mercredi 10 avril 2013

L’exil de la maladie


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Article à paraître dans les colonnes du Quotidien d'Oran du Jeudi 11 Avril 2013 que vous pouvez consulter également sur les liens suivants:
- en format html:http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5181604
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Lorsqu’un citoyen décide d’aller vivre sous d’autres cieux plus cléments, il le fait pour plusieurs raisons. La première cause du flux migratoire arrive lorsque son pays connait des instabilités politiques dues par exemple à une guerre face à un antagoniste extérieur ou lors d’une guerre civile qui voit le territoire se vider de ses habitants.

En temps de paix, il le fait aussi le plus souvent pour des arguments économiques quand il ne trouve pas l’emploi approprié chez lui. Soit il le fait pour une cause politique lorsqu’il ne peut pas s’exprimer démocratiquement dans son pays et s’étouffer à en souffrir. Soit il opte pour la solution scientifique lorsqu’il possède certaines compétences dont il ne peut nullement les faire valoir dans son milieu. Il peut aussi faire le grand saut lorsque son pays n’arrive pas à décoller et trainer inlassablement dans les profondeurs des divers classements mondiaux allant de l’éducation à la mal-vie en passant par la corruption et les droits humains.

A ces faits s’ajoute une autre raison non moins visible qui ait pris des propensions alarmantes ces dernières années qu’est la maladie. Lorsqu’un de ses membres est atteint d’une maladie grave ou chronique, sa famille cherche par tous les moyens à le faire évacuer vers une destination où la médecine est avancée pour le faire soigner.  On court dans tous les sens pour espérer obtenir cette fameuse prise en charge à l’étranger mais en vain. Il faut avoir un bon tuyau et des bras longs pour espérer l’acquérir. Selon la vox-populi, il existe des personnes qui l’obtiennent à la célérité de la lumière sous le manteau ou ostentatoirement pour un moindre mal à soigner chez le premier médecin du quartier. 

On assiste malencontreusement sous nos yeux et là personne ne pourrait le nier à des soins à double sens dans une Algérie indépendante quoique la loi fondamentale prône l’égalité. On a remarqué sur les journaux ou sur les réseaux sociaux ces familles de malades qui font appel désespérément aux âmes bienfaisantes pour les aider à se faire soigner dans un hôpital étranger faute de mieux en Algérie. On en pleure lorsqu’on voit où se trouve l’état de la santé dans le pays pour lequel l’état a misé mais cinquante années plus tard après l’indépendance, nos hôpitaux sont dans un besoin critique de plus en plus en manque accru de matériels, de médicaments et d’un personnel à la hauteur ou à recycler.

Le développement et la prospérité d’un pays se mesure par ses trois fondements essentiels, à savoir son éducation, sa justice et sa santé. Si un domaine parmi ces socles lui manque, le déclin est plus que garanti. Pourquoi alors untel citoyen privilégié pourrait bénéficier de soins à l’étranger mais aucunement le même citoyen atteint de la même souffrance ne l’est-il pas si ce n’est alors une injustice caractérisée ? Personne ne pourrait démentir les avancées de ces domaines mais le pays est encore très loin de concourir ne serait-ce parmi les pays émergents malgré le dopage flagrant de la rente pétrolière.

Certes, les moyens n’ont pas manqué mais c’est cette question de gouvernance et en conséquence cette gestion chaotique qui se pose et qui perdure en freinant le développement du pays. Même si l’on possède l’une des meilleures rentrées en fortes devises des pays du sud de la planète, on ne peut mieux les gérer si l’organisation, les aptitudes manquent cruellement en plus de la légitimité qui fait défaut sans oublier cette corruption qui fait un grand ravage dans le pays avec ces milliards de dollars qui se volatilisent par ces intermédiaires fils à papa qui nous sont imposés malgré que nous cohabitons sous le toit d’une république.

L’affaire Cahuzac qui est en train de défrayer la chronique outre-mer ne paraît même pas comme un simple fait divers chez soi, une petite affaire dérisoire dans une contrée de la taille d’un village dans le pays. Pourtant, il ne s’agit là que d’un compte privé ouvert en Suisse de 600 000 Euros par ce ministre, l’équivalent en moyenne de 3 projets ANSEJ de chez nous avec environ 6 unités au total, 6 « Mchahits » dans le nouveau jargon de ces nouveaux arrivistes hommes d’affaires. De quoi en faire sourire ces pourfendeurs de cette génération des temps modernes. Au nord, on parle de moralisation de la vie politique, ici on est encore loin du compte où le slogan de la « Chkara » a encore de longues années à sévir.

Pour revenir à notre sujet d’aujourd’hui, lorsqu’on a sous la responsabilité un enfant handicapé à 100% et un second qui commence à donner des signes inquiétants des symptômes de son aîné comme l’est mon cher ami Abdelkrim, le père de cette famille dont le sort s’est jeté, l’affolement prenne logiquement le dessus. On s’agite à droite et à gauche pour une éventuelle prise en charge à l’étranger mais à la fin très déçu, on décide de se sacrifier pour eux quitte à changer carrément de vie, à vendre tout ce qu’on peut ramasser comme biens, à se faire endetter auprès des siens si nécessaire, à échanger tout son capital contre des devises, obtenir un rendez-vous dans un hôpital européen et attendre nerveusement son visa. Une fois acquis, c’est le départ précipité vers l’aventure dans la première ville en France qui se pointe à l’horizon.

L’hôtel, la solidarité de la famille émigrée ou des amis résidant à l’étranger peuvent vous supporter seulement pour quelques temps mais pas assez avec deux handicapés sous le toit. Imaginez le calvaire qu’allait subir cette famille qui ressemble à des centaines d’autres foyers dans le même cas qui vivent en silence leur supplice sans aucune aide psychologique. Heureusement qu’il se trouve tous ces bénévoles qui activent sur le terrain. De l’étranger où on a atterri, on continue de solliciter par écrit l’aide du ministre de tutelle de son pays mais il ne faut pas s’attendre à un miracle d’une réponse qui ne viendrait jamais, même pas un message de soutien. Je me rappelle de cette anecdote qui avait le tour des chaumières avec cette réponse d’Obama à un citoyen algérien qui l’ait sollicité et qui avait fait fureur dans les médias. On a d’autres chats à fouetter chez Monsieur le ministre, ce ne sont pas aux citoyens qu’il doit rendre compte faute de ne pas les avoir assistés.

Heureusement que dans le pays où il est parvenu, il se trouve des gens généreux, humanistes et des rencontres miraculeuses qui l’ont aidé à traverser cette mauvaise passe. Les âmes charitables sont partout et les bons cœurs existent toujours sur cette terre. C’est une autre vie qui commence avec ses enfants handicapés qui sont pleinement pris en charge par des spécialistes avec des moyens matériels qui leur facilitent les multitudes tâches de la vie. « C’est l'importance de l'encadrement et le suivi de l’évolution de la maladie par les médecins tout en essayant d'apporter le meilleur confort possible aux enfants handicapés qui nous ont attirés vers ce pays » souligne Abdelkrim.

L’handicapé doit aussi avoir sa pleine place au sein de la société. Un handicapé a aussi droit à la vie. Est-ce dans notre pays, il peut se prendre en charge tout seul dans la rue où il peut monter et descendre un trottoir sans difficulté ? Est-ce qu’il peut accéder aisément à une administration sans aucune aide d’autrui, aller faire ses courses en solo ou conduire sa voiture aménagée ? Est-ce qu’il peut faire ses études dans une école, ou dans une université et être accueilli dans une cité universitaire conforme aux vœux des handicapés ? La journée de l’handicapé n’est pas seulement une journée à célébrer et l’oubli le restant des jours de l’année.

Un handicapé doit être vu par la société comme un être humain pleinement citoyen et non considéré comme un fardeau à supporter. Il faut que le regard de la société change à son vis-à-vis de certains des citoyens. N’est-il pas vrai que certaines familles continuent à cacher l’handicap des leurs comme une honte, voire comme un déshonneur ? C’est terrible ce que doivent subir ces handicapés devant cet affront, d’abord par leur environnement immédiat avant celui de la société dans sa totalité. La sensibilisation de tous est primordiale pour faire sortir nos handicapés à la lumière du jour.

Heureusement qu’il existe dans le pays des associations qui se battent pour cette frange non moins négligeable comme par exemple celle de « Imad » la Relizanaise qui ait ramené des chaises roulantes de l’étranger le mois dernier pour soulager un tant soit peu les enfants restés dans la ville dont leur entourage en endure énormément. Ce geste ne solutionne point toutes leurs difficultés journalières mais leur apporte un soutien moral et matériel indéniables dans l’espoir d’être utiles à leur pays.

Quant à mon ami Abdelkrim et sa dévouée épouse, mère d’une grande valeur, ils sont soulagés de voir leurs enfants grandir, s’émanciper sous leurs yeux, être tout le temps conseillés sur leurs devenirs tout en abordant leur vie comme elle vient. Pour ceux qui ont choisi de vivre avec leurs enfants, ces derniers sont pris en charge en journée dans des centres spécialisés qui viennent les chercher le matin et les ramener le soir dans des véhicules pourvus de toutes les nécessités, aidés en cela d’un personnel adéquat pour soulager quelque peu les familles tout en participant à leur insertion dans la société.

C’est Dieu qui leur a donné ces enfants et leur destin en dépend fortement.  L’essentiel est de retrouver une vie normale où le handicap peut être aussi une fortune et non pas vécu comme une fatalité. Nous souhaitons un bon courage à ces nombreuses familles auxquelles nous rendons un grand hommage pour leur dévouement à cette noble cause et dont la présence en leur sein d’handicapés ait changé complètement la tournure de leur vie.

Quant à mon ami Abdelkrim, de son lointain exil forcé, il continue de chérir son pays l’Algérie malgré qu’il soit à l’abri dans le pays d’accueil sauf  la privation de sa terre natale, des siens et de ses amis. Il se pose la question pourquoi pas nous, nous ne soyons pas ainsi ? vivre tranquillement dans son pays, bien considérés et bien soignés. Est-ce que nous ne sommes pas nés un peu plus tôt ? Il soupire amèrement que son pays pourrait peut-être enfanter un jour des gouvernants à la hauteur de la grandeur du pays et aux énormes sacrifices de nos martyrs, qui penseraient d’abord aux intérêts du pays avant les leurs, de servir d’abord les citoyens avant leur sphère et leurs progénitures.
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