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Article à paraître dans les colonnes du Quotidien d'Oran du Jeudi 23 Mai 2013 que vous pouvez consulter également sur les liens suivants:
- en format pdf:http://fr.calameo.com/read/00037044615a4bec08171
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Ça y
est, chers lecteurs, mon fils lycéen de première année secondaire est en
vacances d’été mais malheureusement en plein milieu du printemps ! Il est
au repos depuis exactement le jeudi 16 mai à l’issue des compositions du
dernier trimestre expédiées à la célérité de la lumière en cinq jours. En un
quart de tour, la plupart des lycées du pays se sont donc vidés de leurs élèves
tous niveaux confondus au grand dam des parents et à la grande satisfaction des
responsables qui vont empiler une fois de plus une nouvelle belle couche, comme
c’est la tradition, en mettant l’accent sur la totale réussite dont le grand
mérite revient aux réformes entreprises et en poussant, comme c’est la coutume
habituelle, la caricature jusqu’à nous ressasser sans cesse les progrès légendaires
de l’école algérienne.
Quant
à ces milliers d’associations de parents d’élèves, elles rasent les murs au
moment où on a besoin de leur présence, en jouant parfaitement le rôle du mort.
Elles ne réapparaissent pour la majorité d’entre-elles que lors des grandes
occasions avec costumes et cravates aux cérémonies de distribution des prix aux
côtés des responsables en vantant à tout-va les vacances tant méritées après
une dure année de labeur. En tous les cas, je ne me rappelle pas avoir reçu en
tant que parent d’élève la moindre invitation depuis une assez bonne décennie à
y assister à leurs assemblées générales comme le dictent clairement tous les
statuts. C’est comme si on voudrait éviter les observations et les remarques
désobligeantes des parents et où tout doit être peint en rose. D’ailleurs on ignore
comment leurs bureaux se sont-ils renouvelés en l’absence des parents si ce
n’est en catimini avec une sélection en amont ou comment se sont-elles mises en
conformité avec la nouvelle loi sur les associations ?
Pourtant
sur le portail internet du ministère de l’intérieur [1], leur nombre, à la date du 31 décembre 2011, est exactement de
14891 sur tout le territoire national juste derrière les associations
religieuses et sportives, soit aux alentours de 16 % sur le total des
associations locales agréées. Mais leur silence est très pesant et suspect en
même temps. Le doute vous envahit en ne sachant pas si elles militent pour
l’intérêt et la progression des élèves ou pour leur régression. On devrait
plutôt distribuer des blâmes à notre école en s’interrogeant si on avance comme
on nous le miroite ou si on recule comme le montre cruellement la réalité sur
le terrain.
Cela
fait marrer quand on lit sur les colonnes des médias que le ministère de
l’éducation met en garde les établissements
scolaires contre l’avancement des dates des examens de fin d’année en fixant
même le 19 mai comme la date limite inférieure du début des compositions pour
tous les établissements. Cela constitue un véritable affront que de ne pas se
soumettre aux directives du ministère. Personne ne sait pas si ces catastrophes
pédagogiques sont signalées par les académies à leur tutelle car on n’a aucun
écho de ces dérives ni à la une de l’Entv ou dans la presse écrite ni sur les
sanctions promises à l’encontre des fautifs, comme s’il s’agissait de faits isolés. Cela démontre de façon la plus flagrante que
les choses sont gérées au jour le jour sans aucune programmation. La politique
du court terme continue inlassablement son chemin.
Plus
on s’en débarrasse des élèves et plus on est tranquille semble la solution
idoine pour ces « éducateurs » des temps nouveaux qui n’hésitent pas
à enfoncer encore plus l’école algérienne. Comme la prochaine rentrée des
classes se ferait vraisemblablement le dimanche 8 ou le 15 septembre et tout en
connaissant le fonctionnement et les
traditions néfastes sur l’école algérienne, les cours ne vont certainement débuter
« douga douga » qu’une grosse semaine plus tard. Si on fait les
comptes, mon fils va prendre au moins 4 mois de vacances ! Le trimestre d’enseignement se réduit fatalement
au moins de sa moitié.
Puisqu’on
a l’habitude pour des raisons historiques de regarder au nord vers la France,
allons voir ce qui se fait chez elle en visitant le site de son ministère de
l’éducation [2]. On découvre qu’on
ne parle nullement de rentrée des vacances et départ en vacances mais de
reprise et de fin des cours. Pour cette année, la fin des cours est
programmée pour le samedi 6 juillet alors que la reprise des cours est fixée
pour le lundi 3 septembre. C.-à-d. plus d’un mois et demi après les
nôtres ! Le même site gouvernemental précise que les élèves qui n'ont pas cours le samedi 6 juillet sont en
congés la veille mais après avoir assisté aux ultimes cours. On enregistre
également que le ministère de ce pays se préoccupe de l’insignifiant rattrapage
d’une négligeable demi-journée de cours. On discerne clairement que
contrairement à notre système éducatif, c’est l’acquisition du savoir qui prime
en premier lieu. Les cours reprennent après les examens tandis que chez nous,
ils sont significatifs de départ en vacances. Chez soi, on pense d’abord aux
notes et exclusivement aux notes sans ne se soucier guère des connaissances
acquises tronquées de leur incontestable sève.
Je ne voudrais pas être déçu davantage en soulignant
que dans le pays, on continue de discourir, sans aucun état d’âme, du seuil des
cours effectués, la fameuse « 3ataba » [3] qui est devenue une équation
incontournable dans le système éducatif algérien et sans doute le mot-clé le
plus cité parmi les élèves de terminales et les responsables du secteur en chaque
fin d’année scolaire. Soulignons qu’en France, qui notons-le au passage n’est
d’ailleurs pas une référence en la matière comparativement aux pays
scandinaves, les épreuves du baccalauréat ne débuteront que 15 jours plus tard
par rapport au nôtre. Il n’est question, chez eux, ni de « 3ataba »
ni d’objectifs non atteints. Tout est programmé pour assurer tous les
enseignements préparés par les experts de l’éducation. Par ailleurs, on ne peut que se poser la question sur les
réels pourcentages des autres programmes qui n’ont pas été achevés depuis la
nuit des temps surtout lorsqu’on sait que les élèves des premières et secondes
années secondaires ont déjà été lâchés dans la nature. On continue la descente vertigineuse
aux enfers.
Tous
ces programmes inachevés au lycée ramènent à l’université des flots d’étudiants
avec énormément de lacunes où un étudiant de première année scientifiques ne
saurait résoudre une simple intégrale. Il n’est nullement question ici
d’imputer ces déficiences aux étudiants mais au système qui s’est érigé en
maître absolu qui ne permet aucune opposition. La responsabilité est absolument
partagée par tous les acteurs du secteur. Et l’accumulation des insuffisances s’entasse
davantage pour le pauvre étudiant dont le niveau baisse infernalement. Au lieu
que le nivellement des compétences se fasse par le haut, c’est dommage qu’il
n’arrête de s’accrocher vers le bas.
Au
fait pour la meilleure université du pays, les cours du premier semestre ne débuteraient
que vers mi ou fin octobre, au moins pire vers mi-novembre nonobstant les cités
universitaires qui n’ouvrent généralement leurs portes que vers la mi-octobre
et les restos universitaires bien plus tard.
Pour
ceux qui ne le savent pas, le cursus du LMD prévoit un semestre de 15 semaines
de cours et une semaine consacrée aux examens. Faites le compte et vous verrez
que jamais au grand jamais l’enseignement supérieur ne pourrait assurer cette
norme pédagogique dans les conditions de gestions actuelles. Si l’on arrive déjà
aux deux tiers des programmes, on ne peut que se féliciter de la prouesse
réalisée. On va donc naturellement chevaucher sur le second semestre sans
omettre de signaler la semaine bloquée des examens de rattrapage du premier
semestre qui ne vont pas se faire à la fin des journées des cours mais vont
s’effectuer en lieu et place des séances de ce malmené deuxième semestre.
Ah !
Cette sacrée semaine bloquée qui est une merveilleuse trouvaille de
l’université algérienne où les étudiants revendiquent même à suspendre les
cours durant la semaine d’avant pour partir se préparer chez eux. Une fois les
examens finis, nos étudiants repartent une nouvelle fois chez eux pour une
autre semaine d’après pour cette fois-ci le repos du guerrier. Et voilà 3
semaines qui partent en fumée pour un crime pédagogique qui dit son nom et dont
on évite de le voir ici bas et là-haut en le voilant de chiffres dont on ne
sait d’où ils ont été coulés. On ne peut omettre, puisqu’on y est en pleine désinvolture,
qu’avant les jours fériés, les étudiants partent plusieurs jours à l’avance et ne
reprennent les cours qu’avec plusieurs jours de retard, fêtes obligent !
Pauvre
second semestre qui va encore être malmené pédagogiquement. Le record, au
meilleur des cas, des 10 semaines du premier semestre va être entièrement revu
à la baisse mais avec à la clé des rapports satisfaisants et des félicitations
de tous genres qui vont pleuvoir sur ces responsables à vous donner le vertige
s’il s’agissait de l’université du pays ou bien de son sosie virtuel. Je
terminerais ce paragraphe par citer le cri de douleur pédagogique qui m’a été
adressé, en ce 15 mai, par le mail de mon compère Ali Derbala,
enseignant-chercheur à l’université de Blida dont ses prolifiques contributions
sur l’état de notre université ne sont plus à démontrer. Dans son message, il
démontre magistralement comment, en tant que mathématicien de son état, un
semestre s’est-il transformé allègrement en bimestre voir dans certains imprévus
en un peu plus d’un mois d’enseignements !
Et
puis on ne peut oublier non plus ces pseudos-enseignants qui sautent des cours sans
chercher à les rattraper avec une douteuse conscience professionnelle due à
leurs rangs et qui laisse à désirer. C’est un autre problème sur lequel cette
contribution serait insuffisante pour s’étaler sur le sujet si l’on veut crever
un autre abcès. Comme cela ne dérange nullement les étudiants concernés, la
médiocrité creuse davantage son lit dans ces conditions anti-pédagogiques. Tout
le monde fait semblant que tout marche à merveille mais au fond de soi-même on
sait que rien ne va plus. Sauf que c’estle courage qui nous manque cruellement
de se regarder la face devant un miroir plan et faire en toute sincérité et en
toute objectivité le bilan si l’on veut le méditer. La boule de neige a tout
emporté sur son passage. Que faire devant ce déluge ? C’est toute la
question qui demeure jusque là sans réponse. Personne ne pourrait prévoir la
fin du cauchemar sauf si on se réveille de notre profonde léthargie.
Lorsqu’on
sait que les amphithéâtres et les salles de travaux dirigés de nos universités
commencent à se désemplir vers 15h pour ne trouver le moindre chat qui rôde à
partir de 16h, on ne peut que mesurer l’écart qui est train de se creuser non
seulement avec les pays du nord mais avec nos voisins les plus immédiats
surtout en terme de qualité. Certes, on a produit de la quantité mais si on la
comprime, on ne peut différencier le bon grain de l’ivraie. En France, et à
titre de comparaison, il existe des cours qui ne se terminent que tard dans la
soirée vers 19h30 tandis que les bibliothèques universitaires restent ouvertes
mêmes au-delà de ces horaires administratifs. Allez-y savoir à quelles heures
nos bibliothèques verrouillent à double-tour leurs portes.
En
ce qui concerne les associations estudiantines, en dépit de leur nombre qui
frôle l’inimaginable et qui gravitent autour des universités pour diluer tous
les réels problèmes. Elles s’occupent beaucoup plus de leurs propres affaires
que des intérêts stricts de l’université surtout le volet pédagogique mais
passent leur temps à fréquenter le gotha politique et les salons des grands
hôtels tandis que les étudiants qu’ils ont censés représenter s’entassent dans
des cités dans des situations déplorables. On les a vus comment ils exposent leurs
poitrines sur les télés à l’occasion de la commémoration de la journée du 19
mai, journée de l’étudiant, en compagnie des autorités caressant infiniment le
poil dans le bon sens et maniant la langue de bois en toutes épreuves.
Le
nationalisme et le patriotisme c’est aussi lorsqu’on dénonce toutes les violences
faites à l’enseignement avec au bout du tunnel la sortie de diplômés à moitié
formés et totalement livrés à eux-mêmes. Vu les indéniables enjeux stratégiques
qui nous menacent de toutes parts, l’Algérie souffre pour sa pérennité de
cadres compétents surtout concernant la relève dans tous les domaines dont l’université
d’aujourd’hui serait incapable de les lui fournir sauf une salutaire renaissance
loin de toute démagogie et de toute ingérence purement politique avec comme
leitmotiv la science, rien que l’apprentissage du savoir pour se mettre au
diapason des pays qui préparent l’avenir et non en creusant sa tombe de ses
propres mains.
Si
l’Algérie est sortie indemne jusque-là, c’est grâce aux efforts fournis dans
les années qui avaient suivi l’indépendance avec ces cadres formés où les
algériens avaient une grande envie d’apprendre avec cette terrible soif du
savoir, sevrés il est vrai durant très longtemps par le colonialisme dans
toutes ses multitudes formes. Les hommes partent et reviennent mais l’Algérie
doit rester debout en son état jusqu’à la fin de ce monde, pour cela
assurons-lui juste d’être entre de bonnes mains et gouvernés par des esprits
éclairés pas de ceux dont l’horizon serait bouché et qui la cèderaient à la
moindre occasion au plus offrant tout en préparant la fuite dorée vers d’autres
cieux.
Références:
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