Je ne pense pas que la majorité des algériens ne
soient pas été concernés, de près ou de loin, de ce qui s’est déroulé lors de
la dernière session du comité central du FLN. Une réunion classée à haut risque
qui a lieu avec les deux camps antagonistes au grand complet et en présence de huissiers
de la justice s’il vous plait devant des médias venus couvrir en grand nombre
l’évènement si l’on pourrait le nommer ainsi où on a vu des personnalités, entre
guillemets, se chamaillaient pour des futilités qui n’ont absolument rien à
voir avec l’histoire, la grandeur et les valeurs du FLN, véritable cheval de
bataille, fédérateur de toutes les forces politiques du pays d’avant 62 et
grand artisan de son indépendance.
Les néo-maîtres du FLN ne discutaient pas de
nouvelles idées ou de programmes porteurs à entreprendre pour le pays malade de
leurs disputes, pour un oui ou un non, mais se battaient pour le maintien ou
non du secrétaire général dont on ignore officiellement les dessous des cartes
de son éviction. Rien n’est sorti de l’iceberg. Depuis plus de 2 ou 3 années,
c’est une véritable guerre de tranchées entre les pour et les contre le patron
du parti offrant un spectacle lamentable aux algériens et aux observateurs
étrangers et en piétinant davantage la bannière sous laquelle ils
s’affrontaient.
On n’est pas là pour défendre le parcours de
son désormais ex-chef mais si l’on suit une certaine logique, on ne pourrait
toucher à un seul cheveu de celui qui a fait gagner son parti aux deux
dernières élections en se permettant même le luxe de caracoler en tête du
peloton. Sauf, peut-être, si ses adversaires n’y croient pas à des victoires arrachées
librement d’urnes transparentes et dont ils connaissent sans doute tous les
secrets de cette alchimie.
Sa défaite politique aux élections aurait été dans
ce cas le seul argument possible qui pourrait accentuer sa chute. Si on
poserait la question, pourquoi veut-on le départ du chef du parti, à des membres
de ce comité qui ne tiendraient objectivement compte que de son bilan,
quoiqu’on dise est largement positif, on se demanderait quelles réponses iraient
chercher si ce n’est par hostilité à la personne dont on ne veut plus le voir à
la tête du pauvre FLN malmené dont seuls les 3 sigles, tant bien que mal, titubent
encore sous le poids de ses bourreaux.
En outre, un secrétaire général d’un parti ne
pourrait jamais sortir affaibli à la suite d’élections conquises haut la main
et qui devaient le conforter largement sur ses positions. Il est également
logique qu’un parti à double-tête ne pourrait nullement espérer remporter des
élections et se permettre même le luxe de plomber loin derrière lui tous ses
poursuivants. C’est aussi une autre contradiction et une bizarrerie à
l’algérienne.
Il est vrai que tout a été préparé en amont
pour que ce miracle ait pu se produire selon le schéma prescrit. Le chemin a
été déblayé devant le virtuel gagnant contrairement à celui de ses suivants qui
a été obstrué pour empêcher leur arrivée sur le podium en plus d’innombrables formations
dont la vie politique n’excède pas quelques maigres mois et en n’omettant pas
de citer au passage les fameux articles des 5 et 7% exclusifs de la loi
électorale qui ont fait des ravages en convertissant un parti minoritaire en une
majorité très aisée.
En dépit de cette victoire abondamment raflée,
on comprend à postériori l’entêtement des redresseurs, au fait des manœuvres
souterraines, à vouloir déchoir par tous les moyens l’infortuné premier
secrétaire de son trône. On ne pourrait pas naviguer à contre-courant du sort
qui lui a été réservé depuis qu’il commençait à exhiber ses griffes et à tenter
de vouloir voler de ses propres ailes en préméditant en catimini de jouer en
cavalier seul si jamais on lui desserrait les liens le ligotant au poteau alors
qu’il est juste ici en chargé de mission attendant les ordres ou à défaut les redressements
du palais.
C’est donc pour plusieurs raisons que les
algériens s’intéressent à l’histoire présente de ce parti dont les dernières
pulsions devraient s’arrêter en 62. Le
rajout de ces 50 années de rallonge à sa vie nous fait souffrir de le voir endurer
ce nième calvaire. Il a été ressuscité dans l’intention de lui faire jouer un
rôle qui n’est absolument pas le sien et dont il est totalement innocent. Il a
vécu ces supplémentaires années comme dans un cauchemar.
Il n’a été que l’ombre de lui-même, trimbalé
par tous les souffles, erré dans tous les déserts, trainé dans la boue, sali
comme il ne l’a jamais été. Il a même vécu des putschs scientifiques dont il en
est sorti plus qu’humilié. On lui a fait subir tous les supplices dont il se
souviendrait lorsque l’heure des comptes aurait sonné. Comme un malheur ne
vient pas tout seul, tous les échecs des gouvernants successifs lui ont été endossés.
Toute son histoire a été souillée durant ces 50 ans qu’il a construite et payée
du sang de ses enfants en 7 années d’une éprouvette lutte.
C’est l’histoire contemporaine du peuple
algérien qui lie la totalité des algériens au vieux parti dont la lettre
« L » a beaucoup de signification dans leur mémoire collective et qui
avait toute son véritable sens avant 62. Même si l’on n’a pas été tous
adhérents par carte au FLN, on a été tous naturellement militants de cœur, par
filiation ou par hérédité à l’enseigne emblématique qu’il représentait. Le
contraire aurait surpris tout le monde. Le FLN, c’est aussi l’histoire de la
révolution, qui a été complètement défiguré par la suite à vouloir l’impliquer à
toutes les sauces dès lors qu’il devait reposer en paix, ce héros spirituel de
la révolution. Il devait rester en cet état presque parfait, l’intouchable qui
devait résister à toutes les tentations des hommes à l’amadouer ou à
l’apprivoiser, lui le rebelle, l’indomptable qui a vaincu le colonialisme avec toute
son étendue.
Nos parents étaient à 100% FLN. Les enfants ne
pourraient que suivre logiquement par amour à leurs ascendants les idoles de
leurs aïeux en entretenant saine et sauve la légende. Comparativement tous les
algériens supportent aujourd’hui leurs équipes sportives nationales mais au niveau
local, chacun suit ses propres protégés. L’équipe première c’est pour tous,
elle est vénérée par tout le monde, elle ne peut se mesurer aux équipes du
championnat national. Autrement, elle deviendrait une équipe normale qui
perdrait de son aura à chaque fois qu’elle rencontrait une autre équipe ordinaire.
Elle n’aurait plus l’estime de tous en perdant de sa superbe à chaque tour
d’horizon. Son charisme serait vite écorné.
On se demande aujourd’hui pourquoi l’initiale « L »
n’a pas été modifiée puisque le pays a été libéré de l’ennemi extérieur. Pourquoi,
comme dirait cet internaute, l’ALN a changé de sigles en devenant ANP tandis que
le FLN est demeuré en l’état ? Si l’ALN a été le bras armé du FLN durant
la révolution, en toute logique, il ne pourrait continuer à jouer le même rôle
après l’indépendance. D’ailleurs, toutes les tendances politiques des algériens
d’avant 54 ont été regroupées en son sein pour s’unir afin de dégager la France
coloniale. Idem pour la fameuse équipe de foot du FLN qui avait porté haut et
fort sous son égide les aspirations profondes du peuple algérien à conquérir sa
liberté. Sitôt l’indépendance, cette équipe avait disparu au profit d’une
équipe nationale tout court. Ses joueurs sont allés le plus normalement du
monde rejoindre leurs équipes de club. Ce ne sont plus les mêmes combats et les
mêmes enjeux d’avant et d’après. C’était inconcevable qu’elle puisse rester
sous cette appellation.
Si cette équipe n’existe plus aujourd’hui, le
FLN devrait lui aussi retrouver sa place au sein du musée de l’histoire de ce
pays à titre posthume à l’instar de toutes les autres constantes nationales. Il
fallait le protéger, le conserver en son état pur. Regarder l’image que
préservent les Algériens de Mourad Didouche, de Larbi Ben M’hidi, de Mostefa
Benboulaid et de tous les martyrs. Ils ont cessé d’exister pour rentrer à
perpétuité dans le sacré. Les algériens dans leur ensemble devraient être plus
que concernés par ce qui est arrivé à ce patrimoine qui leur est très cher. Ils
sont dans leur droit de demander des comptes à ceux qui se sont autoproclamés
détenteurs des clés de la maison de ce parti. Lorsque le peuple algérien
constate amèrement ce qui a été fait par la suite du parti de l’indépendance, on
ne peut regretter qu’il ne soit pas mis en berne, en martyr les armes à la main
pour être idolâtré pour l’éternité.
Nous avons tous regretté ce qui s’était arrivé
lors des soulèvements d’octobre 88 où les propriétaires de l’époque ont fait maudire
ce sigle aux algériens au point où ils ne supportaient plus sa vue. L’image de
ses permanences incendiées ont été un choc pour les algériens qui ont vécu les
nuits sombres du colonialisme. Un blason pour lequel des algériens sont morts
en martyrs et pour lequel il est devenu une marque déposée pour tous les opprimés
sur terre.
En conclusion, il n’est jamais trop tard pour y
remédier à cet oubli de l’histoire pour rétablir une injustice en remettant ce
parti au peuple pour le prémunir dans sa galerie de tous les prédateurs qui persistent
toujours à l’affût à guetter les moindres opportunités.
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