ? Rien n’est immortel, tout a un début et un terme. C’est ainsi le sens de la vie.
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